Les femmes ont la parole. Et c’est de cette parole – autour des activités et des actions du Planning familial, où, depuis cinquante ans, des femmes écoutent d’autres femmes aux prises avec leur sexualité, leur liberté d’aimer et d’avoir des enfants – que Claire Simon a décidé de faire le sujet et le moteur principal du film les bureaux de Dieu, qui vient de sortir en DVD. Un film singulier, si vrai, si vivant, si proche, qu’on pourrait croire si l’on n’y reconnaissait pas des actrices connues – Nathalie Baye, Nicole Garcia, Béatrice Dalle, Marie Laforet, Isabelle Carré, Rachida Brakni, Anne Alvaro… - qu’il s’agit d’un documentaire.
C’est là d’ailleurs tout le pari de Claire Simon : faire une œuvre de fiction à partir de témoignages réels qu’elle a enregistrés au Planning familial pendant six ou sept ans, confronter des actrices – et des acteurs : Michel Boujenah et Emmanuel Mouret – célèbres qui interprètent les professionnels du « Planning familial » à des non-comédiennes qui jouent, elles, les textes recueillis par la réalisatrice et leur apportent ainsi vérité, fragilité, maladresse… D’ailleurs pour être au plus proche de l’émotion de la réalité et des vraies rencontres, la réalisatrice qui a filmé tous ces entretiens en plans séquences, a privilégié la surprise : les “consultantes” ne découvraient que lors du tournage devant quelle actrice connue, elles allaient jouer leurs confidences.
Présenté à la Quinzaine des réalisateurs 2008, Les bureaux de Dieu est un film salutaire. D’abord parce qu’il montre, loin des idées reçues, que le Planning familial, ce lieu magnifique où « chacune vient pour trouver une ou des femmes capables d’entendre sans s’évanouir ce que la mère, la fille, le frère, le père, le mari, l’amant, la copine, le prof, la police, le médecin, l’Etat préfèrent ignorer », a plus que jamais sa raison d’être : tout est loin d’être réglé en ce qui concerne la contraception et l’interruption de grossesse ; on assiste même au contraire à une sorte de régression car pour beaucoup de jeunes filles, ces sujets sont toujours tabous. Ensuite, parce qu’il est une sorte d’état des lieux des interrogations que partagent toutes les femmes et que les hommes ne vont donc plus pouvoir ignorer.