Société
Féminicides en public, violences misogynes, "culture de la honte" : la situation de l'Inde alarme à l'international
Publié le 9 juin 2023 à 11:23
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Des meurtres abjects teintés de misogynie sont venus ensanglantir l'Inde... A dix jours d'intervalle. Tant et si bien qu'une avocate à la Cour suprême s'alarme de "la montée des violences" au sein d'un pays très peu connu pour son respect des femmes.
Féminicides en public, violences misogynes, "culture de la honte" : la situation de l'Inde alarme à l'international Féminicides en public, violences misogynes, "culture de la honte" : la situation de l'Inde alarme à l'international© Adobe Stock
La suite après la publicité

En Inde, les droits des femmes vont rarement sans les droits des filles : tous deux sont bafoués à l'unisson. Agressions sexuelles, viols, violences physiques, humiliations diverses, sont autant de faits relatés lorsqu'il s'agit de prendre le pouls d'un pays peu connu pour sa lutte contre la misogynie. Cela s'est encore démontré d'ailleurs en mai dernier, suite à la mort de deux jeunes filles. La première avait seulement seize ans. Elle a été poignardée et matraquée en public, à Delhi. Un meurtre capté par des caméras de surveillance.

"La raison d'une telle violence ? La fille de 16 ans venait de mettre fin à leur relation, et l'homme n'aurait pas pu le supporter", relate RFI. L'autre drame a eu lieu le 19 mai dans le district de Surat. Une jeune fille été agressée au couteau des mains de son propre père, qui n'acceptait pas que cette dernière... Souhaite dormir sur la terrasse de leur maison plutôt qu'à l'intérieur.

Dix jours seulement espacent ces féminicides.

Des faits qui ont beaucoup fait réagir à l'international, mettant de nouveau en lumière la situation critique de l'Inde. A la chaine d'informations américaine CNN, l'avocate principale à la Cour suprême du pays Jayna Kothari, très engagée dans les enjeux de genre et de sexualités, a ainsi affirmé que la violence contre les femmes s'était "intensifiée" au cours de la dernière décennie.

Aujourd'hui, la spécialiste du droit tient à alarmer : "Au cours des 10 dernières années, nous avons été témoins de meurtres horribles et d'incidents violents. L'intensité des crime, la fréquence des crimes et la brutalité des crimes ont augmenté. Ils se poursuivent et aucune mesure visible n'est prise. En Inde, les gens ne veulent toujours pas parler de violences conjugales par exemple".

Assertions appuyées par des données du National Crime Records Bureau national, qui rapporte une augmentation des crimes contre les femmes, entre 2011 et 2021... de 87 %.

Une misogynie assassine "socialement acceptée"

Auprès du média américain, Jayna Kothari toujours interprète le meurtre d'une jeune fille en plein Delhi, aux yeux des passants, comme la démonstration morbide d'un pays qui banalise les féminicides.

Elle le déplore : "Je pense que la raison pour laquelle l'affaire récente est si choquante est qu'elle s'est produite de manière si flagrante dans un lieu public. C'est presque comme si socialement, les gens ne voyaient rien de mal". L'avocate évoque "une apathie sociétale envers la violence contre les femmes et les filles, ou pire, une acceptation".

Ces violences, plus encore que misogynes, ayant souvent trait aux violences domestiques (du mari, du père, en bref d'un cercle proche cerné surplombé par la domination masculine), peuvent être qualifiées de "patriarcales". Pourquoi ? Car le sort des victimes, tout comme l'inaction alentours, ou ce qu'éprouvent les survivantes, qui hésiteront à parler, s'avère indissociable d'un système qui tend à faire éprouver aux filles et aux femmes de la honte et de la culpabilité. Envers leur corps, leur sexualité, leurs règles, leur propre personne.

"De nombreux cas ne sont pas signalés aux autorités en partie à cause d'une culture du victim blaming, au sein de ce qui reste une société hautement patriarcale", déplore à ce titre la chaîne d'informations américaine.

Une culture de la culpabilité qui s'étend des affaires de violences conjugales aux affaires de viols. L'an dernier, trois soeurs victimes de violences conjugales, Kalu, Kamlesh et Mamta Meena, étaient retrouvées mortes dans la campagne indienne, au fond d'un puits. Sur un message relayé par l'AFP, et émanant de l'une des défuntes, on pouvait lire : "Nous ne voulons pas mourir, mais la mort vaut mieux que les sévices".

Un constat tragique qui en dit long sur les conséquences morbides du patriarcat.

Mots clés
Société News essentielles Inde international Monde filles enfants Droits des enfants
Sur le même thème
La première présidente élue du Mexique a un but : lutter contre le machisme et les violences faites aux femmes
femmes
La première présidente élue du Mexique a un but : lutter contre le machisme et les violences faites aux femmes
3 juin 2024
A Londres, les femmes noires sont davantage victimes de féminicides : pourquoi ? play_circle
Société
A Londres, les femmes noires sont davantage victimes de féminicides : pourquoi ?
29 mai 2024
Les articles similaires
"Un sentiment d'impunité !" : le féminicide d'une médecin bouleverse (et indigne) l'Inde play_circle
Société
"Un sentiment d'impunité !" : le féminicide d'une médecin bouleverse (et indigne) l'Inde
23 août 2024
C'est quoi ce "botox shaming" très inquiétant dont Audrey Fleurot est victime ? play_circle
Société
C'est quoi ce "botox shaming" très inquiétant dont Audrey Fleurot est victime ?
11 octobre 2024
Dernières actualités
Gisèle Pélicot bientôt au Panthéon ? play_circle
Sydney Sweeney : tous les secrets forme et beauté de l'actrice, entre Pilates et sucreries play_circle
bien-être
Sydney Sweeney : tous les secrets forme et beauté de l'actrice, entre Pilates et sucreries
23 octobre 2024
La "Carrie" de Stephen King ENFIN incarnée par une femme grosse ? play_circle
Body positive
La "Carrie" de Stephen King ENFIN incarnée par une femme grosse ?
23 octobre 2024
Dernières news