Laura Chinchilla, nouvelle présidente du Costa Rica

Publié le Jeudi 11 Février 2010
Laura Chinchilla, nouvelle présidente du Costa Rica
Laura Chinchilla, nouvelle présidente du Costa Rica
47% des suffrages auront suffi à Laura Chinchilla pour se hisser en un seul tour de scrutin à la tête du Costa Rica. Son slogan de campagne « Laura, ferme et honnête » ayant bien convaincu, la première femme présidente du pays affiche sa poigne et son déterminisme
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Politologue aguerrie et fille d’un puissant ancien inspecteur des finances, Laura Chinchilla a baigné dès l’aube de son adolescence dans la vie publique. Diplômée de la célèbre université de Georgetown (USA), elle fait dès l’âge de 34 ans, une entrée très remarquée au sein du gouvernement de José Maria Figueres en tant que vice-ministre de la sécurité publique. Députée de 2002 à 2006, elle occupe ensuite la vice-présidence d’Oscar Arias. Un itinéraire habilement jalonné qui ne pouvait mener qu’à un triomphe électoral aux présidentielles de 2010. « Elle était présumée favorite car elle avait le soutien du président sortant (cf. Oscar Arias). Qui, lui, a justement toujours bénéficié d’une grande popularité auprès du peuple grâce à son prix Nobel de la paix en 1987, obtenu pour sa participation au processus de paix au Salvador en 1986 » explique Paola Orozco-Souël, notre experte de l’Amérique latine et centrale. 
 

Conservatrice avant tout


Au même titre qu’Oscar Arias, Laura Chinchilla est affiliée au Parti de Libération Nationale (centre droite modéré), qui est lui-même membre de l’Internationale Socialiste. Et même si ce dernier arbore le slogan « politiques progressistes pour un monde plus juste », la nouvelle présidente n’en est pas moins attachée à ses valeurs conservatrices, directement liées à une pratique stricte du catholicisme. Elle se distingue à cet effet de son prédécesseur sur son opposition formelle à une séparation de l’Eglise et de l’Etat. Un point de vue que les européens peineront à concevoir, associant automatiquement les bases d’une démocratie à un Etat laïque. Et pourtant, le Costa Rica est bel et bien un berceau de démocratie. L’accès au pouvoir de Laura Chinchilla ne procédera pas non plus à l’avènement de nouveaux droits médicaux pour les femmes, elle reste « ferme et honnête » et ne fléchira pas sur ses convictions quant au refus de légaliser l’avortement et la pilule du lendemain.

Une campagne basée sur le social et la sécurité


A la juste mesure de sa foi, Laura Chinchilla a mené d’une main de fer sa campagne, osant s’aventurer à l’essence-même des troubles de la société costaricaine. « Le peuple attend les changements qu’elle a promis, notamment pour améliorer les conditions des femmes célibataires, des travailleuses, des immigrées nicaraguayennes en situation précaire. Le fait qu’elle soit une femme a largement légitimé son discours » rajoute Paola. Et même si elle prête une oreille attentive aux requêtes des syndicats et associations qui militent pour les doits des salariés, Laura Chinchilla n’en oublie pas pour autant les classes émergentes, partisans d’Arias, qui l’ont portée jusqu’au pouvoir. Pour l’heure, les deux grandes difficultés auxquelles elle doit se confronter sont l’ébauche d’un traité de libre-échange entre l’Amérique centrale et les Etats-Unis (traité pour l’instant catégoriquement refusé par les pays limitrophes) et l’insécurité. « Des slogans et des campagnes d’affichage ont été placardées pour la lutte contre la corruption et la criminalité, ce qui signifie qu’elle souhaite faire pression là- dessus. Elle compte à cet effet renforcer les budgets des polices locales et frontalières, car le Costa Rica n’a plus d’armée. En même temps il va falloir le faire d’une manière très diplomatique car le pays a une tradition démocratique très ancrée et la population risquerait de se sentir prise en étau » confie Paola Orozco-Souël.

Après le Nicaragua, Panama, le Chili et l’Argentine, le Costa Rica est le cinquième pays d’Amérique latine et centrale à déposer son pouvoir exécutif entre les mains d’une femme. « Je ne vous décevrai pas » a harangué confiante Laura Chinchilla à ses électeurs après la proclamation de sa victoire.  

Emilie Gardes

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