Terrorisme : Français enlevés au Niger, l’éclairage de Jean-Vincent Brisset

Publié le Mardi 11 Janvier 2011
Terrorisme : Français enlevés au Niger, l’éclairage de Jean-Vincent Brisset
Terrorisme : Français enlevés au Niger, l’éclairage de Jean-Vincent Brisset
Moins d’une semaine après le décès d’Antoine de Léocour et Vincent Delory, les deux jeunes Français enlevés vendredi dernier au Niger, Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l’Iris, revient sur ces événements et sur la migration d’Aqmi en Afrique de l’Ouest.
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Jean-Vincent Brisset est directeur de recherche à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques). Spécialiste des questions de défense et de relations internationales, il a également été auditeur du Centre des Hautes études pour l'Afrique et l'Asie Moderne. Pour Terrafemina, il revient sur le décès d’Antoine de Léocour et Vincent Delory, enlevés vendredi au Niger, mais aussi sur la situation d’Aqmi en Afrique.

Terrafemina : Pourquoi le terrorisme délaisse-t-il les pays du Maghreb pour s’attaquer à l’Afrique de l’Ouest ?

Jean-Vincent Brisset : Les pays du Maghreb ont vivement réagi à la présence d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) sur son sol. A un point tel que l’organisation ne fonctionne plus du tout dans ces régions. Pourtant,  ses racines étaient bel et bien en Algérie. Aujourd’hui, ils semblent que les terroristes d’Aqmi se déplacent davantage vers le sud du continent, trouvant refuge dans le Sahara, notamment.

TF. : Ces évènements étaient-ils prévisibles ?

J.-V. B. : Cette prise d’otages était certainement prévisible. Mais il est très facile de rejeter la faute sur les services de renseignements français ou étrangers, de crier à la bavure. On s’aperçoit en effet très souvent qu’ils avaient en leur possession cette petite information qui aurait permis d’éviter un drame. Malheureusement, celle-ci est souvent noyée parmi une masse gigantesque de renseignements.

TF. : Faut-il craindre d’autres attentats visant la France ?

J.-V. B. : Depuis la fin des années 1990, il y a eu une série d’attentats dans cette zone de l’Afrique. Ils ont touché des Chinois, des Italiens, des Espagnols, etc. La France n’est donc pas la seule visée, ces actes concernent la communauté internationale dans son ensemble.
Toutefois, inconsciemment, la France augmente elle-même la valeur de ses otages et s’expose donc davantage. Et pour cause, pour un terroriste, un otage n’a pas de valeur sentimentale, mais uniquement marchande. D’ailleurs, deux éléments motivent une prise d’otage : l’argent ou des revendications politiques.
Aussi, en affichant nos richesses, en médiatisant nos captifs, en créant des comités de soutien de plus en plus importants, nous montrons aux ravisseurs  qu’ils ont une grande importance à nos yeux. Par conséquent, les terroristes ne cessent de kidnapper nos proches et nous en demandent toujours davantage.
Pour preuve, pendant une certaine période, les Allemands étaient les principales victimes d’enlèvements. Une seule explication à cela : l’Allemagne payait systématiquement les rançons exigées. A l’opposé, très peu de Russes et d’Israéliens se font enlever car ces pays pratiquent la loi du Talion.  

TF. : Y a-t-il un lien entre ces attentats et l’aversion des islamistes pour les mariages mixtes ?

J.-V. B. : Si les ravisseurs avaient été Nigériens, l’hypothèse aurait mérité qu’on s’y attarde. Mais selon les dernières informations en ma possession, il s’agissait d’hommes ayant la peau claire et parlant arabe. Je ne pense donc pas que la proximité d’une union mixte ait eu une quelconque incidence dans le déroulement de ces événements.

Propos recueillis par Marie-Laure Makouke

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