Les 6 films les plus girl power à revoir pour survivre à cet été mortel

Publié le Lundi 08 Juillet 2019
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
"SexCrimes" de John McNaughton.
"SexCrimes" de John McNaughton.
Qui dit été dit après-midis caniculaires à comater devant la télé. L'occasion parfaite pour revisiter les "summer movies" les plus féminins...et féministes. Suivez le guide.
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L'été au ciné, c'est une chaleur qui consume les corps jusqu'à l'extase, recouvre les films les plus moites - ceux qui ont provoqué nos émois d'ados - à force de séquences-piscines et de bikinis plus ou moins serrés. Mais ce sont aussi les bourrasques des vagues, des échappées belles, des vagues à l'âme et quelques parenthèses enchantées où l'émerveillement côtoie la torpeur. Le point commun des "summer movies" aussi languides que sulfureux qui constituent notre filmothèque ? Leurs personnages féminins, tantôt garces ou chipies, fantaisistes ou effacés, irrévérencieux et libres - mais toujours iconiques. La preuve en six films intensément girl power qui pointent facilement à trente degrés. Attention aux coups de soleil.

L'été le plus chipie : "A nous quatre"

"A nous quatre" de Nancy Meyers.
"A nous quatre" de Nancy Meyers.

Mood : Hallie et Annie se rencontrent en colonie de vacances. Surprise, les deux gamines se ressemblent comme deux gouttes d'eau. L'une ne connaît pas son père, l'autre n'a jamais rencontré sa mère. Un raisonnement scientifique plutôt poussé les incite à se rendre à l'évidence : elles sont soeurs. Et si elles échangeaient leurs places ? L'occasion idéale pour rencontrer leurs parents respectifs. A nous quatre, c'est donc deux Lindsay Lohan pour le prix d'une. Bien avant Freaky Friday (et l'obsédant "Ultimate"), l'égérie de Disney réjouit par sa rock'n'roll attitude, qu'elle débarque sur fond de Bad to the Bone pour jouer au poker, recouvre les adultes de goudron et de plumes ou se jette "à poil dans le lac". Son assurance de petite-je-sais-tout qui papote comme une aristocrate British lui attire les foudres de l'odieuse Meredith Blake, alias "Cruella", vamp fière d'être "belle et riche" et nouvelle petite amie de son père. D'ailleurs, elle n'hésite pas à vanner celui-ci (un gros pataud fan de chili) sur l'écart d'âge qui le sépare de sa conquête : "Tu as décidé d'adopter Meredith ?"...C'est dire si l'on est de tout coeur avec cette chipie "carrément sublime", flamboyant dans ce monde fait de farces sans conséquences, de bombes dans la piscine et de vin californien. L'été, quoi.

Taux de girl power : Lindsay Lohan/100. Une certaine quête d'absolu. L'enfant terrible qui se cache, faussement discrète, derrière l'apparence de la petite fille modèle. Autrement dit, le stratagème parfait.

L'alternative : Papa, j'ai une maman pour toi, car l'on ne s'est jamais vraiment remis des soeurs Olsen, les jumelles les plus stylées de l'usine à rêves. Sur cette photo, elles rendent un magnifique hommage à Mondrian. Ai-je besoin d'en dire davantage ?

L'été le plus sex : "L'année des méduses"

"L'année des méduses" de Christopher Frank.
"L'année des méduses" de Christopher Frank.

Mood : L'année des méduses, c'est le corps las de Chris (Valérie Kaprisky) qui se languit sous le soleil de la Côte d'Azur. La lolita vénéneuse prend un malin plaisir à envoûter puis à détruire ceux et celles qui scrutent sa poitrine dévêtue : hommes mariés tout juste bons à être écrasés, couples en déroute et autres vieux beaux ivres de fierté. Ses trop longues journées de farniente la conduisent sur la route de Romain (Bernard Giraudeau), dragueur pour campings bien décidé à ne pas succomber aux charmes de celle qu'il surnomme "Salomé". Leur duel prendra la forme d'une transe aussi mystique qu'érotique. Sorte de Bonjour Tristesse ultra-cul, le hit de Christopher Frank n'est pas qu'une ode aux seins nus et aux cocktails glacés dégommés dès le déjeuner. C'est avant tout un manifeste de la garce : celle qui, du haut de son adolescence fiévreuse, ridiculise et incendie le moindre pervers libidineux.

Taux de girl power : 80/100. Quand Kaprisky ne se la joue pas naïade à la Romy Schneider, elle fait tourner les têtes comme Isabelle Adjani. Et alterne incessamment du kitsch à l'interprétation la plus possédée. Inégalable.

L'alternative : Femme(s) fatale(s), sensualité et siestes, bleu assassin, richesse mortifère, Sagnier en sirène : on finira notre après-midi cotonneux sur les abords de la Swimming Pool de François Ozon.

L'été le plus spleenétique : "L'effrontée"

"L'effrontée" de Claude Miller.
"L'effrontée" de Claude Miller.

Mood : "Moi, je suis membre de rien". "Ici tout est petit, tout est moche, et c'est tout". "C'est vachement bizarre, l'amour". "Y'a un moment dans la vie où on pose plus de questions". Chaque réplique de L'effrontée est décochée avec une authenticité bouleversante. Cet émoi diffus, c'est surtout celui de Charlotte (Gainsbourg), surnommée "Charlot", ado de treize ans aux grandes jambes de sauterelle qui cultive son ennui au bord du lac Léman. On découvre L'effrontée, jeune, puis l'on grandit avec. Difficile d'oublier les regards troublés que lance Charlotte à la pianiste Clara Bauman ni son téléphonique "je l'aime, et j'aimerais qu'elle m'aime aussi". Encore moins son "comportement fantasque" de fille-femme perpétuellement coincée dans l'immense creux des grandes vacances - et dans cette robe rouge qui suscite les moqueries de sa nounou. Le mood Charlotte, c'est une sorte de spleen qui n'en finit pas. Une "confusion" suggérée par les paroles de l'hymne qui introduit et clôture ce classique, Ti Amo : "Che confusione / Sara perche ti amo / E un'emozione / Che cresce piano piano...".

Taux de girl power : Charlotte4ever/100. Une sensibilité à ce point à fleur de peau qu'elle en devient intense et nous submerge - comme l'eau chlorée de la piscine où la solitaire Charlotte s'égare. Si forte dans sa faiblesse qu'elle en écrase les seniors Jean-Claude Brialy et Bernadette Lafont.

L'alternative : Les lèvres trop sèches, l'on ira se revigorer en buvant les paroles de Pauline à la plage, autre songe d'une journée d'été du cinéma français.

L'été qu'on assume (toujours) pas : "Dirty Dancing"

"Dirty Dancing" d'Emile Ardolino.
"Dirty Dancing" d'Emile Ardolino.

Mood : La candide Bébé se morfond à crever dans la région des montagnes Catskill. Heureusement, le rebelle Johnny Castle va l'initier aux pirouettes les plus audacieuses - et faire trembler ce petit corps trop timide qui ne demande qu'à s'envoler au septième ciel. Dirty Dancing, c'est une certaine idée du pop-féminisme asséné à coups de twists endiablés. Le récit d'une fille qui devient femme (suivant les codes bien connus du "coming of age movie") au gré de slogans inénarrables ("On ne laisse pas bébé dans un coin") revendique auprès de son père despote son droit à la jouissance, et finit par s'épanouir l'espace de quelques chorégraphies bien rythmées. Alors, sommet de ringardise rose bonbon ou film culte inculquant à ses jeunes admiratrices les vertus de l'émancipation par le plaisir physique ? Trente ans après, on adorerait trancher. Mais l'on préfère s'attarder sur la raison d'être de cette punchline aussi fondante qu'une saga Harlequin : "Tu n'as pas besoin de courir le monde après ton destin comme un cheval sauvage !".

Taux de girl power : 0 ou bien 2000/100. Ecoutez votre coeur.

L'alternative : Point Break, l'autre grande comédie romantique de Patrick Swayze. Ode à la contre-culture surf shootée par une grande cinéaste (Kathryn Bigelow) et porteuse d'une bromance aussi fougueuse qu'humide. On a rarement vu coït plus émoustillant que les prises de bec entre Swayze et Keanu Reeves. On ne laisse pas Bohdi dans un coin, au risque de se prendre la vague du siècle dans la gueule.

L'été le plus ULTRA sex : "SexCrimes"

"SexCrimes" de John McNaughton.
"SexCrimes" de John McNaughton.

Mood : Certes, il y a eu le baiser sonore entre Sarah Michelle Gellar et Selma Blair dans Sexe Intentions - ce film si cynique et sexy, so nineties quoi. Mais tout juste un an avant, c'est la câlinade plus que sororale échangée entre Neve Campbell et Denise Richards dans la piscine de SexCrimes qui a façonné notre imaginaire juvénile. A la revoyure, le film pour adolescents de John McNaughton ne se limite pas seulement à ces effeuillages ou à son inattendu threesome arrosé de champagne. Non, l'on se plaît surtout à déguster les rebondissements d'une intrigue à tiroirs - voire même à commodes, vu le nombre de twists - où (spoiler) les mecs finissent toujours en dindons de la farce. A croire que la chaleur achève de réduire à néant ceux qui se contentent de penser avec leurs sexes. Et qu'au milieu de tout ça, l'archétype de la "garce" - qui n'est pas forcément celle que l'on croit ici - reste la reine incontestable des summer movies les plus vénéneux.

Taux de girl power : 90/100. Un bikini mortel peut en cacher un autre.

L'alternative : La fièvre au corps. Celui de la queen Kathleen Turner condamne les plus faibles à l'insolation fatale. Presque aussi hot que le San Francisco caniculaire de Basic Instinct.

L'été le plus aérien : "Moonrise Kingdom"

"Moonrise Kingdom" de Wes Anderson.
"Moonrise Kingdom" de Wes Anderson.

Mood : Entre l'imaginaire scout façon Castors Juniors et la performance déroutante de Bruce Willis, notre coeur balance. Mais c'est peut-être le personnage de Suzy (Kara Hayward) qui nous fascine le plus dans Moonrise Kingdom. Son idylle sur le sable à la fois pudique et crue, son look aussi désuet que tendance (un éventail de mini-jupes que n'aurait pas reniée la France Gall sixties), son ombre à paupière turquoise et puis surtout, l'écoute pensive de son tube favori : Le temps des vacances, de Françoise Hardy. Son jules lui demande sans chichis "Quel genre d'oiseau es-tu ?" et franchement, l'on ne saurait répondre. Suzy, c'est une féminité indéfinissable, amère, amoureuse, aérienne et violente, aussi fantasmée que mystérieuse, comme seul Wes Anderson sait les écrire.

Taux de girl power : ?/100. Moonrise Kingdom se lit comme un poème, rend heureux (et amoureux) tout en dégageant un parfait parfum de gravité solennelle. Difficile de quantifier cette émotion trop abstraite.

L'alternative : Fantasque elle aussi - mais pourvue d'une tonalité totalement différente - la fable moderne Little Miss Sunshine nous raconte à sa façon "le temps des vacances" en portant les oripeaux si caractéristiques du road movie. Et peut se targuer de nous offrir un discours superbement girl power avec sa fameuse "Little Miss", une Olive aussi spontanée qu'attachante.