Les lolitas version numérique : l'interview de Béatrice Copper-Royer

Publié le Mardi 06 Mars 2012
Les lolitas version numérique : l'interview de Béatrice Copper-Royer
Les lolitas version numérique : l'interview de Béatrice Copper-Royer
L'hypersexualisation des jeunes filles puise ses ressources et son inspiration sur internet. Cette nouvelle vague de l'Observatoire Orange-Terrafemina avec NRJ s'intéresse ainsi aux lolitas, et à la façon dont le numérique influence leur sexualité et leur vision de la femme. Découvrez l'avis de la psychologue spécialiste de l'enfance Béatrice Copper-Royer.
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Béatrice Copper-Royer est psychologue et psychothérapeute, spécialiste de l’enfance et de l’adolescence. Elle est l'auteure, chez Albin Michel, de « Vos enfants ne sont pas des grandes personnes », « Peur du loup, peur de tout » et, dans la même collection, « Non, tu n'es pas encore ado » en collaboration avec Guillemette de La Borie. Béatrice Copper-Royer est également la cofondatrice de l’association e-enfance.

Terrafemina : Lors de vos consultations, avez-vous déjà rencontré des « lolitas » ? Comment se comportent-elles ? Que pensez-vous de ce phénomène de l’ « hypersexualisation » ?

Béatrice Copper-Royer : Ce que je vois surtout c'est un souci de leur image assez surdimensionné chez les jeunes filles de 11-13 ans qui veulent avoir l'air très grandes et adoptent souvent, par imitation, des comportements qui ne sont pas vraiment de leur âge. Autre phénomène, les gamines que l’on met en scène dans les concours, et qui deviennent les faire-valoir de leurs parents. Je comprends que les petites filles aient envie de porter des talons, mais cela doit rester au niveau du jeu.

Tf : Quel est le rôle d’internet dans cette hypersexualisation ?

B.C.-R. : On assiste à une « hypernarcissisation » des jeunes filles car les réseaux sociaux les renvoient à leur image : elles publient notamment beaucoup de photos d’elles ; Il y a donc un risque d’excès et dans le même temps peu de limites. Du coup, on assiste à des dérapages avec des filles qui s’exhibent sur internet alors qu’elles ne le feraient pas devant leurs copains. Avec l’écran, le rapport à l’intimité et à la pudeur est donc bafoué. Par ailleurs il est troublant que des jeunes filles de 10-12 ans aient accès à des images pornos. C’est une catastrophe pour leur idée de la sexualité, et l’image qu’elles ont de la femme, une femme soumise à la merci du pouvoir de l’homme.

Tf : Selon le sondage CSA réalisé pour notre Observatoire, 1 Français sur 2 est favorable au contrôle de l’accès aux contenus sur internet, tandis que 42% des sondés sont pour que les jeunes se fassent leur propre idée tout en donnant des conseils. Qu’en pensez-vous ?

B.C.-R. : Le résultat du sondage montre surtout que les parents sont un peu flous et indécis sur ces questions dont ils mesurent mal l'importance, jusqu’au jour où ils sont concernés directement via un de leurs enfants à un dérapage. Je pense que les parents ont une éducation à faire, un contrôle à mettre en place. Il est important que les parents continuent de penser qu’ils ont quelque chose à transmettre à leurs enfants. Il faut qu’ils rappellent à leurs enfants les valeurs, et les notions d’intimité et de pudeur. Il faut développer chez ces jeunes filles le côté affirmation de soi, la capacité d’assumer ses goûts, ses préférences, et ne pas se laisser absorber par le groupe. Aujourd’hui les réseaux sociaux favorisent la transmission horizontale. Il existe une résonance extraordinaire du discours des jeunes, grâce à internet. Il faut donc que le discours parental fasse contrepoids.


Béatrice Copper-Royer

Crédit photo : iStockphoto

Résultats de l'Observatoire Orange-Terrafemina sur les lolitas version numérique

Les résultats complets de l'Observatoire Orange-Terrafemina
L'étude qualitative par l'Institut Treize articles WebLab

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