DSK et Marcela Iacub : quand le sexe devient public

Publié le Lundi 04 Mars 2013
DSK et Marcela Iacub : quand le sexe devient public
DSK et Marcela Iacub : quand le sexe devient public
Cette semaine, notre experte sexo Sophie Bramly s'intéresse au retentissant scandale provoqué par le roman Belle et Bête de Marcela Iacub…
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Les maîtres mots que l'on apprend aux femmes qui pensent ne pas avoir d'orgasmes sont de lâcher prise et d'avoir confiance en elles et en leur partenaire. On ne cesse de répéter que si celui-ci désire, c'est que l'autre convient, tel qu'il est et sans réserve. Si d'un côté on encourage à l'abandon pour augmenter le plaisir sexuel, de l'autre, on assiste à des phénomènes qui, en rendant la sphère privée totalement publique, peuvent rendre le rapport sexuel complexe. D'un côté, les photos crues, nues et vengeresses postées sur Internet par des amants éconduits et, de l'autre, des trahisons industrialisées par des livres auxquels les médias donnent un écho sans pareil, à condition que l'un des protagonistes soit une figure publique. Comme à l'heure actuelle avec Belle et Bête, énième livre sur un DSK que l'on continue de juger.

Si 58% des Français publient des photos personnelles sur des sites, les photos compromettantes concernent selon la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) 27% des Français, et 54% des internautes prennent des photos dans le but de les publier. Au final, ils sont 73% à être inquiets de savoir quels usages feront d'autres personnes de leur image. Si chacun peut montrer ce qu'il veut de sa sexualité, qu'on assiste ou non à une nouvelle forme d'exhibitionnisme ou à la démultiplication des définitions de ce qui est intime, lorsqu'on publie des photos intimes de ses partenaires, ce n'est pas pour louer les talents de l'amant, mais généralement pour le crucifier sur la place publique.

C'est à ce même exercice que vient de se livrer Marcela Iacub livrant force détails sur le goût qu'avait son amant de lécher ou de l'abondance de son sperme, détails dont on peut dire qu'ils ne dépeignent en rien la nature bonne ou mauvaise de l'homme. La presse s'emballe et s'interroge peu sur les intentions de l'auteur. Pourtant, on peut reconnaître, ici et là, des fragilités, un besoin de reconnaissance qui interpelle : « L'avantage avec toi, c'est que tu es intelligente. Comme ça, après les extases, on a quelque chose à dire à la différence de ce qui arrive avec les autres femmes ». Besoin d'être l'élue ? Vulnérabilité ? Premier amour ? Ou simple attitude adolescente ? On pense à un article de Jean-Marc Manach qui avait été publié il y a quelques années dans Le Monde, sur la « génération des transparents », ces enfants des nouvelles générations qui ayant été photographiés dès le stade fœtal ne conçoivent pas de ne pas rendre publique une vie que la génération de leurs parents considèrent comme privée. Il cite un éditorialiste canadien, Josh Freed : « Alors que les enfants cherchent à se rendre invisibles de ceux qui disposent d'un pouvoir direct sur eux (parents, enseignants, etc.), ils s'exposent joyeusement auprès de leurs pairs. » Est-ce là un exercice du même ordre auquel s'est livré Marcela Iacub ?

Il m'aurait plu de traiter aujourd'hui ce qu'aurait été l'attitude des médias s'il y avait eu une inversion des rôles. Imaginons le cas où un individu, ayant eu une relation avec l'une de nos femmes politiques, avait publié un livre relatant avec la même abondance de détails comment elle aime lécher, comment elle manifeste sa jouissance, etc., abordant ainsi sans la nommer la vraie question : quelle est sa puissance sexuelle ? Il aurait alors été intéressant, non pas nécessairement de lire le livre, mais de voir si l'emballement de la presse peut être aussi intense, ou si, à l'inverse, on se serait épanché avec compassion sur le mal fait aux femmes, continuant ainsi l'exercice presque systématique de victimisation...

Quoi qu'il en soit, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes, répondre à l'injonction actuelle de s'abandonner sans réserve pendant l'acte sexuel pour une pleine jouissance, peut quelques fois relever du défi !

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Premier amour