Marie-Rose Moro, la psychiatre qui aide nos enfants

Publié le Vendredi 26 Février 2010
Marie-Rose Moro, la psychiatre qui aide nos enfants
Marie-Rose Moro, la psychiatre qui aide nos enfants
Depuis plus de 20 ans, Marie-Rose Moro se consacre à sa passion, les enfants.  Psychiatre pour enfants et adolescents, elle  dirige aussi la Maison des Adolescents à Paris. Elle nous raconte son engagement de toujours en faveur des enfants de migrants et de tous les autres…
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En 2006, Marie-Rose Moro succède au très médiatique Marcel Rufo  à la tête de la « Maison de Solenn », qui accueille les adolescents en souffrance.  Elle reçoit en consultation des jeunes en difficulté, qui ont le plus souvent des  troubles du comportement alimentaire.  Elle  tente de répondre à leurs besoins et soutient les familles.

Marie-Rose Moro se consacre aux enfants depuis toujours et plus particulièrement aux enfants de migrants. Pour eux, elle a créé des consultations transculturelles, uniques en France. Son intérêt pour ces enfants, qui cristallisent les nombreux traumatismes de l’enfance, n’est surement pas étranger à son histoire personnelle. Marie-Rose Moro est fille de migrants espagnols qui se sont installés dans les Ardennes. Elle est arrivée en France à moins d’un an «  Mon père est venu en France avec l’idée que ses enfants seraient docteurs » dit-elle en souriant.  Elle ne le décevra pas  et obtiendra son diplôme de médecin à Nancy tout en poursuivant des études de philosophie. Pour réunir ses deux passions, la psychanalyse et la philosophie, elle se tournera naturellement vers la psychiatrie. 

Quand elle arrive à Paris après ses études de médecine, c’est pour travailler auprès du spécialiste de la petite enfance, le psychiatre  Serge Lebovici. « Son enseignement m’a beaucoup  marqué », dit-elle. Lorsqu’elle commence en tant que psychiatre, elle est immédiatement frappée par la situation des enfants de migrants : ces enfants qui sont nés en France mais dont les parents ont émigré.  «  Je me suis rendu compte qu’il fallait  s’occuper d’eux, les aider à construire leur identité », explique -telle.  Elle remarque à quel point ces enfants sont victimes de discriminations.   Les représentations des uns, les préjugés des autres,  professeurs ou médecins la choquent. «  Moi-même, en grandissant, j’avais ressenti que ce n’était pas pareil, qu’on me traitait différemment des autres », ajoute-t-elle. Mais elle confie aussi la chance qu’elle a eue « de rencontrer des personnes qui n’abrasent pas les différences ».

Elle se lance alors dans une pratique engagée de la psychiatrie en s’appuyant sur les travaux  de l’ethnopsychiatre Tobie Nathan.  Elle crée des consultations transculturelles qu’elle anime toujours. Lors de ces entretiens, ce sont souvent les mêmes problèmes qui reviennent. « Les parents de migrants renoncent à transmettre leur culture, leur tradition. Cela ne fait pas de bien aux enfants car ils perçoivent leur origine de manière très floue. Ils ont même parfois honte de leur langue maternelle. A l’adolescence, il arrive qu’ils s’opposent à leurs parents.» La transmission est un exercice très difficile, la psychiatre en est consciente. Il faut un juste équilibre, mais c’est avant tout une affaire parentale. 

Dans son livre elle revient sur ces familles qu’elle croise : leurs  difficultés, les cicatrices, l’incompréhension, le « traumatisme migratoire » qu’ils vivent, mais aussi leurs rêves et leurs espoirs pour s’intégrer.
La méthode de Marie Rose Moro est un succès, les demandes pour ses consultations sont très  nombreuses et mobilisent de vraies équipes aujourd’hui. C’est à l’école qu’elle veut que les choses changent, afin que l’on considère ces enfants comme les autres et que leurs origines soient valorisées. « L’échec scolaire précoce est fatal pour eux.  En France, on ne vous donne pas de 2ème chance », déplore-t-elle.

Mais il n’y a pas qu’eux et la psychiatre entend aussi s’occuper des enfants de couples mixtes, issus de familles monoparentales ou encore adoptés, qui  sont dans les mêmes logiques que les enfants de migrants, car ils doivent surmonter leurs différences. « Ces enfants sont profondément modernes. Ils se construisent avec des logiques différentes et apprennent la complexité identitaire » observe Marie-Rose Moro. 

Avec ces résultats individuels, elle a le sentiment de faire  avancer les choses même si elle ne cache pas être touchée et parfois révoltée par ce qu’elle voit : «  il y des combats qu’on perd, c’est le travail du thérapeute de composer avec. » Et, tous les jours, elle apprend de ces adolescents ou enfants qu’elle croise et qui reflètent à eux seuls les maux de notre époque.


Marie-Rose Moro a publié Nos enfants de demain, pour une société multiculturelle aux éditions Odile Jacob


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