Non, M. Le Foll, il ne faut pas dire aux enfants de "finir leurs assiettes"

Publié le Jeudi 16 Octobre 2014
Ariane Hermelin
Par Ariane Hermelin Journaliste Terrafemina
Journaliste société passée par le documentaire et les débats en ligne sur feu Newsring.fr.
Non, M. Le Foll, il ne faut pas dire aux enfants de "finir leurs assiettes"
Non, M. Le Foll, il ne faut pas dire aux enfants de "finir leurs assiettes"
A l’occasion de la journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire, le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a exhorté, ce jeudi sur RTL, les parents à forcer leurs enfants à finir leurs assiettes. Problème, ce type d'injonction aurait des effets négatifs sur la santé des enfants et favoriserait notamment l’obésité, comme l'ont révélé différentes études ces dernières années.
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« Il y a trente ou quarante ans dans les campagnes, on disait "tu finis ton assiette". Je crois que c’est un terme qui a été largement oublié. Donc, à tous les parents ce matin, j’en profite pour dire, puisque je suis sur RTL avec Jean-Michel Aphatie : le principe numéro 1 à table, c’est “vous finissez vos assiettes”. » Invité par la radio de la rue Bayard ce jeudi 16 octobre à l’occasion de la journée de lutte contre le gaspillage alimentaire, Stéphane Le Foll a ressorti une phrase que n’importe quel enfant  a entendu au moins une fois de sa vie de la bouche de sa mère ou de son père - parfois accompagnée d’une évocation culpabilisante des « enfants qui meurent de faim en Afrique » : « Finis ton assiette ! »


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« Chaque Français jette l'équivalent de 20 kilogrammes de nourriture par an – dont 7 kilos encore parfaitement emballés – un gâchis qui représente une perte de 400 euros par an et par foyer », a encore rappelé le ministre de l'Agriculture à l'antenne.

L'origine des troubles alimentaires

S’il va sans dire que les diverses initiatives en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire, qui compte désormais dans ses rangs de nombreux grands chefs français, sont très positives, l’abandon de ce principe alimentaire ancestral serait, n’en déplaise à Stéphane Le Foll, une bonne chose. En effet, plusieurs études ont démontré depuis une dizaine d’années qu’en mettant la pression à leurs enfants pour qu’ils finissent le contenu de leur assiette, les parents favorisaient en fait l’apparition de troubles alimentaires chez ceux-ci.

Aux Etats-Unis, des chercheurs ont ainsi démontré que l’obésité infantile était directement liée à cette obligation de finir son assiette, sorte de vestige dans l’inconscient collectif des périodes de famine ; aux Etats-Unis, par exemple, les campagnes « Clean Plate » dans les écoles datent de la Première Guerre mondiale et avaient pour but, à l’époque, d’empêcher le gâchis de denrées alimentaires qui se faisaient rares. C’était bien avant que les ravages de l’obésité infantile outre-atlantique ne conduisent Michelle Obama à danser avec un navet sur Vine pour encourager les enfants à manger des fruits et des légumes.


Comme le rappelle Slate, une étude datant de 2006 a définitivement enterré le mantra « finis ton assiette » en montrant que les enfants savent eux-mêmes réguler leur appétit, et que les encouragements des parents à manger tout ce qu'ils leur ont servi ont pour tout effet de troubler cette capacité innée. Mais malgré ces mises en garde des pédiatres, une étude, parue en 2013 dans la revue Pediatrics, révélait que deux tiers des parents américains continuent d’enjoindre leurs enfants à manger tout ce qui se trouve dans leur assiette, au mépris de leur propre sensation de satiété. Comme quoi, aux Etats-Unis ou en France, n'en déplaisent à nos confrères de Slate, on n’en a pas fini avec le « finis ton assiette ».


Stéphane Le Foll : "Finissez vos assiettes !" par RTL-fr

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