"Une ville à soi" : pourquoi on dévore cette belle histoire d'amitié chinoise

Publié le Vendredi 16 Novembre 2018
Marguerite Nebelsztein
Par Marguerite Nebelsztein Journaliste
Une ville à soi de Chi Li
Une ville à soi de Chi Li
"Une ville à soi", le nouveau livre traduit en français de l'autrice chinoise Chi Li, nous plonge dans une rue de la ville de Wuhan, à la rencontre du destin de deux femmes. Une belle histoire de sororité.
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L'histoire

Dans la petite boutique florissante de cirage de chaussures de Mijie, nichée dans la rue Shuita à Wuhan, au centre de la Chine, les jours s'écoulent. Les choses restent bien à leur place, faisant le bonheur et la stabilité de Mijie. Jusqu'au jour où l'une de ses voisines, Fengchun, éduquée et employée dans un centre d'affaires de la ville, débarque dans sa boutique. Elle demande à travailler comme cireuse de chaussures.

Fengchun, qui détonne parmi les autres cireuses issues de la campagne, veut créer un choc pour son bellâtre de mari qui la délaisse en acceptant un travail moins prestigieux.

Une amitié va peu à peu naître entre Mijie, la patronne exigeante, veuve qui vit avec son fils et sa belle-mère, et qui a su tout reconstruire après la mort de son mari, et Fengchun qui croit connaître la vie, mais qui pêche par naïveté.

Mijie va éduquer Fengchun et lui rappeler les réalités de la vie des femmes en Chine. Elles vont chacune s'ouvrir peu à peu à l'autre et se raconter leurs secrets les plus enfouis, qui ne peuvent rester qu'entre elles, scellant une amitié de "soeurs jurées".

Pourquoi on a aimé

Chi Li a publié de nombreux livres, très populaires en Chine. Une ville à soi est son dixième publié en France chez Actes Sud. Chi Li est l'une des autrices chinoises qui, depuis trente ans, donne la parole à la société chinoise. Elle a été médecin avant d'être autrice, notamment dans la ville de Wuhan, qu'elle met en avant dans Une ville à soi. Elle s'est sûrement inspirée de sa vie pour imaginer ses personnages puisque tout comme son héroïne Mijie, son père a été militaire.

De l'espace personnel de Mijie dans l'arrière-boutique, où nulle ne pénètre jamais, à la boutique, à la rue, puis au quartier et à la ville, l'autrice fait sans cesse le va-et-vient entre l'intimité et l'immensité de la ville.

Par cet effet de loupe, qui sans cesse passe du micro au macro, Chi Li parvient à scruter la pensée profonde des deux héroïnes et la société dans laquelle elles évoluent. Cette société pétrie de valeurs morales dont il est difficile de s'extraire.

Dans Une ville à soi (dont le titre n'est pas sans rappeler le classique féministe de Virginia Woolf, Une chambre à soi), les deux héroïnes se retirent dans un espace intime pour pouvoir s'ouvrir l'une à l'autre et réfléchir à leur condition, loin du tumulte et de la pression de la rue et de la société.

On se délecte également des descriptions de plats comme la soupe de canard à la poire mijotée dans une marmite scellée de boue, une carpe frite ou celle des tiges de moutarde sautées revenues au wok. On en a l'eau à la bouche...

Pourquoi vous aimerez

Si vous appréciez les histoires d'amitié inattendues et fortes et la sororité entre femmes.
Si vous avez déjà lu les passionnants livres de la journaliste et autrice Xinran et que vous voulez vous replonger dans ce quotidien et dans la pensée profonde des Chinoises.

Une ville à soi, Chi Li, traduction de Hang Ling et Vanessa Teilhet, Actes Sud, 189 pages, 16,50 €

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