Frédéric Martel : "La révolution gay est très liée à la question des femmes"

Publié le Samedi 23 Février 2013
Frédéric Martel : "La révolution gay est très liée à la question des femmes"
Frédéric Martel : "La révolution gay est très liée à la question des femmes"
Dans « Global Gay », Frédéric Martel, journaliste à France Culture et historien, revient sur les grandes étapes de la révolution gay et observe la mondialisation de la question homosexuelle. Interview.
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Terrafemina : Quelles sont selon vous les trois grandes étapes de la révolution gay mondiale ?

Frédéric Martel : Je ne dirais pas qu'il y a eu trois étapes distinctes. Ce qui est vrai c'est qu'en Occident, il y a d’abord eu un mouvement plutôt de droite, plutôt discret, très lié aux églises et à la religion jusqu'en 1968. Ensuite, à partir de Stonewall, en 1969, il y a un mouvement gay radical, de type gay power, plutôt très à gauche, et très anti-religieux. On passe de la droite à la gauche, et de la discrétion aux revendications radicales, contre les « hétéros-flics » et le machisme. Ce second mouvement a été partout très lié à la question des femmes et le MLF contenait d'ailleurs un grand nombre de lesbiennes. Depuis les années 1980, à travers la lutte contre le sida, la lutte en faveur des unions civiles (le PACS en France par exemple) et le mariage pour tous on a une forme de socialisation, de demande d'égalité des droits. Mais dans d'autres pays, ces trois étapes n'ont pas été forcément suivies, ni dans cet ordre. En Chine, en Inde, à Singapour, en Indonésie, en Amérique latine, en Europe de l'Est, les histoires sont très différentes.

Tf : On a parfois l’impression que les lesbiennes sont sous-représentées dans les médias, alors qu’elles ont pris une part active à la lutte pour les droits des homosexuels…

F.M. : Dans mon livre, il y a des portraits très détaillés de lesbiennes : à Cuba, en Arabie saoudite, en Algérie, aux États-Unis. Je les ai traitées comme les homosexuels masculins. C'est d’ailleurs une avocate lesbienne, Mary Bonauto, qui a permis le débat du mariage pour tous aux États-Unis

Tf : En France, le vote du mariage pour tous est-il une de ces étapes cruciales que vous évoquez plus haut ? Comment l’interprétez-vous ?

F.M. : Il s'agit clairement d'une étape cruciale, de la fin d'un processus commencé par la revendication de droits dans les années 1970. Il ne s'agit pas d'une demande de différence, ni d'un quelconque communautarisme : il s'agit d'une demande d'égalité, stricte, complète, définitive. En cela, c'est un combat très juste. 

Tf : Vous avez enquêté aux quatre coins du monde pour observer la mondialisation de la question gay. Comment expliquer que certaines villes, certains quartiers soient plus « gay friendly » que d’autres ?

F.M. : La réponse à cette question nécessite tout un livre ! C'est en effet l'un des sujets que je traite. Je dirais simplement, banalement même, que la question des villes, des quartiers et des bars ne peut pas être déconnectée de l'état des lois et de la tolérance à l'égard des homosexuels dans chaque pays.  

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