Opérées par un chirurgien, les femmes auraient plus de risques de mourir

Publié le Jeudi 06 Janvier 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Les femmes opérées par un chirugien ont plus de risques de mourir (et c'est inquiétant)
Les femmes opérées par un chirugien ont plus de risques de mourir (et c'est inquiétant)
32 %, c'est la proportion exacte de risques en plus de décéder observé par une étude auquel les femmes sont confrontées lorsqu'elles sont opérées par un chirurgien masculin. Des inégalités fatales, littéralement.
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L'étude publiée dans la revue JAMA Surgery s'est portée sur 1,3 million de patient·e·s vivant dans la région canadienne de l'Ontario et ayant subi 21 interventions chirurgicales courantes pratiquées par 2 937 chirurgiens entre 2007 et 2019.

Du remplacement de la hanche et du genou à la chirurgie bariatrique, en passant par l'ablation de l'appendice ou de la vésicule biliaire et des opérations plus compliquées comme un pontage cardiaque, une réparation d'anévrisme et une chirurgie du cerveau : les résultats sont particulièrement glaçants.

"Nous manquons à nos devoirs"

"Dans notre échantillon impliquant près de 3 000 chirurgiens, nous avons constaté que les patientes traitées par des chirurgiens masculins avaient 15 % de chances supplémentaires d'obtenir de moins bons résultats que les patientes traitées par des chirurgiens féminins", a analysé Dre Angela Jerath, professeur associé et épidémiologiste clinique à l'Université de Toronto au Canada et co-autrice des conclusions, dont les propos sont rapportés par le Guardian.

Complications décuplées, un plus grand nombre de réadmission à l'hôpital, mais aussi, un risque d'y laisser la vie 32 % plus élevé si l'opération se déroule entre les mains d'un homme que d'une femme, lorsque l'on est une patiente. La faute à des "préjugés de genre implicites" chez les chirurgiens masculins, évoque le rapport, dont le sujet est inédit.

"Nous avons démontré dans notre article que nous manquons à nos devoirs envers certaines patientes et que certaines d'entre elles passent inutilement à travers les mailles du filet, avec des conséquences néfastes, voire fatales", observe encore la chercheuse. Les hommes en revanche, ne sont pas impactés par le genre du ou de la praticien·ne.

Lorsqu'une femme opère, de meilleurs résultats en général

La clé ? La parité.
La clé ? La parité.

La Dre Jerath poursuit, notant une autre différence de genre : "Lorsqu'une chirurgienne opère, les résultats des patients sont généralement meilleurs, en particulier pour les femmes, même après ajustement des différences d'état de santé chronique, d'âge et d'autres facteurs, lorsqu'elles subissent les mêmes procédures".

Alors bien sûr, affirme-t-elle, "il existe d'excellents chirurgiens masculins qui obtiennent constamment de bons résultats, ce qui est inquiétant, c'est que cette analyse signale une réelle différence entre les chirurgiens masculins et féminins dans l'ensemble, où la pratique peut avoir un impact sur les résultats généraux pour les patients". Et de balayer l'hypothèse de différences techniques, puisque "les deux genres suivent la même formation médicale technique".

Selon elle, les biais sexistes, "stéréotypes et attitudes subconscients et profondément ancrés" incarneraient en effet une explication possible. Mais ce n'est pas tout : les différences entre les hommes et les femmes en matière de communication et de compétences interpersonnelles, qui se manifestent dans les discussions des chirurgiens avec les patients avant l'opération, peuvent également être un facteur, estime la Dre Jerath. Et "des différences entre le style de travail, la prise de décision et le jugement des médecins hommes et femmes".

La clé ? La parité et un meilleur bien-être au travail pour les chirurgiennes et aspirantes. A bon entendeur.