Journée internationale du hijab : "Avant de juger, essaie de te couvrir pour une journée"

Publié le Lundi 02 Février 2015
Antoine Lagadec
Par Antoine Lagadec Journaliste
Journée internationale du hijab : "Avant de juger, essaie de te couvrir pour une journée"
Journée internationale du hijab : "Avant de juger, essaie de te couvrir pour une journée"
Dimanche 1er février se tenait la 3e édition du World Hijab Day. Depuis 2013, la journée internationale du hijab tente de sensibiliser le monde entier à la signification du voile porté par les femmes musulmanes. Discret pendant deux ans, l'évènement commence à prendre une ampleur significative, sur fond de tolérance religieuse.
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« Avant de juger, essaie de te couvrir pour une journée ». Voici ce que l'on peut lire en arrivant sur WorldHijabDay.com, site officiel du mouvement lancé début 2013. Voila trois ans que des musulmanes américaines ont décidé de lancer la journée mondiale du hijab. Son principe : inviter toutes les femmes du monde, mulsmanes ou non, à se mettre dans la peau d'une femme voilée le temps d'une journée et réfléchir à cette question : « Le hijab est-il oppressant ou libérateur ? ».

Logo World Hijab DayLa fondatrice du mouvement Nazma Khan voit dans cette journée, fixée au 1er février, un moyen de répondre à un triple objectif : sensibiliser le monde à la question du voile, mieux comprendre sa signification et en faire un symbole de paix. Selon cette activiste socialiste, qui a grandi au Bangladesh avant de déménager à New York à l'âge de 11 ans, le World Hijab Day est une manière de reconnaître les millions de femmes musulmanes qui ont choisi de porter le voile et d'encourager celles-ci à expliquer leur choix. Pour l'occasion, une affiche traduite en 56 langues différentes a été créée, tandis que plusieurs ambassadeurs ont été nommés dans plusieurs dizaines de pays.

Affiche

Slogan français




Alors que de nombreux préjugés sont encore associés au hijab, l'événement tente de prendre le contre-pied d'un discours centré sur la peur et la méconnaissance du signe religieux. En organisant chaque année ce rassemblement dans le monde entier et sur Internet, Nazma Khan souhaite initier une culture du dialogue, entre des femmes issues de cultures variées.

L'initiative n'est pourtant pas nouvelle. En 2004 déjà, un collectif britannique pro-hijab avait plaidé en faveur d'une journée mondiale dédiée à la question, en réaction à la loi sur les signes religieux dans les écoles publiques adoptée en France cette même année. La proposition, qui fixait la date au 4 septembre, avait reçu le soutien de l'ancien maire de Londres, Ken Livingston.

Très actif sur la toile, le collectif World Hijab Day mise sur les réseaux sociaux pour diffuser son message. Dimanche 1er février, de nombreuses femmes à travers le monde ont publié des photos en utilisant le hashtag #WorldHijabDay.

En France, où plusieurs dizaines de femmes ont revêtu le voile ce 1er février comme ici à Lyon, l'évènement a pris cette année une tournure particulière en raison des attentats commis le 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo. Selon un bilan diffusé par le Conseil Français du Culte Musulman, pas moins de 128 actes anti-musulmans ont déjà été recensés par le ministère de l'intérieur dans les 12 jours qui ont suivi l'attentat, soit plus que sur l'ensemble de l'année 2014.


Malgré son succès, l'initiative suscite également une vague de critiques. Certains observateurs avancent notamment le fait que l'événement propose une vision tronquée du hijab, en incitant chacun à l'appréhender comme un costume qui peut être porté ou enlevé à sa guise, sans considération religieuse. Au point que des initiatives opposées ont vu le jour, comme cette
« journée sans voile », défendue par un groupe au Québec.

Ce dernier propose ainsi « que soit portée une marguerite, par solidarité pour toutes les femmes dans le monde qui n’ont pas le droit, ou qui croient ne pas l’avoir, de laisser flotter leurs cheveux au vent. Pour toutes les femmes qui sont soumises à des diktats sexistes, que ce soit par l’éducation, par la pression de leur famille, de leur communauté ou de leur pays, par des lois religieuses, ou simplement par une conviction nourrie insidieusement par quelque mécanisme de ségrégation sexuelle que ce soit ». Peu suivie jusqu'à présent, la proposition démontre une fois encore que le droit des musulmans à vivre leur foi en paix a encore un long chemin à parcourir.