JO de Londres 2012 : la Saoudienne Shaherkani traitée de « prostituée » dans son pays

Publié le Vendredi 10 Août 2012
JO de Londres 2012 : la Saoudienne Shaherkani traitée de « prostituée » dans son pays
JO de Londres 2012 : la Saoudienne Shaherkani traitée de « prostituée » dans son pays
Dans cette photo : Teddy Riner
La première athlète saoudienne autorisée à participer aux Jeux olympiques subit un violent retour de bâton dans son pays. Wojdan Ali Shaherkani, qui est apparue tête couverte pour son épreuve de judo aux JO de Londres, est considérée comme une « prostituée » par les religieux, une honte à la condition féminine musulmane. Son père porte plainte.
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Lorsqu’elle est apparue devant les tatamis le 3 août dernier, Wojdan Ali Shaherkani était attendue par une centaine photographes, une meute plus nombreuse qu’autour de Teddy Riner. Le monde entier voulait voir l’entrée de la première athlète saoudienne aux Jeux olympiques, couverte qui plus est d’une sorte de bonnet de bain, censé remplacer son voile. Après un combat expédié en moins de deux minutes, la judokate de 16 ans, prostrée et sans doute effrayée, est sortie sous les acclamations du public, laissant son entraîneur répondre aux journalistes pour elle. Ce jour-là, la star c’était elle. Le retour en Arabie Saoudite s’est avéré plus rude.

Les réactions ont été parfois violentes, et c’est évidemment sur Twitter que les plus radicaux se sont déchaînés sur le cas de la judokate. Des commentaires racistes sur les origines asiatiques de celle-ci et des insultes qualifiant l’adolescente de « prostituée » à cause de sa participation aux JO ont déferlé sur la Toile. « Vous n’incarnez pas la chasteté d’une femme musulmane » écrivait Mohammed al-Barrak, maître de conférences à l’université Umm Al-Qura de La Mecque, sur sa page Twitter.

Un rapport de Human Rights Watch daté du mois de février laissait présager ce déchaînement. Intitulé « Steps of the Devil : Denial of Women and Girls’ Rights to Sport in Saudi Arabia », le document présente les objections entretenues dans le pays pour empêcher la pratique du sport par les femmes. « Le fait que le sport doit être réservé aux hommes et aux jeunes garçons semble fondé non pas sur la loi religieuse, mais sur des normes culturelles qui considèrent que le rôle unique de la femme est de tenir le foyer et d’élever les enfants, et sur des suppositions sous-jacentes d’enseignements religieux », peut-on lire dans ce rapport.

D’après ces codes culturels, l’activité physique les obligeant en effet à des mouvements impudiques, à porter des vêtements tout aussi impudiques face à des hommes inconnus, mène à « l’immoralité » et à la désagrégation de la pureté de la femme saoudienne. Cité par le Daily Beast, le Dr. Mohammad al-Arifi, un religieux prêchant dans la mosquée Al-Bawardi de Riyad, s’est chargé de mettre en garde le Prince Nawaf sur les dangers d’envoyer des femmes aux JO de Londres : « Que les femmes pratiquent le sport est fondamentalement autorisé, mais si cela les conduit à se mêler aux hommes, ou à révéler des parties intimes de leurs corps, ou à ce que les hommes les regardent en train de courir, tomber ou pratiquer la gymnastique, ou en train de se battre ou d’autres sports, alors que les caméras tournent et que les chaînes de télévision diffusent les images, alors il ne fait aucun doute que c’est interdit. »

La décision finale du Prince n’a donc pas manqué de susciter une levée de boucliers de la part des religieux et des Saoudiens les plus conservateurs. Le père de la judokate n’a pas été épargné, décrié pour son opiniâtreté à vouloir faire entrer les femmes dans la compétition des JO. Celui-ci a réagi aux attaques dirigées contre sa fille sur Twitter, en portant plainte auprès du ministre de l’Intérieur, d’après ses déclarations au quotidien Al-Sharq. Un avocat aurait été désigné pour poursuivre les auteurs des insultes.

Voir la vidéo de la judokate voilée sur le tatami


Source : thedailybeast.com
Crédit photo :SUZANNE PLUNKETT, REUTERS/lapresse.ca

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