





Sabrina Carpenter adore le cinéma.
Et en émaille à grands coups de vidéoclip son univers multi référentiel. Qu'elle se révère aux légendes de l'imaginaire pin up et cligne de l'oeil aux grandes divas et "bimbos" du septième art, de sa garde robe (constituée de lingerie à ses mimiques dévoilées sur scène (on pense autant à Marilyn qu'à Anna Nicole Smuth)... Ou qu'elle délivre de vrais moments de septième art comme à travers le clip de Taste où, aux côtés de Jenna Ortega, elle rend hommage à la comédie noire de Robert Zemeckis, La mort vous va si bien, entre deux baisers lesbiens.
Une marche est de nouveau franchie avec la toute dernière vidéo de la plus influente popstar du moment : Sabrina Carpenter tease effectivement son futur clip en apparaissant en plein désert américain, vêtue d'un mini short en jeans et d'un t shirt blanc très léger, en train de faire du stop... Cela vous dit quelque chose ?
Cette scène n'éclot pas de rien : c'est encore une révérence à un film culte... Pas le plus fédérateur cependant : une oeuvre très sulfureuse et provocatrice, très incomprise surtout, hyper sexuelle et virulente... Considérée comme la pire des années 90. A tort !
Ce film, c'est naturellement Showgirls.
L'histoire d'une jeune femme qui, effectivement, fait du stop et se retrouve danseuse à Las Vegas, aux côtés de consoeurs alternant saillies acerbes et chorégraphies endiablées (dont Gina Gerson, révélation du très hot Bound). Une satire d'Hollywood en fait, du monde du spectacle, acerbe, ironique et ouvertement obscène...
On vient là de résumer le style de son auteur : Paul Verhoeven, cinéaste hollandais alors auréolé à l'époque du mégasuccès de Basic Instinct, autre source de controverses diverses. Et qui va sévèrement se faire réprimander pour avoir osé un morceau d'entertainement aussi cul et cru que Showgirls.
Incompris, considéré par la critique comme un vulgaire film de fesses, voire un nanar intersidéral débilitant dans ses dialogues comme dans le jeu de ses comédiens, Showgirls est le film le plus haï des années 90. Sa réception catastrophique, sacrée par les Razzie Awards, les Oscars du pire, a détruit à jamais la carrière de son actrice principale, Elizabeth Berkley.
Le film était certainement trop honnête dans son déferlement de sexe, et trop vindicatif dans sa virulence - sa violence inattendue renvoyant les machos venus se rincer l'oeil à l'autre bout du ring. Le regard masculin, libidineux, qui sexualise et objectifie, est complètement "à nu" dans Showgirls, qui s'en joue pour mieux le fustiger.
Sabrina Carpenter rend hommage à Showgirls et c'est tout un symbole : elle aussi est volontiers source de railleries, de réflexions sexistes, considérée comme une artiste sans fond et superficielle, et surtout, hyper critiquée pour la sexualisation de ses chorégraphies : lorsqu'elle dévoile ses "Juno poses", où la chanteuse performe sa chanson "Juno" en mimant des positions sexuelles.
C'est dire si les numéros très impressionnants du film Showgirls n'échappent pas à son regard méticuleux. Et si la misogynie dont Elizabeth Berkley a pu faire l'objet ne la laisse guère indifférente non plus. Comédienne totalement investie dans ce rôle très physique et risquée, dans un film qui évoque frontalement les violences patriarcales (notamment l'espace d'une scène de viol)... Et qui sera elle-même sujette à ce sexisme systémique dont Showgirls se joue avec une véhémence décomplexée, via les attaques de la critique et de l'audience ! Triste ironie.
Aujourd'hui, Showgirls est enfin réhabilité.
Et que l'une des chanteuses les plus fédératrices de la planète lui fasse honneur en dit long sur cette évolution.