La dernière fois qu'on a accordé quelques heures de notre temps à la lubie pour le développement personnel/empire de Gwyneth Paltrow, le bilan en est ressorti plus que mitigé.
C'était en 2020, et l'actrice et gourou californienne de l'optimisation - ce concept qui pousse chacun·e à toujours devenir la meilleure version de soi-même quitte à virer mégalo - explorait les différents rituels de "bien-être" autour du globe dans The Goop Lab diffusé sur Netflix.
Baignades à poil dans l'eau glacée en hurlant, psychothérapie sous psychotrope en Jamaïque, exorcismes énergétiques... autant d'expériences qui déclenchaient des vagues incontrôlées de soupirs agacés de notre côté de l'écran (quand elles ne provoquaient pas l'ire du chef de la Sécu britannique pour "désinformation").
Lorsque Sex, Love & Goop a été annoncé, on a logiquement levé nos yeux au ciel en imaginant tout ce qui pourrait foirer avec cette nouvelle saison. On imaginait typiquement que le show regorgerait d'injonctions à la sexualité fréquente et à la performance, de dialogues calqués sur des citations bidons qui font fureur sur les réseaux sociaux, de techniques de "pro du sexe" qui s'avéreraient, une fois n'est pas coutume, complètement infondées à écouter des expert·e·s reconnu·e·s. Et on en passe.
Quelle ne fut pas notre surprise, donc, quand au bout de quelques minutes du premier épisode, on a réalisé qu'on avait - en grande partie - tort. Et voici pourquoi.
Le principe de cette nouvelle série est similaire au premier jet, la pertinence des propos en plus. Dans un salon couleur pastel, ses pieds chaussés de talons de dix lovés sur le canapé, Gwyneth Paltrow reçoit plusieurs couples en mal d'alchimie au lit. Des jeunes, des vieux, des hétéros, des lesbiennes. Déjà, la diversité du panel annonce que des sujets importants et généralement passés sous silence seront abordés, premier bon point.
Suite à une discussion de groupe à coeur ouvert, chacun passe à la pratique, personnalisée selon sa problématique. Décalage de libido, insatisfaction sexuelle féminine, déconnexion de son statut d'amant·e·s après des années à endosser le rôle de parents, impossibilité d'exprimer ses envies... Difficile de ne pas se reconnaître dans au moins l'un des angles que prennent ces consultations non-conventionnelles. Voire d'éprouver le besoin, à son tour, de prendre le taureau par les cornes.
Ce que prônent les intervenant·e·s recruté·e·s par Goop est d'ailleurs plutôt bénéfique : insister sur l'importance du dialogue et de la bienveillance au coeur de la sexualité. Ne pas juger, prendre conscience que son·sa partenaire a des attentes propres, travailler à trouver une dynamique qui nous convienne, ne pas avoir peur de se dire les choses et encore moins, de se remettre en question. D'accord, ça sonne un peu citations bidons. Mais peut-être que ce n'est pas si mal, au fond ?
Autre passage qui nous convainc que la série n'est pas complètement à jeter (au minimum) : la façon dont elle traite le rapport de deux femmes à leur corps. A l'aide d'exercices, on en convient, pas franchement révolutionnaires (William Carnimolla le faisait déjà dans Belle toute nue sur M6 en 2009) mais visiblement efficaces, Sex, Love & Goop souligne le lien indéfectible entre l'appréciation que l'on se porte à soi et notre capacité à jouir avec l'autre.
Et de célébrer par la même occasion toutes les silhouettes, comme la puissance des femmes. On prend.
Bon, certes, il y a toujours des séquences risibles façon hippie CSP+ à la recherche de frissons ésotériques (et érotiques), et une ambiguïté discutable quant à la légitimité de certain·e·s intervenant·e·s ainsi qu'aux effets concrets de telles sessions sur la durée. Des détails que Vincent Quesnel, sexologue clinicien et psychothérapeute, critique notamment dans un article pour le média canadien La Presse.
"D'un côté, on nous annonce que ce qui nous est présenté est du spectacle, et de l'autre, on nous fait croire que ce sont de réels professionnels de la santé sexuelle. Il y a un double discours dont le public doit être informé", épingle-t-il. De plus, "ces ateliers pratico-pratiques n'ont jamais démontré un changement réel et profond sur le long terme dans l'intimité des couples". A prendre avec des pincettes, donc.
Seulement, si on se place de notre point de vue de concernée par ces défis relationnels, force est de constater que le visionnage encourage à la communication, à la découverte en douceur et sans jugement de ses désirs, de son plaisir et de ceux de l'autre, à la déconstruction de l'idée largement répandue selon laquelle un couple fonctionnel n'a jamais de problèmes. Et rien que d'y assister depuis son canapé, seul·e ou accompagné·e, on en ressent quelques bienfaits.
Alors pour ces quelques rappels nécessaires et salutaires, sans hésiter, on te dit merci, Gwyneth Paltrow. Même si, qu'on se le dise, on te préférait dans Shakespeare in Love.
Sex, Love & Goop, diffusé sur Netflix depuis le 21 octobre.