Cannes 2010 : La Tournée glamour de Mathieu Amalric

Publié le Vendredi 14 Mai 2010
Cannes 2010 : La Tournée glamour de Mathieu Amalric
Cannes 2010 : La Tournée glamour de Mathieu Amalric
Dans cette photo : Mathieu Amalric
Elles ont décoincé le tapis rouge dés le deuxième jour du festival de Cannes. Les danseuses burlesques, star du film « Tournée » de Mathieu Amalric en compétition officielle, ont conquis notre critique, envoyé spécial à Cannes…
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Assurément, depuis le début du Festival, les “femmes du jour” ce sont elles. Des Américaines dont personne ne connaît le nom – d’ailleurs improbable, jugez plutôt : Dirty Martini, Mimi Le Meaux, Kitten on the Keys, Evie Lovelle, Julie Atlas Muz ! Des femmes à des années lumière des canons de beauté des pages glacées des magazines, aux formes aussi généreuses que leurs sentiments et leurs comportements. Des stripteaseuses singulières qui se révèlent être des actrices formidables, exceptionnelles même, à la fois délicieusement excessives et profondément humaines. Ce sont les héroïnes du premier film français de la compétition, “Tournée”, de Mathieu Amalric.

En s’inspirant de Colette décrivant en son temps l’envers du music hall, Amalric raconte une tournée, sous la houlette d’un producteur un rien has-been (qu’il interprète lui-même avec délectation), d’une troupe de filles du New Burlesque, ce mouvement qui réinterprète un genre profondément enraciné dans la tradition du music hall anglo-saxon et qui mêle au strip-tease aussi bien le glamour et l’humour que la revendication et la satire sociale. En chemin, et c’est la belle réussite du film, le réalisateur-comédien réinvente quelque chose de rare : la mélancolie joyeuse ! Et bien évidemment, cette impression de légèreté et de profondeur mêlées que laisse Tournée doit beaucoup, sinon tout, à ces filles incroyables.

Personnages excentriques, extravagants et flamboyants, que Fellini aurait adorés, elles jouent à la fois leur vie et la fiction que veut raconter Amalric sans que l’on sache parfois où s’arrête l’une et où commence l’autre. Elles le font avec un sens du spectacle épatant, avec une sensualité irrésistible et drôle, avec un goût de l’excès et de la provocation plein de santé, où il est difficile de ne pas voir une affirmation intime et politique de leur liberté. Et où on devine bien sûr de quelles blessures, de quelles fêlures, de quelle solitude, il est le fruit. Leur jubilation audacieuse à se donner en spectacle n’en est que plus contagieuse. En attendant sa sortie en salles le 30 juin, c’est trop tôt pour faire des paris mais le jury de Tim Burton a déjà trouvé là un prix d’interprétation féminine collectif évident. Et on peut parier, vu la montée des marches de jeudi soir, que la réception du prix par Dirty Martini et ses copines resterait dans les annales du Festival !

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