"Terror sex" : ce besoin vital de faire l'amour après l'effroi

Publié le Lundi 30 Novembre 2015
"Terror sex" : un besoin physique vital né de l'effroi
"Terror sex" : un besoin physique vital né de l'effroi
Les attentats du 13 novembre a rendu les dernières semaines éprouvantes. Ceux et celles qui confessent leur fragilité ont versé des larmes, les autres se sont probablement gratté : une réaction épidermique à la situation. Beaucoup ont dû faire l'amour, comme ça avait été le cas à New York, après l'attaque du World Trade Center, le 11 septembre 2001.
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Quelque temps après les cauchemardesques événements du 11 septembre, qui ont fait près de 3 000 morts, les médias se sont rapidement fait l'écho d'une situation étonnante à laquelle ils ont donné un nom : le "terror sex" ou sexe de la terreur. Après l'effroi, les comportements sexuels sont sortis de l'ordinaire et les pulsions ont été décuplées chez tous les New-Yorkais. Certains se souviennent qu'à l'époque il y avait, outre la poussière de cendres qui volait partout, une furieuse énergie sexuelle qui se ressentait, qui n'était pas joyeuse mais vitale, comme un besoin pressant qui ne s'expliquait pas. Ce n'était pas le désir qui s'exprimait, mais le besoin biologique de survivre.

L'instinct de survie

Confrontés à la mort, nous sommes affectés consciemment, inconsciemment et physiquement. Or, la peur engendre des réactions sur les cycles reproductifs. On sait par exemple que lorsqu'une poule a peur, elle pond plus d'oeufs comme si, sentant une mort prochaine possible, il lui fallait au plus vite laisser une descendance la plus abondante possible. Pour l'anthropologue Helen Fisher, de l'Université Rutgers, il y a un mélange d'hormones et de neurochimie qui stimule notre instinct de survie, relevant les niveaux de dopamine et de testostérone, cette dernière étant l'hormone de la libido. Elle avait relevé le même phénomène après le violent tremblement de terre de Northridge en Californie, en 1994, qui avait fait plusieurs dizaines de morts et plus de 5.000 blessés.

Si la presse américaine a divergé sur l'augmentation du nombre des naissances neuf mois après les événements, personne n'a contesté que le besoin de s'accoupler a été hors norme, avec des successions de comportements imprévus. Certains ont fait l'amour dans l'urgence, une façon pour eux de ne pas accorder de victoire aux terroristes : la vie est plus forte que la mort. D'autres ont éprouvé le besoin de se mettre en danger en faisant l'amour avec des inconnus croisés dans la rue. Des couples séparés se sont cherchés et retrouvés. Des personnes timides, incapables de déclarer leur flamme, se sont décidés à oser dire leurs sentiments. D'autres, à l'inverse, ont décidé de divorcer. Dans tous les cas, il y avait ce même sentiment d'une vie courte dont il faut profiter, qui a prévalu sur un quotidien d'habitude plus conciliant ou paresseux, comme si les choses se réglaient d'elle-mêmes, avec le temps...

La réassurance par le sexe d'être bien vivant

Quelle que soit la manière dont les gens ont fait l'amour à ce moment-là, il était moins question d'orgasmes, de performances sexuelles, d'apparences sauvegardées (même si certains magasins de sextoys ont vu leur chiffre d'affaire augmenter de 33% dans les semaines qui ont suivi), que de toucher l'autre, d'être touché, d'avoir la réassurance d'être bien vivant, d'échapper à la noirceur du moment, de garder espoir en la vie aussi.

Rien ne rapproche plus les humains que le sexe, et l'intimité sexuelle est aussi l'expression bien vivante de l'intimité émotionnelle.