Machomètre 2015 : les 10 perles les plus sexistes de l'année

Publié le Mardi 22 Décembre 2015
Charlotte Arce
Par Charlotte Arce Journaliste
Journaliste en charge des rubriques Société et Work
Machomètre 2015
Machomètre 2015
On espérait qu'en 2015, les machos de tout poil et de tous bords se mueraient en fervents défenseurs des droits des femmes. Raté. Parce qu'est revenu le moment des traditionnels classements de fin d'année, on vous a concocté un top 10 du pire des pépites sexistes de ces 12 derniers mois. Attention, ça pique.
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1. Donald Trump et le sang qui "sortait de partout"

Donald Trump et sa moumoute ne sont jamais à une outrance près. En campagne pour les primaires républicaines, le milliardaire à la chevelure folle enchaîne depuis juin les meetings aux quatre coins des États-Unis, au cours desquels ils dézingue à tout va devant un public extatique. Ses cibles favorites ? Les migrants, les démocrates, les médias, les musulmans et... les femmes. Interviewé au lendemain du débat qui l'a opposé aux neuf autres candidats à l'investiture républicaine, Trump a explosé en direct sur CNN contre Megyn Kelly, la journaliste de FOX News qui avait eu l'impudence de l'interroger la veille sur son sexisme. "Il y avait du sang qui sortait de ses yeux, du sang qui sortait d'elle... de partout", a commenté le magnat de l'immobilier en faisant une référence à peine voilée aux menstruations féminines. Stay classy, Donald.

2. Dominique Martin et le retour des femmes à la maison pour "libérer des emplois"

La solution miracle du FN pour enrayer le chômage ? Renvoyer les femmes à la maison pour s'occuper du dîner et des gosses, pardi ! Présent lors d'une séance de la commission de l'Emploi et des Affaires sociales portant, entre autre, sur l'égalité salariale, l'eurodéputé frontiste Dominique Martin a très sérieusement proposé en mars dernier de donner aux femmes "la liberté de ne pas travailler" pour "s'occuper de leur foyer" et "donner une meilleure éducation aux enfants". "Vous en connaissez tous. Toutes ces femmes qui vont travailler à temps partiel pour 8-900 euros par mois [...] Croyez-vous qu'elles le fassent pour s'épanouir? Pour entrer dans la vie active? Pour être l'égal de l'homme ? Non elles le font parce qu'il manque entre 900 et 1 100 euros pour subvenir au besoin du foyer."

Ah, tu as avais bien bossé ce jour-là, Dominique. Tellement bien bossé que tu ne t'es pas demandé une seule fois pourquoi 82,5% des emplois à temps partiel étaient occupés par des femmes, ni si ce n'étaient pas justement ces inégalités d'accès à l'emploi ou les disparités de salaire entre femmes et hommes qui constituaient le fond du problème. Quant à accorder aussi aux pères le droit de rester à la maison pour s'occuper des enfants, ouhlala surtout pas ! L'éducation des enfants, c'est un truc de gonzesses ça.

3. Sophie de Menthon et le harcèlement de rue "plutôt sympa"

Lorsqu'en avril dernier, le Haut Conseil à l'égalité femmes-hommes a dévoilé un rapport affirmant que 100% des utilisatrices ont été victimes au moins une fois dans leur vie de harcèlement sexiste ou d'agressions sexuelles, la cheffe d'entreprise Sophie de Menthon a cru bon de donner son point de vue sur Twitter dans lequel elle affirme que se faire siffler dans la rue est "plutôt sympa".

Autant dire que les femmes qui se prennent chaque jour une main aux fesses sur la ligne 13 ou dans le RER B ont moyennement apprécié.

4. David Le Frapper et l'arbitrage "compliqué" d'une femme

"Une femme qui vient arbitrer dans un sport d'hommes, c'est compliqué". C'est ainsi que David Frapper, l'entraîneur du club de foot de Valenciennes, a commenté l'arbitrage de Stéphanie Frappart, coupable à ses yeux de ne pas avoir sifflé un penalty pendant une rencontre vendredi 30 octobre. Preuve que le monde du football est encore loin de laisser aux femmes la place qu'elles méritent. Heureusement, les propos de l'entraîneur ont été fermement condamnés par la Fédération Française de Football. Afin d'éteindre la polémique, David Le Frapper finit par présenter ses excuses : "Mes propos ont dépassé ma pensée. J'en suis désolé. Les femmes ont évidemment un rôle important dans le milieu du football. Je suis profondément déçu, ça ne me ressemble pas. Ces propos sont sortis sous le coup de la déception et de la colère. Je m'excuse auprès de Madame l'arbitre."

5. Jean d'Ormesson et Najat Vallaud-Belkacem

Ça vous choquerait si l'on se permettait de qualifier sur Terrafemina un homme politique, disons Manuel Valls ou Hervé Morin, de "Terminator de charme", de "sirène séduisante dont il faut s'éloigner au plus vite" ? Oui ? Parce que c'est ainsi que Jean d'Ormesson a parlé de Najat Vallaud-Belkacem dans une tribune parue en mai dans Le Figaro. Opposé à la réforme du collège défendue par la ministre de l'Éducation, l'académicien n'a pas hésité à utiliser des formules qui flirtent allégrement avec la concupiscence et la condescendance. Comme lorsqu'il affirme qu'elle défend sa réforme "avec sa grâce et son sourire habituels et avec une sûreté d'elle et une hauteur mutine dignes d'une meilleure cause". Ou comment couper court au débat de fond en portant l'attention sur le physique d'une femme politique.

6. Tim Hunt et les femmes scientifiques

Ce n'est pas parce qu'on a remporté un prix Nobel qu'on ne dit que des choses intelligentes. La preuve avec Tim Hunt. Invité en juin à Séoul pour assister à une conférence, ce biochimiste britannique a doctement affirmé devant une assemblée composée de femmes scientifiques de haut niveau qu'il préférait travailler dans un laboratoire exclusivement masculin pour éviter que les femmes de son équipe ne "tombent amoureuses de leurs collègues et pleurent quand on les critique". Face au tollé provoqué par ses propos, le scientifique s'est justifié maladroitement sur les ondes de la BBC4 : "Ce que j'ai voulu dire, c'est que ces enchevêtrements émotionnels ont rendu la vie [dans le laboratoire, ndlr] très difficile. Je suis vraiment, vraiment désolé, j'ai fait une erreur, c'est affreux. [...] Tout ce que je voulais, c'était être honnête en fait."
Aux dernières nouvelles, Tim Hunt a démissionné de son poste à l'Université College London et a déménagé au Japon.

7. Valérie Pécresse et son "rien de tel qu'une femme pour faire le ménage"

Candidate Les Républicains à la présidence de la région Île-de-France, Valérie Pécresse avait décidé en mai dernier de monter un coup de com' béton en invitant les médias à la filmer pendant qu'elle nettoyait en compagnie de militants une décharge à ciel ouvert en Seine-Saint-Denis. Pas de bol, les caméras du Petit Journal étaient là. Interrogée sur ses ambitions et son programme, Valérie Pécresse explique alors qu'elle veut "une région propre", avant de déclarer : "Rien de tel qu'une femme pour faire le ménage".

Depuis, elle s'est expliquée sur MadmoiZelle : "Quand j'ai dit 'rien de tel qu'une femme pour faire le ménage', c'était pas 'il faut une femme pour faire le ménage', c'était 'rien de tel qu'une femme pour prendre à bras-le-corps les vrais sujets'." On y croit moyen mais on a décidé de lui accorder le bénéfice du doute.

8. Gene Gnocchi et le harcèlement sexuel en direct à la télé

Qu'on se le dise, Gene Gnocchi est un gros dégueulasse. Invité fin septembre sur le plateau du journal de la chaîne locale italienne Puglia TV, cette ancienne gloire du football reconvertie en animateur télé s'est montrée d'une grossièreté sans nom en embrassant la journaliste Maria Grazia Lombardi sans son consentement. Visiblement peu habitué à se retrouver face à une femme qui résiste à son charme (lol), Gene Gnocchi s'est permis de couper la parole de son interlocutrice, avant de foncer elle pour l'embrasser avidement, avec force bruits de succion vraiment dégoûtants.

Interloquée, Maria Grazia Lombardi n'a réussi qu'à bredouiller qu'elle "se souviendrait de ce moment toute sa vie". Tu m'étonnes. Le plus triste, c'est que ni elle, ni les médias ayant relaté l'affaire ont considéré le geste de Gene Gnocchi comme du harcèlement sexuel. Ainsi, le très sérieux journal La Repubblica a déclaré qu'il ne s'agissait que "d'une démonstration d'affection inattendue digne de Roberto Benigni".

9. Jean-François Mayet et les femmes reproductrices

Dans la catégorie "je suis resté coincé dans les années 50", on demande Jean-François Mayet. Alors qu'il assistait mi-juillet à une réunion portant sur la désertification, ce sénateur de l'Indre et maire de Châteauroux a invoqué comme principale responsable la "féminisation" de la profession "puisque 75% des nouveaux diplômés sont des femmes. Or nonobstant l'égalité, elles sont quand même là pour faire des enfants..." Non, monsieur Mayet, les femmes ne sont pas "là pour faire des enfants". "Elles font des enfants, c'est différent", comme l'a justement fait remarqué la sénatrice Chantal Jouanno qui assistait à la commission.

10. Le spot sexiste de France 3

C'est ce qu'on appelle un epic fail. Début octobre, France 3 programmait un spot dans laquelle la chaîne se félicitait d'avoir une majorité de femmes à l'antenne. Problème : au lieu de mettre en valeur ses présentatrices, France 3 est tombé dans le piège des pires clichés sexistes.

Parce que c'est bien connu, quand les femmes travaillent, les repas brûlent, les chemises ne sont pas repassées. Parce qu'une femme ne peut pas faire les deux à la fois, d'une part, et que personne d'autre ne peut faire tout ça à sa place. Pas même son ou sa conjoint-e. Déprogrammé à la demande de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, le spot a aussi été fustigé par la secrétaire d'État chargée des Droits des Femmes Pascale Boistard.