Quelles sont les phobies qui apparaissent en hiver (et comment en venir à bout) ?

Publié le Dimanche 04 Décembre 2022
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Cryophobie, chionophobie... Il existe des peurs qui surgissent en hiver. Comment apprendre à les dompter ou aider une personne qui en souffre ? Voici les conseils d'une psy.
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Vous serez peut-être surpris·e d'apprendre qu'il existe des phobies spécifiques à l'hiver. Les phobies ? Ce sont ces peurs incontrôlées qu'il ne faut surtout pas associer à des caprices ou des exagérations. Elles sont bien réelles, ancrées, invalidantes. Elles ne peuvent pas être contrôlées juste en se raisonnant ou en les ignorant. Elles sont tellement importantes et envahissantes qu'elles perturbent le quotidien de la personne qui en est alors la victime.

Nous nous intéressons aux phobies liées directement à l'hiver. Il y en a de deux sortes. Les premières apparaissent uniquement en hiver et disparaissent au retour des beaux jours. Il s'agit, par exemple, de la chionophobie, c'est-à-dire la peur de la neige et des conditions climatiques extrêmes.

Il existe également la cryophobie, la peur du froid (aller dans le froid ou toucher un objet froid), la glacophobie, la peur de la glace ou du gel, et encore l'anémophobie, la peur du vent et de l'air. Ces phobies, liées aux conditions climatiques de l'hiver, peuvent atteindre essentiellement des personnes ayant vécu dans des milieux chauds et arrivant dans des pays froids. Elles sont très invalidantes car elles peuvent priver la personne de toute possibilité de sortie du domicile, et ainsi de travail, vie sociale et même gestion du quotidien (comme faire ses courses).

La deuxième catégorie de phobies de l'hiver existe toute l'année mais est amplifiée pendant l'hiver. Ainsi, l'émétophobie est la peur de vomir et la mysophobie est la peur des germes et maladies. Ces deux phobies seront gérables pendant les beaux jours où les risques de maladie sont moindres. Le handicap dans le quotidien de la personne est vraiment important pendant l'hiver. Ces phobies sont devenues beaucoup plus fréquentes depuis la crise de la Covid-19 où la peur de la maladie a été largement généralisée, donnant du crédit à ces phobies qui sont généralisées à toutes les maladies.

Que faire si l'on souffre de phobies ?

Les phobies, quelles qu'elles soient, ne se commandent pas, ne se décident pas. Se faire des promesses, à l'image des résolutions de l'année, se forcer, être confronté de manière immersive à l'objet de la phobie est inutile, voire même violent et ajoute au traumatisme déjà présent.

La thérapie cognitivo-comportementale suggère plutôt de suivre un protocole rigoureux pour entrer en contact avec l'objet ou la situation phobique. Si la personne a peur de la neige (chionophobie), elle va choisir une situation qui est tout juste supportable pour elle. Elle peut d'abord, par exemple, travailler autour d'images représentant la neige. Ces images vont soulever un certain niveau d'angoisse, qui, avec des techniques de gestion du stress, va diminuer petit à petit. Quand la vue de ces images ne provoque plus d'angoisse ou de stress, en d'autres termes, quand la personne phobique a été en partie désensibilisée, elle va travailler avec une autre situation qui provoque toujours de l'angoisse. Par exemple, elle peut commencer à se confronter à la neige, par la fenêtre. La simple vue de la neige soulève dès lors un certain niveau d'angoisse qui va être à nouveau désensibilisé. Et ainsi de suite.


L'EMDR est une technique récente et qui est très efficace face à ces difficultés. C'est une psychothérapie qui, en s'appuyant sur les mouvements des yeux, permet de désensibiliser et reprogrammer des situations traumatisantes et générant du stress. En évoquant l'objet de la phobie, tout en sollicitant le cerveau par les mouvements oculaires, l'angoisse va naturellement diminuer, pour progressivement disparaître.


Ces deux types de psychothérapie doivent impérativement être combinées avec une psychothérapie de fond. En effet, la thérapie cognitivo-comportementaliste et l'EMDR vont avoir un effet direct sur les symptômes et alléger considérablement la souffrance de la personne victime de phobie. En revanche, elles ne vont pas permettre d'avoir une compréhension de l'origine de ces symptômes. Sans cette compréhension et surtout sans la guérison des blessures psychiques à la racine de ces symptômes, ceux-ci risquent, soit de revenir après un certain temps, soit de se transformer en d'autres symptômes.

Il faut considérer les symptômes comme des sonnettes d'alarme d'un mal-être profond, de blessures anciennes ou récentes non cicatrisées, non reconnues, non guéries. Venir à la source du problème est libérateur et permet une guérison totale et pérenne. Ce travail de fond peut être réalisé auprès d'un psychologue ou d'un thérapeute formé en développement personnel.


En somme, les phobies de l'hiver existent bel et bien et sont très invalidantes, allant jusqu'à une rupture de lien social et une incapacité à travailler. Il est essentiel de les prendre en charge avec un travail de guérison pour, d'une part, alléger le quotidien et, d'autre part, guérir les blessures du passé à l'origine de ces symptômes.

Par Ségolène Hartz, psychologue, membre du comité Psychologue.net.

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