Cybersexualité : à quand l'amour avec des robots ?

Publié le Mardi 16 Avril 2013
Cybersexualité : à quand l'amour avec des robots ?
Cybersexualité : à quand l'amour avec des robots ?
On sait comme les personnes seules aiment les animaux de compagnie. On découvre depuis peu que les robots, à condition qu'ils aient une forme humaine ou animale, déclenchent des sentiments autrefois réservés aux humains. Mais qu'est-ce que cela dit de nos rapports, en particulier lorsqu'ils touchent à l'affectif ? A-t-on si peur de la relation à l'autre, que certains préfèrent diriger leur affect vers des machines ?
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On aborde de plus en plus souvent le rapport curieusement affectif qui se noue entre l'homme et le robot, qu'il s'agisse de Real Humans, la série diffusée actuellement sur Arte, de cybersexualité (faire l'amour avec des machines, sextoys inclus), ou encore des différentes études qui paraissent sur les relations très émotives qu'entretiennent les humains avec les robots (on parle même de « lovotics » - contraction de « love » et de « robotics »). La dernière en date porte sur les réactions humaines lorsqu'un robot est maltraité.

La merveilleusement bien nommée Kate Darling, chercheuse au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston, s'est récemment intéressée à la maltraitance infligée aux robots, d'où il est ressorti que même un colonel de l'armée américaine s'est révélé si sensible à leur maltraitance qu'il a fait interrompre un programme de robots pour désamorcer les mines ; il trouvait « inhumain » de les voir perdre une de leurs six pattes à chaque opération. D'après la chercheuse, cela tient « pas tant à cause de la douleur qu'ils peuvent ressentir qu'en raison de la réaction que leur douleur suscite chez nous. » (interview parue dans Le Monde « Donnons des droits aux robots »).

De la même façon, une entreprise américaine constate que les patients recourent de plus en plus volontiers aux services de télé-santé, pour recueillir à distance les conseils du corps médical, comme s'il fallait de plus en plus tenir éloigné tout ce qui touche à l'intime, où se loge la vérité.

Dans la course effrénée au paraître de notre société, où le physique est remodelé pour plaire aux autres et où beaucoup semblent redouter l'abandon s'ils ne sont pas conformes aux codes en vigueur, il n'est pas anodin de noter que les réseaux sociaux encouragent à construire une forme d'avatar en mots et en images qui se « like » (aimer), mais ne peuvent se « dislike » (ne pas aimer), comme s'il fallait en groupe s'encourager les uns les autres dans le difficile exercice du masque de l'apparence.

L'intime partout difficile à livrer a pour conséquence des rapports sexuels qui se dirigent, subrepticement ou pas, vers une pluralité de cybersexualités (Internet, jouets, robots, webcams, etc.), qui vont souvent de pair avec une forme de solitude (généralement urbaine). Il faut pourtant noter que, de même que si les sextoys peuvent permettre d'obtenir un orgasme exactement comme on l'entend, il n'a jamais la même saveur que celui obtenu avec un être aimé, fait de chair, de sang, d'odeurs et de sentiments, quels qu'ils soient, la cybersexualité n'apporte pas la même récompense que la sexualité charnelle.

Peut-être d'ailleurs a-t-elle une saveur si particulièrement délectable, jouissive, parce qu'il y a un risque à oser s'y abandonner.

Peut-être aussi parce que, comme le font remarquer les biologistes, un être vivant est un être qui mange, procrée et a des relations. Voilà sans doute pourquoi, Hooman Samani, chercheur en robotique à l'université de Singapour ne cherche pas à « humaniser » les robots, mais à analyser des émotions à partir des expressions du visage, qui pourraient être programmables et permettraient aux robots de répondre aux attentes amoureuses des humains. Si nous sommes capables d'avoir des sentiments pour les robots, ils ne sont pas près de nous les rendre. La relation sexuelle et amoureuse sera donc programmable avec un androïde, mais sans sentiments en retour.

Payer pour avoir une relation sexuelle sans sentiments ? Voilà une histoire qui est vieille comme Le Monde...