Qu'est-ce que l'endométriose ?

Publié le Vendredi 01 Juin 2012
Qu'est-ce que l'endométriose ?
Qu'est-ce que l'endométriose ?
Identifiée par la médecine voilà plus d'un siècle, l'endométriose est encore méconnue du grand public. Alors qu'une femme sur dix au moins en serait atteinte, le diagnostic souvent tardif entraîne une intensification des douleurs, des complications, et notamment des troubles de la fertilité. Quels sont les signaux d'alerte ? Le dépistage est-il au point ?
À lire aussi


Au début des années 2000, quelques Françaises font connaissance sur un forum canadien. Sujet de la discussion : l’endométriose. Le mot n’est pas courant, et Delphine a l’impression de faire partie d’une poignée de femmes atteintes d’une maladie rare. Pour remédier au manque d’information en langue française, elle crée une association –EndoFrance- et rassemble la documentation scientifique ; c’est là qu’elle découvre que ce phénomène touche une femme sur dix. Pour Patrick Madelenat, professeur en gynécologie obstétrique et grand spécialiste de la question, ce sont même 15 à 30% des femmes en âge de procréer qui présenteraient des « lésions endométriosiques », parfois sans le savoir et sans en souffrir.

Qu’est-ce que l’endométriose ?

Selon la définition de l'endométriose du Pr. Madelenat, elle se caractérise par la « présence en dehors de la cavité utérine de cellules de l’endomètre ». Cette muqueuse qui tapisse l’intérieur de l’utérus, et qui se renouvelle chaque mois pour accueillir un éventuel fœtus, « se multiplie alors qu’elle devrait s’éliminer », et se retrouve là où elle ne devrait pas. Ces cellules importunes colonisent les tissus et les organes provoquant des dommages plus ou moins gênants : trompes, ovaires ou reins voire même diaphragme. « La gravité de l’affection dépend de l’endroit où se localise l’endométriose », précise le Dr. Christine Vahdat, gynécologue en région parisienne. Précisément, sur les organes de reproduction, elle constitue un facteur d’infertilité important, puisque 30 à 50% des femmes infertiles présentent des lésions d’endométriose. « Néanmoins, il existe de nombreux cas pour lesquels l’endométriose n’a aucune conséquence sur la fertilité », nuance le Dr. Vahdat, qui ajoute que « ce n’est pas un diagnostic dramatique, sauf dans des formes très rares et graves où l’endomètre a envahi plusieurs organes. »

Premier symptôme : la douleur

« On ne cherche pas à guérir de l’endométriose, mais à vivre avec », explique Delphine, qui à 44 ans, vit avec des douleurs chroniques depuis son adolescence. « C’est une maladie dont les signes peuvent être très précoces », explique le Pr. Madelenat, « il s’agit de jeunes filles qui ont des règles très douloureuses, non seulement pendant la période de règles, mais aussi avant ou après ». D’où le problème de détection de cette pathologie : pas évident de distinguer la douleur physiologique due au travail de l’utérus qui élimine l’endomètre, d’une douleur pathologique liée à l’endométriose. Pour remédier à cette difficulté, la plupart des praticiens comptent sur la pilule contraceptive, censée éliminer les douleurs de règles. Si malgré la pilule les douleurs persistent, une échographie voire une IRM de contrôle peuvent être prescrites. Pour autant, la pilule a bien souvent pour effet pervers de rassurer et d’endormir le problème, qui se réveille le jour où la femme arrête sa contraception pour faire un enfant. « La pilule représente plutôt un obstacle au diagnostic », précise Delphine, qui cite une étude du Pr. Chapron prouvant que la prise de la pilule pour soulager les douleurs de règles sévères des adolescentes, augmente « les chances de ces jeunes filles de présenter au bout de quelques mois une endométriose très sévère ». Elle préconise une meilleure prise en considération de la douleur des jeunes filles, avec un véritable examen de l’origine de cette douleur, afin de détecter le mal au plus tôt.

utérus endométriose

Diagnostic tardif et hasardeux

Le diagnostic, voilà le nerf du problème, et du malaise : cette maladie souffre d’un retard de diagnostic compris en moyenne entre 6 et 10 ans, « une période durant laquelle la maladie a le temps de causer des dommages notables à différents organes », peut-on lire sur le site EndoFrance.com. Pour la présidente de l’association, le bât blesse au niveau de la formation et de l’information des médecins. Et pour preuve, « quand on leur pose la question, seulement 5,1% des médecins pensent que l'endométriose peut survenir à n'importe quel âge ! » Un chiffre inquiétant, puisque le mécanisme peut survenir à n’importe quel âge à partir du moment où une femme a ses règles. Parmi les symptômes identifiés, outre les douleurs, il peut y avoir des saignements abondants, pendant et/ou en dehors des règles, et un faisceau de symptômes qui se manifestent uniquement pendant la période des règles : « il n’est pas normal de vomir ou de ne pas pouvoir se lever à cause de la douleur quand on a ses règles », note le Pr. Madelenat, qui ajoute que, malheureusement, « il n’existe pas de frottis qui pourrait permettre de dépister facilement l’endométriose ».

Traitements

Pour le spécialiste, la bonne approche face à cette maladie repose sur « la reconnaissance des symptômes par l’interrogatoire, avant de compléter s’il y a lieu par une coelioscopie ». D’où l’impérieuse nécessité de mieux éduquer les médecins, -gynécos, généralistes mais aussi gastroentérologues et urologues- afin d’éviter les retards de diagnostics. Quant au traitement, il ne s’attaquera jamais à la maladie en soi mais à ses conséquences, puisque le phénomène peut récidiver indéfiniment. Pour traiter les problèmes de fertilité, on se tournera vers les techniques d’AMP –Assistance médicale à la procréation. Pour traiter les douleurs, aigües et handicapantes pour certaines femmes, les antidouleurs font rarement l’affaire. Une opération s’impose souvent pour retirer les lésions, mais « il est important de choisir un chirurgien qui connaît la maladie », avertit le Pr. Madelenat, « il est censé faire un bilan complet des lésions et une intervention aussi complète que possible du premier coup ». La répétition des chirurgies entraîne plus de douleurs et des pertes de fertilité, confirme Delphine. « Juste après cette première chirurgie, qui est cruciale, la femme doit être placée sous pilule en continu pour stopper les règles, elle gardera ainsi tous les bénéfices de l’opération ». En cas de désir de grossesse, elle arrêtera sa pilule au dernier moment. Pour être tout à fait tranquille, une femme qui est atteinte d’endométriose pourra se mettre en situation de ménopause en se faisant retirer les ovaires, mais seulement lorsqu’elle ne voudra plus concevoir d’enfants...

En attendant, l’association EndoFrance se démène pour que l’endométriose ne soit plus une inconnue en France. Depuis 2005, elle demande en vain au gouvernement de lancer une campagne de sensibilisation et de prévention sur la douleur des règles. Mot d’ordre : « Il ne faut pas banaliser la douleur des règles ».

Plus d’infos sur le site EndoFrance et sur le site du Congrès mondial sur l'endométriose

L’association EndoFrance organise les restitutions en Français du Congrès mondial sur l’endométriose qui s’est tenu en septembre 2011 à Montpellier. Conférence le 2 juin 2012 à Lille et à Montpellier. Autres dates sur la page Facebook EndoFrance.

Crédit photo : Goodshoot

VOIR AUSSI

Avoir un enfant : le parcours du combattant…
Le poids de l’inconscient dans les troubles de la fécondité
Contraception : le stérilet et l'implant plus efficaces que la pilule
Sept IVG sur dix dues à un accident de contraception
Cancer du col de l'utérus : le Gardasil est-il dangereux pour la santé ?

Dans l'actu