Kirghizistan : une loi contre l'enlèvement des mariées bouscule les traditions

Publié le Mardi 25 Décembre 2012
Kirghizistan : une loi contre l'enlèvement des mariées bouscule les traditions
Kirghizistan : une loi contre l'enlèvement des mariées bouscule les traditions
Un tiers des jeunes mariées auraient été enlevées et unies de force à leur mari dans la société kirghize. Pour mettre un terme à cette tradition impensable dans la société moderne, le Parlement a voté une loi qui durcit les sanctions à l'égard des kidnappeurs. Le président de la République doit encore la signer.
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Au Kirghizistan, petit pays d’ex-URSS d’à peine six millions d’habitants, une tradition ancestrale est malmenée par des organisations de femmes : elles demandent une aggravation des peines pour les hommes qui  kidnappent des jeunes filles pour les épouser. En effet, selon le Women’s Support Centre (WSC) de Bishkek, la capitale située au nord du pays, 12 000 femmes seraient enlevées chaque année par leur futur mari, 8 000 selon le bureau du médiateur. D’après Petr Lom, le réalisateur du documentaire « Mariage à la kirghize », une femme sur trois est kidnappée et mariée de force au Kirghizistan.

Jusqu'à alors, peine maximale de trois ans

Or le Parlement a approuvé le 13 décembre une loi qui augmenterait les peines de prison pour les auteurs de ces enlèvements. Actuellement, l’article 155 du code pénal du Kirghizistan condamne cette pratique ancestrale depuis 1994 mais la peine maximale est de trois ans. Le projet de loi propose de l’allonger à sept ans, après une première suggestion de dix ans qui a provoqué un tollé dans tout le pays.

Rimma Sultanova de WSC trouve la législation scandaleuse : « la peine pour un voleur de bétail est de onze ans alors que pour enlèvement de jeune fille, elle est de trois ans maximum ».  De plus, il est très rare que les jeunes femmes portent plainte car elles jetteraient le déshonneur sur leur famille. Elles n’attirent donc généralement pas l’attention sur elles. Et pour l’instant, les poursuites judiciaires ne peuvent démarrer si les victimes ne portent pas plainte.

La force des traditions

Si le Parlement a voté cette loi, le président de la République du Kirghizistan Almazbek Atambayev doit encore la ratifier pour qu'elle soit appliquée. Et les voix de l’opposition se multiplient : dans la société kirghize, les hommes qui atteignent un certain âge et les familles pauvres défendent ce mode de mariage puisqu'il est économique et rapide. Avec la validation de la loi, l’État pourra engager des poursuites judiciaires contre des hommes mariés qui ont enlevé leur femme puisque le délit est désormais considéré comme majeur. 

Ainuru Altybayeva, une députée à l’origine de la nouvelle loi sait que le processus devrait prendre du temps mais affirme qu'en « déclarant l’enlèvement de jeunes femmes pour les marier comme un crime et non plus comme une tradition, le gouvernement devrait aider les mentalités à changer ».

Crédit photo : Yoray Liberman/Getty Images, for NYT

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