Natasha Derevitsky nous révèle les coulisses de l'édition !

Publié le Mercredi 11 Mai 2011
Natasha Derevitsky nous révèle les coulisses de l'édition !
Natasha Derevitsky nous révèle les coulisses de l'édition !
La responsable éditoriale Natasha Derevitsky de la collection Pocket Jeunesse nous parle de son métier, et nous explique le succès de la saga "Hunger Games"!
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Terrafemina : Bonjour Natacha, pourriez-vous nous présenter votre activité au sein d’Univers poche ?

Natasha Derevitsky : Je suis responsable éditoriale de la collection Pocket Jeunesse et de son développement. Je travaille également avec les autres éditeurs d’Univers poche sur le segment des Jeunes adultes.

Mon travail consiste, entre autres, à rechercher sans cesse de nouveaux projets de développement. Pour cela, j’assiste, comme tout éditeur, aux foires des livres, je me déplace à l’étranger pour trouver des textes qui sauront susciter des coups de cœur de la part du jeune public. Je recherche également des auteurs français.

Par ailleurs, je suis avec intérêt tous les mouvements et liens sociaux sur Internet : blogs, forums, Facebook, sites d’écrivains… C’est là un formidable vivier pour surveiller les tendances et les goûts de nos lecteurs.

Je suis aussi en relation constante avec les éditeurs étrangers, et les agents d’auteurs qui nous signalent les nouveaux projets en création.

Je suis également amenée à travailler avec mes homologues européens et anglo-saxons. Nous partageons des informations, nous confrontons nos points de vue sur certains textes, les couvertures, les axes de communication... Bien sûr chacun de nous adapte ces éléments à la culture de son pays, mais ces échanges sont toujours enrichissants.

Et puis, il y a aussi tout le travail avec nos services transversaux : marketing, communication, artistique, financier, commercial… sans lesquels aucun lancement ne serait possible. Pour en revenir au métier d’éditeur à proprement parler, c’est un travail d’intuition qui répond toutefois à des règles économiques strictes. On peut avoir un coup de cœur pour un texte et ne pas trouver l’écho souhaité auprès du public ! Finalement, nous n’avons aucune garantie, ce qui est assez stressant, mais qui fait tout le sel de notre métier !

TF : Qu’est ce qui vous a attiré dans le projet Hunger Games ?

Natasha Derevitsky : Nous avions, notre directeur de collection et moi, un banal rendez-vous à Londres avec un agent littéraire. Les livres n’étaient encore qu’au stade de projet. Le pitch nous a plu, et plus tard, le manuscrit nous a séduit, même s’il a donné lieu à des débats passionnés en interne : quelle cible, quelle tranche d’âge, comment communiquer, qu’est-ce que l’auteur veut exactement dénoncer ?

Chacun à notre manière, nous avons accroché au rythme haletant du récit ; le manuscrit était réellement atypique, surprenant, je dirais même détonant, à un moment où nous ne recevions que des textes de fantasy ou fantastiques, avec des vampires, des anges et des démons. Katniss, l’héroïne de Hunger Games, est un personnage fort, très émouvant, qu’on aime immédiatement. Bref, nous avons été conquis par ce roman intelligent, au cœur de l’actualité, qui dénonce les méfaits de la télé-réalité.

Quand nous avons fait lire ce manuscrit à notre comité de lecteurs, nous avons très vite observé qu’ils nous demandaient tous la suite ! Cela nous a confortés dans notre choix.

Depuis le succès du premier tome d’Hunger Games, nous recevons beaucoup de manuscrits dans la même lignée : il a initié l’engouement pour la dystopie. Aujourd’hui, ce genre est très présent dans la littérature jeunesse. Dans notre monde tourmenté, la dénonciation du totalitarisme, des dérèglements climatiques, des sociétés post-apocalyptiques… tout ceci a donné lieu à un réel courant littéraire (même si Orwell avait donné le ton !). Et dans ce futur noir, plus ou moins proche, le héros doit survivre et sortir vainqueur.

TF : Que prévoyez-vous pour accompagner la sortie du film Hunger Games ?

Natasha Derevitsky : En vue de la sortie du film en mars 2012, nous mettons en place un dispositif très puissant. Nous lancerons peut-être un coffret réunissant les trois volumes, ou bien une intégrale comme pour Les Gardiens de Ga’Hoole ou Les Chroniques de Spiderwick.

Hunger Games connaît un grand succès international : 42 pays ont déjà acheté les droits et la trilogie se hisse dans la liste des best sellers ! Nous faisons tout, au sein du groupe, pour faire exploser cette trilogie en France aussi. Il est certain que le film est un vecteur de large diffusion qui permettra à cette trilogie de mieux se faire connaître.

TF : De quand date le succès des sagas littéraires dans la littérature jeunesse ?

Natasha Derevitsky : On a senti un véritable changement dans la littérature jeunesse avec J.K. Rowling. Elle a bouleversé le paysage existant. Depuis Harry Potter, on ne craint plus les gros livres : les histoires sont plus denses, plus ambitieuses. Il y a toujours eu des séries en Jeunesse : le Club des 5, Chair de Poule, et bien d’autres…. Mais aujourd’hui, ces nouvelles sagas ne peuvent être lues dans le désordre. De nouveaux sujets ambitieux sont traités et cette nouvelle génération de livres attire de plus en plus de jeunes (et de moins jeunes), de plus en plus d’auteurs et d’éditeurs aussi. Et dans la mesure où l’adolescence est plus longue (on est ado plus tôt et on devient adulte plus tard) les sujets ne manquent pas !

TF: Sauriez-vous prédire le futur de la littérature jeunesse ?

Natasha Derevitsky : Aujourd’hui les projecteurs sont majoritairement braqués sur la littérature adolescente, celle des 15-20 ans. Il ne faut pas pour autant négliger les autres tranches d’âge notamment les 8-12 ans. N’oublions pas que ce sont les grands lecteurs de demain. Il est donc fondamental de leur faire découvrir qu’un bon livre peut procurer un immense plaisir. Tout n’est qu’une question de cycles ; d’ici quelques années, j’en suis persuadée, on reviendra à un plus jeune public… Laissons s’exprimer la créativité des auteurs !

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