Quand nos dessous étaient l'apanage des hommes

Publié le Mardi 22 Novembre 2011
Quand nos dessous étaient l'apanage des hommes
Quand nos dessous étaient l'apanage des hommes
Aussi étonnant que cela puisse paraître, le talon haut, les bas, le corset et autres pièces de la garde-robe féminine ont d’abord été portés par les hommes et, à une époque où les questions de genres fleurissent, les allers-retours de l’histoire semblent dire que rien n’est jamais aussi « genré » qu’il n'en a l’air. Le point de vue de notre experte Sophie Bramly.
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Le talon était porté par les hommes dans la Grèce Antique, tout comme en Égypte, où il permettait aux bouchers de marcher au-dessus du sang. Les légionnaires romains le portaient pour soulager leurs vertèbres lombaires. Comme il accélérait la marche, les Barbares aussi l’ont adopté. Il a fallu attendre le mariage de Catherine de Médicis avec Henri II pour voir des femmes le porter.

Le bas
est apparu en 1230, pendant la guerre de Cent Ans. Les hommes au Moyen-Âge portaient de sommaires collants, réunion de hauts-de-chausses et de bas de soie. Au XVIe siècle, Voltaire écrivait, mais il était aussi fabricant de bas et ses écrits sur le sujet à la Duchesse de Choiseul sont restés célèbres. C’est seulement vers 1920 que les premiers bas de soie jauge fine ont été spécifiquement à destination des femmes.

Le corset est lui directement issu de l’armure du chevalier. Apparu d’abord pendant la période minoenne (1700 avant J-C), il a disparu jusqu’au Moyen-Âge. Au 16e siècle, en Espagne, il fallait avoir une démarche droite et élégante, la silhouette idéale se devait d’être fine, par conséquent les hommes aussi portaient le corset. Pour eux, il y avait des baleines dans les doublures, pour les femmes, on était plus proche de la cage de fer avec des trous, inspirée de l’armure du chevalier. S’il n’avait plus sa fonction défensive, il servait l’élégance et le pouvoir de l’homme comme il servait l’élégance et la séduction chez la femme, et faisait plier le corps des deux sexes au gré des modes.

Si la Révolution française a libéré les corps de la contrainte, au début du XIXe siècle, la redingote des hommes se devait d’être si cintrée que les tailleurs n’hésitaient pas à la corseter, et certains hommes raffinés portaient le corset en toutes circonstances pour garder une silhouette affinée.

Jusqu’au Moyen-Âge, le sous-vêtement n’avait pas de fonction érotique, ni ne permettait la distinction des classes, il était simplement utilitaire. C’est à la Renaissance que sa fonction évolua et jusqu’au XVIIIe siècle, il servait à la fois à protéger les somptueux vêtements de la saleté du corps et à préserver de tissus trop rugueux. Il indiquait la puissance et la classe sociale des hommes, et était outil de séduction pour les femmes.

Si le sous-vêtement circule d’un sexe à l’autre, il passe aussi de dessous à dessus. C’est le cas de la chemise, de la tunique, du corset, etc. Un vêtement qui passe « au-dessus » oblige à porter son attention à la partie du corps qu’il souligne, avec une motivation érotique, voire même issue du bondage. Révéler les dessous, chez les femmes, c’est aussi révéler l’envie de se dévêtir. Les mots eux-mêmes sont plus courts : si le « pantaloon » (du nom de Saint-Pantaleone, martyr chrétien) devient le « pantalon » pour les hommes, il est « panties » pour les femmes, le diminutif ayant pour fonction d’appuyer l’érotisme.

Ainsi, si les vêtements ont toujours eu pour fonction d’indiquer distinctement les sexes, les vicissitudes de l’histoire du vêtement intime indiquent que les femmes ont régulièrement emprunté aux costumes masculins pour s’affranchir des servitudes et que se dévêtir, jouir de son corps, c’est aussi gagner en liberté …

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