Le captagon, la drogue des djihadistes

Publié le Mardi 17 Novembre 2015
Marie Chaumière
Par Marie Chaumière Journaliste
Capture du documentaire "La drogue de Daech"
Capture du documentaire "La drogue de Daech"
Pour rester maîtres d'eux-mêmes pendant les assauts, les combattants de l'Etat islamique ont recours au captagon, un stimulant qui améliore la concentration et dont le trafic permet à l'organisation terroriste de financer armes et opérations militaires. Explications.
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Décrits comme très calmes, voire impassibles par les témoins au moment de l'attaque vendredi 13 novembre, les assaillants du Bataclan étaient-ils sous l'emprise d'une drogue ? L'hypothèse est évoquée. Et la découverte, ce mardi 17 novembre, de seringues et de fils d'intubation dans la chambre d'hôtel réservée à Alfortville par l'un des terroristes, encore en fuite à l'heure où nous écrivons, pourrait confirmer ces soupçons.

La consommation de captagon par les combattants de l'Etat islamique est déjà connue. Cette petite pilule blanche a en effet vu sa production exploser en Turquie et en Syrie depuis le début des années 2000 et s'est depuis propagée dans les pays du Golfe. Mais quelle est cette substance et pourquoi les terroristes en consomment-ils ?

Synthétisé pour la première fois en 1961, le captagon, également connu sous le nom de fénéthylline, est un stimulant de la famille des amphétamines qui comprend notamment la métamphétamine et l'ecstasy (dont le principe actif est la MDMA). Cette drogue stimule la production permet de booster sa concentration. Elle fut utilisée pendant les années 60 et 70 par des cyclistes en raison de ses propriétés dopantes.

Depuis, le captagon est devenue la drogue de prédilection des terroristes, car elle fait disparaître la crainte et la fatigue. C'est ainsi qu'on a découvert, lors de l'autopsie de Seifeddine Rezgui, l'homme qui a abattu 38 personnes en juin dernier à Sousse, en Tunisie, que ce dernier était sous l'emprise de cette substance.

"Comme toutes les autres amphétamines, cette drogue entraîne une résistance à la fatigue, une vigilance accrue et une perte de jugement. Elle donne l'impression à celui qui la consomme d'être tout puissant, d'être le 'roi du monde' en quelque sorte", explique à Sciences et Avenir le Professeur Jean-Pol Tassin, neurobiologiste de l'Inserm et spécialiste des addictions.

En plus de permettre aux djihadistes de contrôler leurs nerfs lors d'opérations armées, le captagon représente une manne financière pour Daech. Chaque paquet de pilules blanches ne coûte que quelques centimes à fabriquer et est revendu entre 5 et 10 dollars. "Un sac qui contient 200 000 pilules rapporte un demi-million de dollars" et ne coûte que quelques milliers de dollars à fabriquer, expliquait l'expert Radwan Mortada il y a quelques mois dans un documentaire consacré à cette drogue diffusé sur Arte. L'organisation terroriste utilise son trafic afin de financer l'achat d'armes et la mise au point d'actions militaires.