Le reporting RSE dans l’impasse

Publié le Mercredi 23 Février 2011
Le reporting RSE dans l’impasse
Le reporting RSE dans l’impasse
Dans cette photo : Nathalie Kosciusko-Morizet
Où en est-on du reporting sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) ? Nulle part, et il semblerait pour l’instant que les mesures prises lors du dernier Grenelle de l’Environnement restent lettre morte. Seules les entreprises de plus de 5000 salariés seraient désormais contraintes de rendre des comptes, alors que le seuil avait été fixé à 500. Voici l’analyse de Véronique Smée, rédactrice en chef du site Novethic.fr.
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Initialement prévu pour fin 2010, le décret d'application de l'article 225 de la loi Grenelle 2 censé définir les obligations de reporting des entreprises sur leur stratégie RSE n'est toujours pas publié. Son contenu a fait l'objet d'intenses batailles auxquelles participent des ministères, des organisations d'entreprises, des ONG et des syndicats. La définition du périmètre d’application, notamment, est au cœur d’un lobbying intense : initialement, le texte prévoyait que les entreprises de plus de 500 salariés devraient désormais exercer un reporting environnemental et social de leurs activités, or ce seuil a progressivement disparu au profit d’un seuil de… 5000 salariés ! Une restriction considérable, donc, du nombre d’entreprises concernées. Comment en est-on arrivé là ? « J’ai été particulièrement surpris par la montée en puissance des lobbys de toute sorte » expliquait Bertrand Pancher député UMP, rapporteur de la loi Grenelle 2 lors d’un débat organisé sur le sujet à Paris. « J’ai vu des entreprises qui ont compris que le développement de demain se ferait avec des règles et des valeurs en cohérence avec les nouvelles attentes du consommateur mais aussi des organisations professionnelles qui s’opposaient à toutes règles de ce type, au nom du handicap qu’elles représenteraient pour les entreprises déjà éprouvées par la crise.»  Des arguments qui laissent perplexe, car on voit mal comment la transparence sur des sujets aussi essentiels que l’environnement, le social ou la gouvernance pourraient nuire à la compétitivité des entreprises…

Autre disposition aujourd’hui disparue, le Grenelle 2 prévoyait que « les institutions représentatives du personnel et les parties prenantes participant à des dialogues avec les entreprises peuvent présenter leur avis sur les démarches de responsabilité sociale, environnementale et sociétale des entreprises en complément des indicateurs présentés ». Autrement dit, les parties prenantes se voyaient ainsi confirmer leur droit à commenter les démarches RSE dans les rapports annuels, une pratique qui existait déjà depuis la loi NRE de 2001. Or, des sénateurs ont fait supprimer cette disposition, au motif qu’elle « pourrait introduire dans le rapport annuel des appréciations non vérifiées ou susceptibles de porter à l’entreprise un préjudice de réputation disproportionné, à l’égard de leurs concurrents étrangers ».
De nombreuses voix se sont élevées contre la remise en cause de ces dispositions, importantes, de la loi Grenelle 2. L’ORSE (Observatoire sur la Responsabilité sociétale des Entreprises), à travers Daniel Lebègue, son président, également président  du comité « RSE et entreprises » mis en place par le Grenelle de l’environnement, a demandé par courrier le 19 janvier à Nathalie Kosciusko-Morizet, de faire respecter trois principes pour rester fidèle à l’esprit du Grenelle :
- Le seuil des entreprises de plus de 500 salariés réalisant au moins 43 millions d’euros de chiffre d’affaires
- L’association des parties prenantes à la rédaction des rapports du développement durable
- la vérification par un tiers indépendant des rapports en question.

Parallèlement, un collectif d’une quinzaine d’organisations, comprenant des ONG comme le Forum citoyen pour la RSE, le WWF ou les Amis de la terre ; des syndicats (la CGT et la CFDT) et des organisations professionnelles d’entreprises comme le CJD (Centre des Jeunes Dirigeants) ont écrit, dans la foulée, une lettre ouverte au Premier ministre l’appelant à « faire respecter les engagements que la France a pris en adoptant la loi Grenelle 2 ». Ils déplorent que « la transparence et la concertation qui avaient présidé à l’élaboration du Grenelle de l’environnement soient bafouées ». La réponse du gouvernement se fait attendre, mais une chose est sûre : les rapports de développement durable pourront rester des objets de communication, sans obligation d’évaluer véritablement la stratégie des entreprises dans ce domaine.

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