Non, le dernier Français à avoir gagné Roland Garros n’est pas Noah, c’est Mary Pierce !

Publié le Mercredi 05 Juin 2013
Non, le dernier Français à avoir gagné Roland Garros n’est pas Noah, c’est Mary Pierce !
Non, le dernier Français à avoir gagné Roland Garros n’est pas Noah, c’est Mary Pierce !
Dans cette photo : Yannick Noah
« 2013, l’année Tsonga ! » titrent, à raison, la plupart des médias depuis le début du tournoi. En effet, alors que le français vient de décrocher haut-la-main son billet pour la demi-finale de Roland Garros en ne faisant qu’une bouchée de Rodger Federer, aka le meilleur joueur de tous les temps, tous les espoirs sont permis. Comme celui d’offrir au pays sa première victoire sur la terre ocre boulonnaise depuis… mais depuis quand, au fait ?
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Si nos confrères frétillent d’excitation à l’idée que Tsonga le sauveur vienne enfin brandir sur le Central de « Roland » la coupe tant convoitée, ils sont également nombreux à souligner que si cela advenait, Jo-Wilfried serait le « premier joueur français » à remporter Roland Garros depuis la victoire de Yannick Noah en 1983. Il y a trente ans, donc. C’est vrai que cet anniversaire aurait de la gueule. Trois décennie presque jour pour jour après les larmes de Yannick, la victoire du métisse Tsonga (son père est d’origine Congolaise et sa mère originaire de la Sarthe) sur ce même Central ferait les choux gras de la presse friande de belles images et de symboles.


Et pourtant, n’en déplaise aux historiens du sport, Yannick Noah n’est pas le « dernier Français à avoir remporté Roland Garros », ainsi qu’il l’a lui-même récemment déclaré au journal Metro, et que se plaisent à le rappeler nombre de journaux depuis. Eh oui, le dernier joueur à avoir remporté Roland Garros n'est autre que… Mary Pierce, qui remporta le tournoi en 2000 face à Conchita Martinez (ainsi que celui de double avec Martina Hingins).

Le tennis tombé dans le piège sexiste ?

Perdu dans les couloirs du temps des mémoires journalistiques, cet événement pourtant hautement symbolique n’aurait manifestement aucune légitimité. Pourtant, nous savons tous que par « joueur », on entend « joueur » et « joueuse », règle grammaticale oblige, qui veut qu’encore et toujours le masculin l’emporte sur le féminin. Soit. Mais depuis quand la règle veut-elle qu’une victoire féminine, qui plus est en tennis, soit dès lors passée sous silence ? Que l’Olympique lyonnais féminin atteigne la finale de la Ligue des champions et se batte en catimini sur la TNT alors que le pays se met en branle dès lors qu’un club masculin parvient à sortir des poules, on a l’habitude. Mais on pensait que le tennis, qui fut l’une des premières disciplines à offrir à des femmes telles que Navratilova ou Chris Evert (et après elles Monica Seles, les sœurs Williams, Gabriela Sabatini ou Steffi Graf) une gloire et une légitimité que nul alors ne contredisait, saurait éviter le piège sexiste.

Sous le manteau, certains arguent également que la victoire de Pierce ne serait pas « comptabilisée » dans les mémoires car celle-ci ne serait « pas vraiment française ». Guère plus reluisant comme argumentaire...

Pour une mémoire « chic et bien »

Las. Chaque jour de pluie diluvienne, lorsque France Télévision s’est lassé de filmer la bâche tendue sur les cours, on nous repasse la victoire de Noah se jetant dans les bras de son papa, deadlocks au vent. Quant au principal intéressé, il convient dans « Le Parisien » que Tsonga en finale, ce serait vraiment « chic et bien ».

Vous savez ce qui serait vraiment « chic et bien », chers confrères, c’est qu’on rappelle que si Tsonga gagne, ce sera la première victoire française à Roland Garros depuis 2000. Celle d’une femme, qui sut la première briser la malédiction de la porte d'Auteuil subie depuis 83.

Ce qui serait également "chic et bien", ce serait de rappeler que dans les faits, le dernier français à avoir réellement remporté Roland Garros est Stéphane Houdet, qui a remporté le tournoi en handisport l'année dernière, en 2012, lequel rappelle dans un article paru ce jour sur Le Plus du Nouvel Observateur que, tout au long de l'année, les joueurs du circuit "classique" et handisport partagent les mêmes vestiaires tout en déplorant que sa discipline ne bénéficie pas d'une bonne visibilité.

Allez Jo, sans rancune, on tous est avec toi !