Ce tuto beauté bouleversant dénonce les attaques à l'acide

Publié le Jeudi 03 Septembre 2015
Audrey Salles-Cook
Par Audrey Salles-Cook journaliste
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Reshma donne des conseils sur l'art et la manière de se mettre du rouge à lèvres lorsqu'on s'est faite attaquer à l'acide. Mais elle est surtout là pour prévenir du danger de la commercialisation de cette substance chimique.
Reshma donne des conseils sur l'art et la manière de se mettre du rouge à lèvres lorsqu'on s'est faite attaquer à l'acide. Mais elle est surtout là pour prévenir du danger de la commercialisation de cette substance chimique.
Pour frapper les esprits, une Indienne prénommée Reshma a décidé d'attirer l'attention des autorités sur les dangers de la commercialisation de l'acide dans une vidéo Youtube. Une incitative très courageuse pour cette jeune femme, qui a elle-même été violemment attaquée et défigurée.
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D'habitude, quand on évoque les tutoriels maquillage, c'est surtout pour parler de la dernière technique de contouring à la mode. Mais cette fois, il s'agit d'une thématique très sérieuse : les attaques à l'acide. Il en aura fallu du courage à Reshma, l'héroïne de ce tuto pas comme les autres, qui s'est exposée sur la toile pour expliquer comment se mettre du rouge à lèvres lorsqu'on a malheureusement subi le même traitement atroce qu'elle.

Au début, la jeune femme se contente de rester sur des considérations très "pragmatiques". Elle indique qu'il faut par exemple se servir d'une brosse à dents, pour enlever au préalable les peaux mortes sur les lèvres abîmées. Reshma préconise ensuite de passer une couche de baume à lèvres, pour avoir une base hydratée. La jeune femme termine sa démonstration en dessinant subtilement le contour de sa bouche à l'aide d'un crayon et en ajoutant enfin une couche de rouge à lèvres. La vidéo aurait pu en rester là. Pourtant, si Reshma s'est décidée à prendre la parole sur Youtube, ce n'est pas franchement pour parler beauté, mais plutôt pour alerter les gens sur la dangereuse commercialisation de l'acide dans son pays : l'Inde.

Stopper la commercialisation de l'acide

C'est pour les besoins de la campagne virale "Make Love Not Scars" (Faites l'amour, pas de cicatrices) que Reshma n'a pas hésité à s'afficher sur la toile, pour prévenir des conditions hallucinantes dans lesquelles les Indiens sont aujourd'hui autorisés à se procurer de l'acide :

"Finalement, voilà le conseil le plus important. Vous pouvez acheter du rouge à lèvres aussi facilement que de l'acide concentré. C'est la raison pour laquelle chaque jour une femme est victime d'une attaque à l'acide".

Alors que le nombre d'attaques à l'acide a augmenté de près de 250% en Inde entre 2012 et 2014 (1000 cas dénombrés par an), la vente de cette redoutable substance chimique continue d'avoir lieu sans aucun contrôle sur le marché, pour la modeste somme de 100 roupies (soit environ 1,34 euros).

Une pétition en ligne

Pour inciter le gouvernement à réagir, Reshma s'est donc impliquée à fond dans le mouvement #EndAcidSale. Une initiative encouragée sur le web, où la vidéo de Reshma a généré de nombreux commentaires admiratifs face à cette femme qui a perdu son oeil gauche suite à l'agression dont elle a été victime.

"Je te soutiens et je serai toujours de ton côté. Puisse Dieu veiller sur toi #resteforte"

"Le monde est pourri... A quel point faut-il être retardé et désespéré pour avoir besoin de faire ça à une femme ? Horrible, ridicule, je suis tellement écoeuré."

"Tu es magnifique et très courageuse Reshma. Continue à faire de cette planète un monde meilleur et surtout, bonne chance"

Les internautes se sont ainsi mobilisés pour signer la pétition (à parapher ICI ) adressée au gouvernement par le mouvement de Reshma, qui implore les autorités indiennes de durcir les conditions d'accès à l'acide. Un fléau de plus pour les femmes indiennes, dont le triste sort est de plus en plus médiatisé depuis le tragique décès de Jyoti Singh. Malgré le déferlement de colère qui a traversé le pays, la société indienne est toujours submergée par les cas de viols et les agressions dramatiques au quotidien. Aujourd'hui, Reshma et toutes les autres victimes ne demandent qu'une seule chose : l'interdiction pure et simple des nettoyants à l'acide et le classement de cette substance sur la liste des poisons. Espérons qu'elles soient entendues...