Adoption : 9 choses importantes à savoir avant de se lancer

Publié le Mardi 08 Mars 2016
Dorothée Louessard
Par Dorothée Louessard Journaliste
L'adoption
L'adoption
Chaque histoire d'adoption est différente. Néanmoins ces conseils délivrés par Adeline Fortin, auteur du livre "Veux-tu une nouvelle maman ?", co-écrit avec sa fille adoptive Hazel, devraient aider celles et ceux qui désirent adopter.
À lire aussi

En France, près de 10 000 demandes d'adoption sont effectuées chaque année. Pourtant, seuls 1 400 enfants ont trouvé un foyer d'adoption en 2013. Il faut dire qu'entre délais d'attente, conditions à remplir et qualités requises, l'adoption d'un enfant n'est pas une démarche facile. Adeline Fortin, maman adoptive et co-auteure du livre "Veux-tu une nouvelle maman ?" (Éditions La Boîte à Pandore) revient sur son expérience et livre ses conseils avisés.

1- Quelles sont les conditions à remplir pour prétendre à l'adoption ?

En France, pour pouvoir adopter un enfant, il faut avoir 28 ans minimum, que l'on soit célibataire ou mariée. Pour un couple marié, il faut garantir 2 ans de mariage et pas de séparation de corps. Pour un couple marié adoptant seul, le consentement du conjoint est tout de même nécessaire. Tous doivent avoir obtenu l'agrément (et qu'il soit en cours de validité) qu'il s'agisse de l'adoption d'une pupille de l'Etat, d'un enfant confié à un Organisme autorisé pour l'adoption (OAA) ou d'un enfant étranger et l'écart d'âge entre l'adoptant et l'adopté doit être de 15 ans minimum (dérogation possible). A noter que l'agrément ne peut être délivré qu'à des candidats mariés ou à des candidats célibataires :

  • Un candidat marié peut adopter conjointement ou seul avec l'autorisation de son conjoint.
  • Un candidat non marié vivant en couple (union libre, concubinage, PACS) est juridiquement célibataire et ne peut donc adopter que seul.

Il faut disposer de capacités matérielles et financières suffisantes pour pouvoir accueillir l'enfant et subvenir à sa prise en charge. "Une assistante sociale se rend dans votre lieu de résidence pour voir dans quelles conditions vous vivez et si vous disposez d'une chambre pour l'enfant", explique Adeline Fortin.

2- Quelle sont les démarches ?

La première chose à faire pour entamer le processus d'adoption est d'envoyer un courrier au Conseil Général de votre département pour l'en informer. S'ensuit alors une enquête sociale et psychologique. La première est réalisée par des assistantes sociales. "Elles s'intéressent à vos activités, votre situation familiale, matrimoniale, vos centres d'intérêts, vos relations, votre situation professionnelle", précise Adeline Fortin. Dans le cadre de cette enquête "votre entourage sera amené à être interrogé et cela inclut aussi votre supérieur hiérarchique et vos collègues de travail. Il vaut donc mieux être bien appréciée dans son travail", ironise l'auteure, passée elle-même par là, lors de l'adoption de sa fille Hazel.

L'étape finale, c'est l'entretien avec le psychologue. Selon la maman adoptive, "il faut alors réussir à rester humble tout en se montrant sous son meilleur jour : faire état de ses qualités éducatives, se montrer pédagogue et surtout ne pas être trop exigeante au risque de se voir pénalisée".

3- Quels sont les délais d'obtention de l'agrément ?

Si, en moyenne, les futurs parents obtiennent leur agrément dans les 9 mois suivants la demande, on ne l'obtient pas toujours du premier coup. Adeline a ainsi reçu son agrément la deuxième fois. "Le fait de prétendre à l'adoption en tant que maman célibataire et que ses parents soient divorcés" aurait nettement joué en sa défaveur face au psychologue lors de sa première requête. "Si j'avais été en couple, je l'aurais sans doute obtenu du premier coup" ajoute-t-elle. A noter que 90% des gens qui adoptent sont en couple. C'est donc au bout de deux ans qu'elle a décroché son agrément. Celui-ci est alors valable pour une durée de 5 ans.

4- Adoption nationale ou internationale ?

L'adoption nationale concerne exclusivement les pupilles de l'État (enfants nés sous X, orphelins ou déclarés abandonnés par le tribunal de grande instance ) et parmi eux, tous ne sont pas sujets à l'adoption. Par exemple, "en 2013, seule la moitié des 2 363 pupilles de l'État pouvaient faire l'objet d'un projet d'adoption. Les autres ne peuvent être adoptés en raison du maintien des liens avec leur famille biologique, de leur bonne insertion dans leur famille d'accueil de ASE (Aide sociale à l'enfance), ou tout simplement de leur refus", explique la Caf sur son site. La même année, 1 569 enfants étrangers ont été adoptés par des familles françaises, nous informe le site Enfance et famille d'adoption (EFA). Ainsi, les adoptants se tournent de plus en plus vers l'étranger. C'est également le cas d'Adeline qui a adopté sa fille Hazel en Russie. Mais rien n'empêche de tenter une démarche en France et à l'étranger simultanément, le tout étant de prévenir si votre adoption à l'international a abouti afin de ne pas bloquer la demande d'autres parents.

5- Combien coûte une adoption ?

En théorie, cela ne coûte rien : l'agrément est gratuit, ainsi que le jugement d'adoption. Néanmoins, l'adoption à l'étranger engendre des frais : salaire d'un accompagnateur-traducteur éventuel, coût des procédures sur place et traduction des pièces, remboursement éventuel des frais médicaux et des frais d'entretien de l'enfant depuis sa prise en charge par les services sociaux qui l'ont accueilli, voyages et séjours éventuels des parents dans le pays d'origine, dons à l'orphelinat qui s'est occupé de lui...

Dans le cadre de sa procédure d'adoption, outre le salaire de son accompagnatrice traductrice, les aller-retours en Russie et le logement sur place, Adeline a notamment transmis à l'orphelinat de sa fille "un don permettant d'acheter des radiateurs et de procéder à une réfection des douches. Un coût certes, mais dans mon cas du moins, ni exorbitant, ni choquant", précise-t-elle.

6- L'exigence, un frein à l'adoption

Pour limiter la durée d'attente d'attribution d'un enfant, il vaut mieux "ne pas avoir d'idée préconçue sur l'enfant que l'on souhaiterait avoir, ni se montrer trop exigeant", concède la maman. "Plus facile, si l'on est prêt à accueillir un enfant grand", conseille Adeline qui considère en outre "les célibataires comme les parents pauvres dans les situations d'adoption". Mais en acceptant d'accueillir un grand enfant (Hazel était âgée de 7 ans) ou souffrant d'un handicap, l'adoption est plus rapide". L'adoption d'Hazel s'est ainsi effectuée en quelques mois à peine.

Les chances d'adopter un nourrisson sont, en effet, grandement limitées comme on peut le voir à travers les chiffres révélées par le site de l'EFA, "les ASE (Aide sociale à l'enfance) départementales placent environ 500 à 600 nourrissons chaque année, pour 23 000 titulaires d'un agrément". En revanche, "des enfants, parce qu'ils sont grands, malades, handicapés ou en fratrie attendent une famille. Mais l'accueil de ces enfants ne peut se faire qu'après y avoir mûrement réfléchi et s'être préparé aux difficultés que peut amener ce type de projet".

7- Un engagement pour la vie

Il faut savoir pourquoi on souhaite adopter. "C'est un engagement pour la vie, il faut être sûr(e) de ce qu'on veut". Dans le cas d'Adeline Fortin, il y avait une volonté d'"offrir une famille à un enfant, de le sortir de la misère". Mais, bien sûr, il faut aussi "avoir beaucoup d'amour et de tendresse à donner". Cette démarche doit être altruiste, pas seulement liée à un manque.

8- Patience, disponibilité et ouverture d'esprit

Pour adopter, "on doit être prêt à déplacer des montagnes et à relever des défis, car il y en a constamment. L'adoption n'est pas un long fleuve tranquille", précise la maman d'Hazel. L'endurance et la patience sont donc des qualités essentielles. Elle ajoute également qu'il est nécessaire de "savoir faire preuve de psychologie et de créativité pour réussir à dénouer les problèmes et se montrer aussi disponible que possible car ce sont des enfants qui ont des grands besoins d'attachement".

9- Se sent-on parent instantanément ?

Adeline s'est sentie mère dès lors qu'elle a vu la photo de la petite fille qui lui était proposée à l'adoption. Pour elle, le fait de ne pas l'avoir enfantée ne l'a aucunement empêché de se sentir pleinement maman. Elle précise d'ailleurs que "lui offrir une autre vie, lui faire découvrir un nouvel univers c'est aussi une façon de lui redonner naissance". Évidemment, chaque cas est différent. Et si l'enfant doit pouvoir obtenir des réponses à ses questions concernant son passé, elle conseille de "ne pas trop cultiver le souvenir pour ne pas empêcher l'enfant de se construire une nouvelle parenté".

L'auteure conclut :"Adopter m'a apporté, outre l'amour, beaucoup de choses. Ça m'a appris à me remettre en question car en tant que mère adoptive aussi on a le sentiment de ne pas avoir été le parent qu'il fallait, même si on essaie de faire au mieux".

A lire : "Veux-tu une nouvelle maman ?", Hazel et Adeline Fortin, Éd. La Boîte à Pandore, novembre 2015.

Pour plus de renseignements :

www.adoptionefa.org
www.agence-adoption.fr
www.adoption.gouv.fr