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Deux femmes sur trois pensent qu'elles doivent "perdre du poids"

Publié le Vendredi 19 Janvier 2024
Clément Arbrun
Par Clément Arbrun Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Deux femmes sur trois pensent qu'elles doivent "perdre du poids"
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Un passionnant reportage d'Arte, "Qui a volé l'appétit des femmes ?", décoche quelques faits accablants sur le culte des régimes alimentaires. L'occasion de rappeler tout le poids des injonctions faites aux femmes.
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Deux femmes sur trois pensent qu'elles doivent "perdre du poids". Cela, c'est ce que relate Arte à travers un reportage d'utilité publique à rattraper fissa sur la plateforme de la chaîne : "Qui a volé l'appétit des femmes ?". Une interrogation mystérieuse quand bien même la réponse se devine... Le patriarcat !

Explications : derrière bien des cas de mal être et des situations de troubles alimentaires, vécues par des femmes, on retrouve bien souvent des injonctions dont ces dernières font insidieusement l'objet, en se contentant de vivre dans cette société. Et à travers elles un culte si banalisé qu'il est rarement contredit : celui des régimes alimentaires, et des plus drastiques s'il en est.

Et cela, c'est inquiétant. Plus de la moitié des filles en Allemagne ont déjà fait un régime dès l'âge de 15 ans, relate à ce titre Arte, études à l'appui.

De quoi s'alarmer sérieusement, non ?

"On utilise l'assiette pour façonner les femmes"

A travers ces chiffres s'esquisse une réalité qui touche bien des tranches d'âge, et s'ancre dès la racine. On se rappelle par exemple (sans grande nostalgie) qu'en 2019 la branche américaine du célèbre programme de régime alimentaire Weight Watchers lançait une application destinée... aux 8-17 ans. Au secours !

L'état des lieux ne s'arrête pas là.

En Allemagne toujours, 25 % des adolescentes ont déjà fait plusieurs régimes et non un seul. Alors qu'enchaîner des régimes peut entraîner de sérieux troubles alimentaires. L'auteure Annabelle Hirsch l'analyse ainsi : "Depuis le 19ème siècle au moins, manger a toujours chez les femmes été associé à une forme de honte. On a fait comprendre aux femmes que prendre du plaisir en mangeant, avoir de l'appétit et manger beaucoup n'est pas convenable"

"On a utilisé l'assiette pour façonner les femmes dont le patriarcat a besoin. Les femmes qui se taisent, sont faibles, ne prennent pas trop de place, ont appris à s'autodiscipliner et ont intériorisé toutes ces injonctions. L'assiette a été instrumentalisée pour canaliser leur élan de vie et les réprimer"

Pour ce reportage, la conclusion est sans appel : ces réalités témoignent des nombreuses pressions imposées aux femmes, des charges encore palpables malgré des mouvements venus bousculer les lignes comme le body positive sur les réseaux sociaux. "Culpabilisation, injonctions au régime, remarques de l'entourage : depuis plusieurs siècles, les femmes et jeunes filles entretiennent malgré elles un rapport compliqué à la nourriture".

Un reportage abondamment commenté !

"J'ai constaté que même si certaines femmes adoraient comme moi se régaler et se fichaient des diktats il y avait quand même toujours à un moment donné une personne pour (par malveillance ou convention) les rappeler à ordre quant à leur consommation", "Un poids maîtrisé et la taille fine ne doit plus être un diktat. Mais la santé doit être un fil conducteur", "Il est certain qu'il y a un modelage du corps des femmes et plus encore depuis que le corps est devenu un objet de consommation", peut-on notamment lire sur YouTube.

"Faut juste apprendre a se détacher de l'image que l'on a de soi. Faut arrêter de se regarder autant dans le miroir qui piège nos âmes. J'ai comme beaucoup de personnes, souffert d'anorexie depuis le début de mon adolescence. On veut que les femmes soient sexys, pas trop ci ou pas trop ca, même dans la sphère familiale on est jugées", témoigne une autre internaute.

De quoi libérer bien des voix donc. Et c'est tant mieux.