Lulu, le Tripadvisor pour noter les mecs: pour ou contre ?

Publié le Vendredi 05 Septembre 2014
Lulu, le Tripadvisor pour noter les mecs: pour ou contre ?
Lulu, le Tripadvisor pour noter les mecs: pour ou contre ?
Aujourd’hui, plus personne ne teste un nouveau restau ou un hôtel pour ses vacances sans avoir au préalable checké les avis des consommateurs. A l’heure du partage d’expérience tous azimuts, quid d’appliquer ce concept à nos relations amoureuses ? C’est ce qu’a fait Lulu, l’appli qui fait fureur à Londres et à New York. Et chez nous ?
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Après une douce rencontre autour d’un verre, d’une promenade main dans la main où, ensemble, vous avez évoqué mille projets communs, déjà transis d’amour alors que vous vous connaissiez à peine, vous avez naturellement fini dans le lit de ce bel inconnu qui vous contait fleurette sur le Web depuis quelques semaines. Mais voilà, après une nuit torride, et alors que vous réfléchissiez déjà aux prénoms de vos futurs enfants, vous n’avez finalement plus jamais eu de nouvelles de l’abject serial fucker. Vous aimeriez pouvoir prévenir ses prochaines victimes, mais comment faire ?

Si vous habitiez à Londres ou à New York, vous pourriez vous rendre sur Lulu, sorte de Guyadvisor pensé par Alexandra Chong, une trentenaire bossy, alors qu’elle brunchait avec des copines et leur narrait son expérience calamiteuse de la veille avec un inconnu. Que n’avait-elle pu au préalable prendre de véritables renseignements sur ce produit qui, pourtant, semblait bien sous tous rapports ! Plus jeune, on date des copains de lycée puis, souvent, des individus avec lesquels on a des amis en commun, mais quid des inquiétants inconnus ? L’objectif de Chong devient le suivant : obtenir sur les hommes de vraies infos lorsqu’on tape leur nom sur Internet (en bref, pas leur expérience professionnelle ni leurs articles de lycée).

Ainsi naquit Lulu.

Grâce à Lulu, tout, tout, tout, vous saurez tout sur votre prochaine proie. Bon coup, mauvaise haleine, pornographe, soûlant, marrant, neneu… Avant vous, il y a fort à parier qu’une autre femme ait tenté sa chance avec Bernard, et laissé un petit commentaire bien senti comme après un bon, ou un mauvais repas. Membre du gynécée 2.0, ladite femme aura alors téléchargé une photo de notre homme, et adjoint à son profil des hashtags explicites qu’elle aura sélectionné parmi une longue liste élaborée par les équipes de Lulu. #Payetoujours, #Respectueuxdesfemmes, #Rappelle, #PorteduEdHardy, #Gamin, #Peutparleràmonpère, #Ouvrelaporte, #Portedescrocs… Apparence, conversation, performance sexuelle… celui-ci aura ensuite été noté, avant d’obtenir une note générale sur dix, correspondant en quelque sorte à sa cote sur le marché du mâle.

500 000 américains demandent à apparaître sur Lulu

Abject, pensez-vous. Et pourtant, aux Etats-Unis, une étudiante sur quatre y serait inscrite, et plus d’une utilisatrice sur deux laisserait un commentaire ce qui, pour un réseau social, est énorme. Quant aux hommes ainsi exposés sur un tableau d’honneur (ou de déshonneur), ils sont loin de s’être offusqué de telles pratiques. En effet, 500 000 américains ont signé en 2013 une pétition afin d’apparaître sur Lulu, puisqu’il est souvent entendu qu’un mauvais buzz vaut mieux que pas de buzz du tout. Mouais. Dans le New York Times, Sewell Robinson, une jeune célibataire de l’East Village, estime que 70% de ses copines utilise aujourd’hui Lulu avant d’accepter un rendez-vous. Quant à elle, elle a rempli 10 profils dûment notés et commentés pour rancarder les copines, comme on conseille un bon bouquin ou, plutôt, comme on met en garde contre les toilettes sales d’un nouveau restau tendance. Avec la réalité augmentée, peut-être pourrons-nous bientôt passer notre smartphone devant le visage d’un beau gosse croisé dans un bar et, grâce à la reconnaissance faciale, connaître immédiatement ses vices, ses qualités et les appréciations globales laissées par les dernières femmes ayant eu recours à ses services.

En France, l’arrivée de l’application est souvent annoncée mais, comme le retour du Burger King, tarde pourtant à passer nos frontières numériques. Noter des êtres humains, disséquer leurs traits de caractère, émettre un jugement subjectif à leur encontre, autant de procédés qui, et peut-être est-ce plus heureux, concorderaient a priori mal avec notre culture et  notre moralité. Car soyons honnêtes, qui souhaiterait mettre sur le marché le meilleur coup de sa vie, rien que pour faire plaisir aux copines ? Comme pour les restaurants, il y a fort à parier que les avis et commentaires soient laissés soit par des proches enthousiastes (sœur, mère, meilleure copine), soit par des ex revanchardes toute heureuses de pouvoir prendre sournoisement leur revanche.

Et ça, on l’a déjà dit, on n’adhère pas follement. Pas vrai, Valérie ?