Triple A : la grande inconnue de 2012

Publié le Vendredi 06 Janvier 2012
Triple A : la grande inconnue de 2012
Triple A : la grande inconnue de 2012
Dans cette photo : François Fillon
Il a commencé à faire vraiment parler de lui en plein contexte de crise grecque. Depuis, politiques et économistes n'ont plus que lui à la bouche. L'ombre du triple A plane sur 2012 et la crainte de le perdre donne des sueurs froides aux Français et à leurs dirigeants. Mais à quoi sert réellement le triple A et que risque-t-on en le perdant ? Le point avec Céline Antonin, économiste à l'OFCE*.
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Terrafemina : A quoi sert le triple A ?

Céline Antonin : Les agences de notations donnent une note aux Etats et estiment ainsi la probabilité de défaut d’un pays. Ils suivent ainsi une échelle de notes qui va de AAA à D, le D équivalant à un défaut de paiement. Avoir un triple A est l’équivalent d’un 20/20. Cela signifie que l’on est sûr à 100% qu’un pays va honorer ses engagements. A quoi cela sert-il à la France d’avoir un triple A ? Ses créanciers sont sûrs de sa santé économique et sont plus enclins à investir dans ses titres. Il est plus facile pour la France d’emprunter, en émettant des obligations à un taux d’intérêt très faible.

TF : Serait-ce vraiment grave de perdre notre triple A ?

C.A. : Une baisse de notation aurait deux principales conséquences. Cela engendrerait une hausse des taux d’intérêt pratiqués sur les titres publics émis par la France. Par ailleurs, certains investisseurs sont obligés d’avoir dans leur bilan des titres notés triple A : dans le cas d’une dégradation de la note ils seraient obligés de se délester de leurs titres français.
Quant à savoir si la perte du AAA serait grave, tout dépend du contexte dans lequel la note serait abaissée. La France reste un pays à l’économie solide et si elle perdait son triple A dans le cadre d’une dégradation de l’ensemble de la zone euro, alors on pourrait s’attendre à ne pas voir une explosion des taux d’intérêt obligatoires, ce qui atténuerait la gravité d’une dégradation de la note.

TF : Y-a-t-il des chances pour que la France perde son triple A ?

C.A. : Dans la mesure où elle a été mise sous surveillance, on ne peut pas exclure cette option. La France connaît une croissance molle ainsi qu’une politique de restriction budgétaire et sa dette atteint presque 85% de son PIB. Ce sont autant de critères que les agences de notation vont prendre en considération et qui risquent de coûter son triple A à l’Hexagone. De plus toute la zone euro est en période de restriction budgétaire généralisée, ce qui peut avoir des conséquences négatives sur la France. La croissance en berne est en effet un signal négatif fort pour les agences de notation.
Reste que la France est en train de mener une politique d’assainissement budgétaire qui pourrait rassurer les marchés. Par ailleurs la perspective de l’élection présidentielle en 2012 va également influer sur la décision des agences de notation : ces dernières analyseront la situation en fonction du programme en matière de finance publique des candidats à l’élection présidentielle.

TF : Pourquoi les Français parlent-ils tant de leur triple A ?

C.A. : Les agences de notation sont un bon baromètre de ce qui se passe au niveau économique. Elles ont cette capacité à mettre une note synthétique, avec ce que cela comporte de positif et de négatif. En résumant ainsi l’économie d’un pays en une seule note, elles permettent aux citoyens d’avoir l’impression d’embrasser et de comprendre la situation économique de la France à travers une simple note. C’est pourquoi les gens y sont attachés : ce triple A est le symbole de la santé financière du pays. Mais attention tout de même à ne pas accorder à cette note la signification qu’elle n'a pas : cela reste une notation très synthétique, qui ne recouvre pas la complexité de la situation et qui ne reflète pas forcément fidèlement la santé de notre économie.

*OFCE : Observatoire français des conjonctures économiques

Crédit photo : AFP/Archives

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