Égalité des sexes dans les manuels scolaires : en progrès, mais peut mieux faire

Publié le Mardi 16 Janvier 2018
Léa Drouelle
Par Léa Drouelle Journaliste
Résultats de l'étude du centre Hubertine-Auclert dans les manuels scolaires d'EMC : encore trop de sexisme
Résultats de l'étude du centre Hubertine-Auclert dans les manuels scolaires d'EMC : encore trop de sexisme
Le centre Hubertine-Auclert a passé en revue 25 manuels scolaires afin d'évaluer la qualité de l'enseignement de l'égalité des sexes à l'école. Les auteurs de l'étude notent de bons éléments, mais les clichés sexistes ont encore la vie dure.
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Voilà déjà plus de deux ans que la matière enseignement moral et civique (EMC) a fait son entrée dans les écoles françaises. Enseignée à l'école élémentaire, au collège et au lycée, cette discipline créée dans le cadre de la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'École de la République vise à transmettre aux enfants les valeurs communes les plus élémentaires qui régissent notre société. Solidarité, laïcité... mais également égalité hommes-femmes. Justement, comment l'école inculque-t-elle la notion d'égalité des sexes à nos enfants ? C'est la question posée par le centre francilien pour l'égalité hommes-femmes Hubertine-Auclert, qui a passé au crible 25 manuels d'EMC, montre une étude dévoilée ce mardi 16 janvier.

Premier constat : de manière générale, l'homme reste largement plus représenté que la femme (68,2% d'hommes contre 31,8% de femmes) dans les livres d'EMC. C'est particulièrement vrai pour le domaine de l'entreprise. En effet, quatre manuels différents proposent des infographies qui montrent un bureau rempli de silhouettes d'hommes en costume-cravate. Les femmes, elles, sont plus souvent illustrées à la maison ou dans leur rôle de maman, comme le montre un manuel qui met en scène une mère au foyer bénéficiant de prestations sociales (cette infographie illustre la section "droits sociaux", dans laquelle on voit également des salariés majoritairement masculins).

Les femmes sont donc principalement reléguées aux tâches domestiques. Un cliché sexiste qui a la vie dure : 59,6% des femmes y sont représentées, contre 40,6% des hommes, indique l'étude. Idem pour les milieux scolaires, qui restent majoritairement représentés par la gent féminine. "Il semble plus aisé de représenter des filles en situation scolaire, que de montrer des femmes dans la sphère publique en général et dans le monde professionnel en particulier", regrette Amandine Berton-Schmitt, chargée d'étude au centre Hubertine-Auclert.

Infographie : étude du centre Hubertine-Auclert dans les manuels scolaires d'EMC
Infographie : étude du centre Hubertine-Auclert dans les manuels scolaires d'EMC

"La femme politique la plus citée, c'est Marianne !"

Quant à la politique, les femmes sont davantage représentées dans leur rôle de citoyenne (67%) que d'élues ou professionnelle de la politique (33%). De manière générale, cette section reste la plus forte en termes de déséquilibre numérique, puisque les femmes ne représentent que 15,2% contre 84.8% d'hommes. "La femme politique la plus citée, c'est Marianne !", déplore Amandine Berton-Schmitt. Le deuxième domaine d'action où l'écart hommes- femmes se révèle le plus important est le droit, avec 22.3% de femmes contre 77.7% d'hommes, y compris dans le domaine de la magistrature, "alors qu'actuellement 80% des diplômés de l'école de la magistrature sont des femmes" a rappelé Amandine Berton-Schmitt au micro de France Inter ce mardi 16 janvier.

Il n'y a cependant pas que des mauvais éléments dans ces manuels. Amandine Berton-Schmitt note par exemple un effort en ce qui concerne la représentation des femmes dans la sphère des sciences et des savoirs, notamment par la représentation de la scientifique la plus célèbre de tous les temps, Marie Curie. La représentation des femmes célèbres semble d'ailleurs bien fonctionner pour les enfants. Amandine Berton-Schmitt salue notamment l'initiative d'un manuel qui, afin d'expliquer le concept de défense des droits des femmes, a pris pour exemple l'actrice Emma Watson (très populaire auprès des jeunes), ambassadrice de la campagne de ONU femmes HeforShe, qui milite en faveur de l'égalité des sexes.

Les manuels examinés reçoivent donc des résultats mitigés, avec la mention "peut mieux faire". "L''école a une mission assumée de mise en oeuvre de l'égalité filles-garçons. Et les manuels scolaires devraient en toute logique y participer", rappelle Amandine Berton-Schmitt. Cette étude, dont l'intégralité sera révélée ce mardi 16 janvier à 16h, vient clore une série de 5 études sur le sexisme dans les manuels scolaires menées par le centre Hubertine-Auclert depuis 2011. Ces analyses visent notamment à vérifier le nombre de femmes et d'hommes représentés dans les livres d'école et à repérer les préjugés sexistes susceptibles d'influencer les élèves sur la représentation des sexes et les stéréotypes de genre dans nos sociétés.