Au Venezuela, une reine de beauté assassinée pour avoir manifesté

Publié le Lundi 24 Février 2014
Au Venezuela, une reine de beauté assassinée pour avoir manifesté
Au Venezuela, une reine de beauté assassinée pour avoir manifesté
Dans cette photo : Barack Obama
A Caracas comme dans toutes les grandes villes du pays, la fronde populaire contre le gouvernement chaviste ne faiblit pas. « Le Venezuela n'est pas l'Ukraine », rétorque le président Maduro. Pour autant, les manifestants comptent aussi leurs morts, dont une ancienne reine de beauté.
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Génesis Carmona est morte, ce 18 février, fauchée d’une balle en pleine tête. Elle avait A 22 ans. Dans la nuit de mardi à mercredi, cette reine de beauté – elle fut élue « Miss Turismo Carabobo » en 2013 – a succombé à ses blessures à l’hôpital de Valencia, commune située à centaine de kilomètres de la capitale Caracas. Quelques heures avant, l’étudiante en marketing manifestait, comme des milliers d’autres jeunes Vénézuliens, dans les rues de sa ville afin de protester contre le pouvoir socialiste. Nicolás Maduro, le successeur attitré de Hugo Chavez élu démocratiquement en avril dernier, fait ainsi face à sa première grande crise. Quinze jours déjà que la grogne sociale, portée principalement par les mouvements étudiants, fait rage dans l’ensemble des grandes agglomérations du pays. Une fronde populaire nourrie notamment par le climat d’insécurité et la profonde crise économique que connaît actuellement le Venezuela, pays en proie à une inflation record de 56 % et des pénuries de plus en plus récurrentes.

Brutalité policières et tirs à balles réelles d’individus non identifiés

Si la répression policière n’est pas exempte de brutalités, comme l’atteste de nombreuses vidéos postées sur le net, il est peu probable que l’assassinat de Génesis Carmona soit le fait des forces de l’ordre. L’homme qui a tiré à bout portant sur la jeune femme – cinquième victime depuis le début des manifestations antigouvernementales – n’a, d’ailleurs, pas été identifié. Mais la responsabilité d’un tel déchaînement de violence leur incombe-t-elle ? La question se pose vivement. En effet, si la police antiémeute fait usage de gaz lacrymogènes, voire de tirs au plomb, pour disperser les manifestants, des groupes de civils, circulant le plus souvent en moto, n’hésitent pas à tirer à balles réelles sur les opposants. Or, ces derniers les soupçonnent fortement d’être téléguidés par le pouvoir.


Nicolás Maduro refuse de céder face aux « groupes fascistes »

Inflexible, malgré les nombreuses flambées de violence, Nicolás Maduro affirme, dans une rhétorique redondante, qu’il ne flanchera pas face aux « groupes fascistes », tout en promettant l'organisation rapide d'une « conférence nationale de paix ». Dialogue national  qui entend rassembler, selon ses dires, « tous les courants sociaux, politiques, corporatistes, religieux ». Reste que, pour le moment, l'héritier de Hugo Chavez est avare en matière de concessions politiques. Preuve de sa détermination à ne pas céder un pouce face à la révolte estudiantine, le président socialiste a fait arrêter l’une des personnalités les plus en vue de l’opposition, Leopoldo Lopez, fondateur du parti Voluntad Popular. Ce leader de la droite – qui aime à se présenter en symbole de la contestation – est ainsi parti rejoindre derrière les barreaux les dizaines d’étudiants interpellés depuis le début de la manifestation.

Sortant pour la première fois de sa réserve, le président américain Barack Obama a condamné « la violence inacceptable » sur le terrain et enjoint son homologue vénézuélien de libérer tous les opposants. Pas sûr que Nicolás Maduro, qui ne cesse de vilipender l’ingérence des Etats-Unis dans les affaires de son pays, accède aux demandes de Washington. Il a, d’ailleurs, menacé d’expulser les reporters de CNN, coupables à ses yeux de désinformation en évoquant une «guerre civile». La chaîne d’information en continu n’est d’ailleurs pas la seule à subir les foudres présidentielles et d’autres médias importants auraient fait l’objet de tentatives d’intimidation de la part d’un pouvoir manifestement fébrile.


Le rôle crucial des réseaux sociaux face aux tentatives de contrôle de l’information

Car, au jeu de la communication, il semble que le régime chaviste – d’ordinaire roué quand il s’agit de susciter l’adhésion populaire et la mettre en scène – perd imperceptiblement du terrain. Nombreux sont les reporters sur place, à l’instar de la journaliste vénézuelienne Mariana Atencio, qui insiste notamment sur le rôle crucial des réseaux sociaux dans l’organisation de la contestation. Réseaux sociaux où, en premier, une émotion vive s’est exprimée lorsqu’une jeune reine de beauté, venue simplement manifester avec d’autres amis étudiants, a été froidement abattue…



Mariana Atencio, en direct de Caracas pour la chaîne Fusion après la mort de Génesis Carmona