Non, Rose McGowan n'a pas dit que #MeToo était un "mensonge"

Publié le Lundi 08 Octobre 2018
Marguerite Nebelsztein
Par Marguerite Nebelsztein Journaliste
Rose McGowan en septembre 2018
Rose McGowan en septembre 2018
Dans cette photo : Rose McGowan
Un article du "Times" fait dire à l'actrice Rose McGowan, l'une des figures de #MeToo, que le mouvement de libération de la parole était un "mensonge", terme qu'elle réfute en bloc.
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Le journal britannique The Times a publié dimanche 7 octobre un long entretien avec l'une des premières femmes à avoir témoigné contre Harvey Weinstein, Rose McGowan. Le titre de l'article fait dire à Rose McGowan que le mouvement #MeToo est un mensonge : "Rose McGowan, l'actrice qui a dénoncé Harvey Weinstein, sur pourquoi #MeToo est un mensonge".

L'ancienne actrice, qui dit ne plus jamais vouloir tourner, s'explique dans un tweet : "Je n'ai jamais dit que #MeToo était un mensonge. Jamais. Je parlais d'Hollywood et de Time's Up, pas de #MeToo. Ugh. J'en ai marre des bordels erronées. #MeToo, ce sont les survivant·es et leurs expériences, ce qui ne peut pas leur être enlevé·es."

Elle ajoute dans deux vidéos que #MeToo est "notre expérience et que c'est beau, tout comme nous le sommes".

Dans cet entretien au Times, Rose McGowan ne mâche pas ses mots. Elle se voit comme une militante à part, une femme en colère, et selon elle, une femme en colère n'a pas sa place au sein d'un mouvement qui se veut lisse comme Time's Up à Hollywood. Elle revient sur cette colère : "J'ai parfois une colère vertueuse, et j'ai droit à cette colère. Les femmes ont le droit d'être en colère. Quand les femmes se fâchent, on les considère comme instables. Parce que c'est 'indélicat'. Mais si vous êtes dans cette situation, vous en avez marre de la faire taire."

Dans cette interview-choc, elle dépeint une industrie du cinéma "dégoûtante" par sa violence et parce qu'elle perpétue un regard masculin sur les femmes. Et elle dézingue le mouvement Time's Up, ce collectif de plus de 300 actrices, scénaristes et metteuses en scène contre le harcèlement sexuel. "Je pense juste que ce sont des connards. Ce ne sont pas des champions. Je pense juste que ce sont des tocard·es. Je ne les aime pas. Comment expliquer le fait que j'ai reçu le prix GQ de 'l'homme de l'année' mais qu'aucun magazine féminin et aucune organisation féminine ne m'aient soutenue ?"

N'ayant été invitée à aucun des déjeuners de la campagne #MeToo, ni aux brunchs des survivant.e.s, elle les dénonce : "Je ne veux pas y aller, parce que c'est des conneries. C'est un mensonge. C'est un mensonge pour qu'ils se sentent mieux. Je connais ces gens, je sais qu'ils ont le foie fragile, et tant que ça a l'air bon à première vue, pour eux, c'est suffisant."

Tout au long de l'interview, elle se pose en combattante, affirmant par exemple que c'est une bataille qu'elle mène depuis vingt ans. Elle explique avoir accepté un rôle dans la série Charmed pour être connue et populaire et ainsi pouvoir dénoncer Harvey Weinstein et voir sa parole crue. Elle affirme également ne pas avoir voulu d'enfant pour ne pas l'exposer dans cette bataille.

"Ils essaient de me conduire au bord de la folie"


Arrêtée pour possession de cocaïne plus tôt dans l'année, Rose McGowan croit avoir été piégée par Harvey Weinstein. Elle ne décolère pas "d'avoir des menottes sur moi avant mon violeur. Tu veux t'agenouiller et crier et hurler, mais je savais que si je commençais, je n'arrêterais pas. [...] parce que je sais que c'est ce qu'il veut. Ils essaient de me conduire au bord de la folie et de m'oublier. Je ne laisserai pas cela arriver. Non."


Très marquée, elle explique avoir développé des maux physiques à cause du stress comme l'apparition d'une bosse dans le dos ou des problèmes d'estomac ou de peau. L'actrice de 45 ans explique être aussi assez seule. Lorsque la journaliste lui demande si quelqu'un·e prend soin d'elle, elle évoque son couple avec le.la mannequin.e non-binaire Rain Dove : "Rain fait du bon travail. Mais j'ai tellement été ma propre psy pendant si longtemps. Je suis habituée à être seule."


Dans cette interview, Rose McGowan s'imagine en messie contre les violences faites aux femmes : "Accroître la conscience. Que faisons-nous d'autre sur la planète ? Autant élever le discours. J'aimerais m'éloigner de cette histoire de harcèlement sexuel, d'agression sexuelle. Mes pensées et théories actuelles sont beaucoup plus larges que cela."

Faire tomber Harvey Weinstein et ce qu'il représente, voilà ce qui aurait sa liberté à Rose McGowan : "J'ai une liberté que je n'ai jamais eue. Et c'est ce que j'avais prévu. J'ai travaillé à ce moment pendant longtemps. Maintenant, j'ai une vie en partie dans l'inconnu. Jusque-là, j'avais un plan. [...] C'est exactement comme je l'imaginais. Je voulais montrer aux gens que si on coupe la tête du pouvoir, on peut tout faire."