Marine Le Pen : pourquoi décroche-t-elle dans les sondages ?

Publié le Mercredi 15 Janvier 2014
Xavier Colas
Par Xavier Colas Journaliste
Marine Le Pen : pourquoi décroche-t-elle dans les sondages ?
Marine Le Pen : pourquoi décroche-t-elle dans les sondages ?
Marine Le Pen enregistre, en janvier, une nouvelle baisse significative de sa cote de popularité (27 % d'opinions favorables, selon OpinionWay, soit 5 points de moins qu'en décembre). A deux mois des municipales, l'affaire Dieudonné et les propos racistes d'une ex-tête de liste FN dans les Ardennes contre Christiane Taubira, peuvent en partie expliquer cette baisse, selon le chercheur à l'IRIS, spécialiste de l'extrême droite, Jean-Yves Camus. Décryptage.
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Moins cinq points, par rapport à décembre, dans le baromètre réalisé par OpinionWay pour Metronews, lundi 13 janvier. Avec 27% d'opinions favorables, Marine Le Pen retombe à son plus bas niveau depuis un an. Même constat avec le dernier sondage de TNS Sofres qui montre que la présidente du FN perd également cinq points (25 %) et quatre chez Ipsos (29%). « La popularité, c'est très variable », fait valoir Florian Philippot. Et le vice-président du parti frontiste d'imputer cette perte de popularité au « peu d'exposition médiatique » dont aurait bénéficié Marine Le Pen au mois de décembre.

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Quand l'affaire Dieudonné plombe la stratégie de dédiabolisation

Si Florian Philippot dément tout « trou d'air », à deux mois des élections municipales, il n'en demeure pas moins que cette baisse d'opinions favorables est une constante ces derniers mois pour la leader frontiste. Une tendance que Jean-Yves Camus, chercheur à l'IRIS spécialiste de l'extrême droite, impute, notamment, à l'affaire Dieudonné. « Les électeurs FN post-2011 veulent un parti normalisé et dédiabolisé ayant rompu avec un certain nombre d'outrances de l'ère Jean-Marie Le Pen. Ils ne veulent plus de ce genre de saillies et de discours, dont Marine Le Pen veut précisément se débarrasser, du moins c'est ce qu'elle dit », indique-t-il.


Or, selon le chercheur, « les déclarations d'un certain nombre de dirigeants du FN sur Dieudonné n'ont pas contribué à rassurer ces électeurs ». Jean-Yves Camus pointe notamment les propos de Florian Philippot qui avait qualifié Manuel Valls de « comique » et trouvait « très dangereux » d'interdire les spectacles de Dieudonné au risque de créer un lien dans l'esprit des électeurs entre l'humoriste-polémiste et le parti. Si Marine Le Pen a tenté de se démarquer de la polémique en évoquant une instrumentalisation de l'affaire par le gouvernement contre le FN, sa réaction a été « trop tardive et pas assez forte » pour Jean-Yves Camus.


Dévissage ou fluctuation ?

Même constat pour Bruno Jeanbart, directeur associé d'Opinion Way. « Les débats sur les propos extrêmes, sur l'antisémitisme, ont pu réactiver dans une partie de l'électorat l'idée que le FN est un parti qui a aussi des excès », explique-t-il dans les colonnes de Libération. Les déclarations chocs de certaines têtes de liste FN aux municipales, notamment sur Christiane Taubira, semblent avoir quelque peu plombé la popularité de l'ancienne candidate à la présidentielle. Pour Florian Philippot, le FN a au contraire « démontré qu'il savait réagir vite, contrairement à d'autres partis confrontés au même problème », en excluant l'ex-tête de liste FN à Rethel (Ardennes) qui avait comparé la Garde des Sceaux à un singe.


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Les municipales, c'est d'ailleurs l'objectif du vice-président du FN. « Si nos adversaires se leurrent en croyant à une baisse, tant mieux. Ils auront la surprise du siècle dans les urnes en mars », prédit le cacique du parti frontiste qui évoque des retours de terrain « excellents » et mise sur la tournée qu'entamera Marine Le Pen en fin de semaine pour « diffuser le projet et les idées du FN » en vue des municipales des 23 et 30 mars. Et le candidat à Forbach d'évoquer un nombre de listes FN « historiquement élevé ».


Une analyse que tempère Jean-Yves Camus. « Les prévisions sont à revoir à la baisse. De plus de 600 listes annoncées par le Front en octobre, le parti n'en revendique maintenant plus que 500. En réalité, je pense que le FN devrait tourner entre 400 et 500 listes. Dans bon nombre de villes, les électeurs ne pourront pas voter pour un candidat FN », précise-t-il.


Philippot : « être le premier parti de France aux européennes »

En revanche, aux européennes du mois de mai, le FN disposera d'une liste par circonscription électorale. « Ce scrutin sera véritablement significatif », selon Jean-Yves Camus. En attendant, le chercheur appelle à la prudence quant aux fluctuations de la cote de popularité de Marine Le Pen. « Par le passé, y compris dans les années 1990, à chaque fois que le Front a baissé en popularité à cause d'un événement lié au racisme et à l'antisémitisme, on a constaté que durant une période, assez variable, les intentions de vote baissaient avant de revenir à leur niveau antérieur », témoigne-t-il. Pour lui,  « il convient dorénavant d'observer s'il s'agit d'un dévissage qui va aller en s'accentuant ou si ça n'est qu'un accident lié aux affaires Dieudonné et Taubira ».

Le rendez-vous des européennes sera donc primordial pour le FN, un scrutin au cours duquel le parti d'extrême droite a pour ambition d'être « le premier parti de France », comme le martèle Florian Philippot.