Dépression post-natale : la détresse des mères

Publié le Mardi 27 Septembre 2011
Dépression post-natale : la détresse des mères
Dépression post-natale : la détresse des mères
Sujet encore tabou et touchant pourtant de nombreuses mères, la dépression post-natale plonge les jeunes mamans dans le désarroi. Cette période de souffrance et d’angoisse reste difficile à aborder aussi bien pour les femmes dans le déni que pour leur entourage désemparé. L'association Maman Blues, fondée par Nadège Beauvois, s'emploie à sensibiliser les mères et à les accompagner dans ces moments douloureux. Entretien.
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Terrafemina : Quelles formes peut prendre le mal-être d'une mère ?

Nadège Beauvois : Il y a différents stades. Le baby blues d’abord, qui est plus ou moins un mal-être passager qui survient après l’accouchement. Il se traduit souvent par une hypersensibilité, des insomnies et des anxiétés. Si les symptômes se prolongent, alors on peut penser à une difficulté maternelle. Elle est plus diffuse qu’une dépression : la maman peut ressentir un malaise au quotidien face à son bébé, établir une distance par rapport à son enfant. Dans ce cas, la rencontre avec le bébé n'a pas pris, mais cela ne se traduit pas nécessairement par une dépression. La dépression, quant à elle, est le résultat d'une difficulté maternelle qui s’est aggravée sans que la mère ni l’entourage ne s’en aperçoivent. La maman est alors accablée par un sentiment de gêne par rapport à son bébé et elle ressent une très grande souffrance. Mais il est dur pour une jeune mère qui découvre la maternité de réaliser que son état n’est pas un passage obligatoire.

TF : Comment diagnostiquer une difficulté maternelle ?

N.B. : J'ai l'habitude de dire qu’une future mère avertie en vaut deux. Beaucoup de femmes ont déjà entendu parler de baby blues et de dépression post-natale, mais cela reste souvent pour elles des notions floues, dont elles ne reconnaissent pas les effets. Nous insistons sur le décryptage d’un ensemble de petits signes qui peuvent alerter les mamans et leur entourage. D’abord les troubles du sommeil, qui sont un symptôme majeur : les femmes qui sont sur le chemin d'une difficulté maternelle ont du mal à dormir et développent une forme d'hyper vigilance autour de leur bébé. À cela s’ajoute un sentiment de tristesse latent et une inquiétude exacerbée. La mère a des difficultés à comprendre le bébé, et développe également un sentiment de culpabilité. Elle est envahie par une angoisse sourde et le sentiment de ne pas être à la hauteur. Et puis elle ne ressent pas d'amour absolu pour son bébé car les autres sentiments négatifs prennent le dessus.

TF : Comment s'en sortir ?

N.B. : Je conseille toujours aux futurs parents de bien s'informer au moment de la grossesse et de sensibiliser également leur entourage, que ce soit la famille ou le corps médical qui les accompagne. Il est aussi conseillé de se tourner vers quelques lectures utiles sur le sujet, et vers certaines adresses qui peuvent apporter une aide précieuse, comme les unités mère-enfant (UME) ou la protection maternelle infantile (PMI). La prévention face à ce sujet est essentielle, car après l’accouchement, il est difficile pour une femme dans une position de difficulté maternelle d'avoir le recul suffisant pour faire ces démarches. Dans tous les cas, il est également recommandé après la naissance du bébé de rencontrer un psychologue et de se rendre à des rendez-vous mère-enfant à la maternité.

TF : Est-ce encore un sujet tabou pour les femmes ?

N.B. : Il est très difficile pour les femmes concernées d’évoquer leur mal-être. Elles sont dans un état trouble et confus, à la fois paralysées et en permanence sur le qui-vive. De plus, une grande partie des mamans trouve encore la force de faire semblant. Par ailleurs, le sujet reste un vrai tabou dans notre société. Les femmes ont honte de ce qu'elles ressentent par rapport à leur bébé et cela est souvent vécu comme un échec personnel. Il s'agit d'une douleur très intime : j'ai voulu un enfant, je l'ai désiré, je lui ai donné la vie et je ne suis pas capable d'en profiter.

TF : On parle souvent d'instinct maternel. Ces mamans en difficulté en sont-elles dépourvues ?

N.B. : On donne en effet souvent comme conseil aux femmes de se faire confiance, de suivre leur instinct. C'est à la fois un bon et un mauvais conseil. Les femmes ont certes, en elles, des ressources, mais celles-ci ne sont pas toujours suffisantes pour affronter le grand bouleversement physique et psychique qu'est un accouchement. Une femme ne doit pas être laissée seule face à sa maternité, l'idée n'est pas de s'en sortir seule, il ne faut pas faire croire aux femmes qu'elles ont réponse à tout et que tout vient d'elles ! Il faut leur en donner les moyens, les informer, les accompagner, les soutenir.

Crédit photo : Brand X Pictures

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