Coup de projecteur à Paris : les militants décomplexés du Front de Gauche

Publié le Vendredi 20 Avril 2012
Coup de projecteur à Paris : les militants décomplexés du Front de Gauche
Coup de projecteur à Paris : les militants décomplexés du Front de Gauche
Jean-Luc Mélenchon est sans conteste la grande surprise de cette campagne et son ascension fulgurante dans les sondages a éveillé un espoir de victoire pour la gauche de la gauche. A quelques jours du premier tour, les militants du Front de Gauche jettent leurs dernières forces dans la bataille électorale sur le terrain. Tractage, criées dans le métro, marchés, réunions publiques : reportage à Paris auprès de ces gauchistes engagés.
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« Bonjour, c’est le Front de Gauche », entonne Danielle Simonnet, conseillère de Paris, en entrant dans la rame de métro. Il est 9h, les visages sont encore un peu tirés, mais l’élue du 20e arrondissement de Paris, secrétaire nationale du Parti de Gauche, tient une forme olympique et n’hésite pas à donner de la voix pour se faire entendre. « Il faut être un peu comédien pour être militant », confie-t-elle avec ce sourire dont elle semble ne jamais se départir. Dans la dernière ligne droite avant le premier tour, chaque électeur mobilisé est une victoire et les criées organisées dans le métro ont pour objectif de pousser les Français vers les urnes. Suivie d’une dizaine de militants volontaires, dont Sylvie, cosecrétaire du comité Paris 20e du Parti de Gauche, et l’actrice Sophie de la Rochefoucauld, suppléante du candidat Didier Le Reste dans la 15e circonscription de Paris, Danielle Simonnet va de rame en rame, clamant un discours sous forme de petits sketchs anti-droite qui appellent à la mobilisation derrière Jean-Luc Mélenchon, le candidat du « Smic à 1700 euros, de la planification économique, de la répartition des richesses ».

Se faire entendre au 1er tour

« On se mobilise tous le 22 avril, on ne reste pas à la maison », interpellent les militants tout en distribuant leurs tracts aux usagers du métro. La verve et l’enthousiasme de ces partisans, qui veulent encore croire à un passage au second tour, suscitent sourire de soutien ou léger agacement dans les wagons. A un passager qui déclare voter Hollande, Danielle rétorque « ah non, il faut se faire entendre au 1er tour ! » « J’ai rencontré beaucoup de personnes qui lors des séances de porte-à-porte ou sur les marchés me disent vouloir voter utile en donnant leur voix aux socialistes à la présidentielle, mais qui comptent voter pour le Front de Gauche aux législatives », confie-t-elle. Et si les législatives sont le second round de la bataille, les partisans de Jean-Luc Mélenchon veulent mener le marathon de la présidentielle jusqu’au bout. « Le second tour n’est pas encore plié », souligne une militante.

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« Si ce n’est pas pour cette fois, ce sera pour dans cinq ans ! »

Après la virée dans le métro, le petit groupe se sépare. Direction le marché de Belleville dans le 11e arrondissement, à la frontière du 20e arrondissement, pour trois militants. Dans ce quartier populaire, ils croisent de nombreux habitants qui n’ont pas le droit de vote, « mais ils ont souvent des enfants qui eux peuvent voter et à qui ils transmettent les tracts que nous leur distribuons », explique Sophie de la Rochefoucauld. L’accueil des commerçants est plutôt positif. Aux militants qui se promènent entre les étals en appelant à voter « pour battre Marine Le Pen au 1er tour », le poissonnier lance « Mélenchon a la cote cette année » tandis qu’une commerçante encourage les partisans d’un « bonne chance ! Il faut se battre, si ce n’est pas pour cette fois, ce sera pour dans cinq ans ! » Un avis que partage Michaël, 25 ans, ancien militant NPA, qui a rallié les rangs du Front de Gauche après le « mouvement populaire suscité par le rassemblement de la Bastille », le 18 mars dernier. « L’objectif est aussi de préparer l’avenir, l’après-présidentielle. Le pouvoir n’est pas quelque chose que l’on possède, c’est un rapport de force permanent à construire par des mobilisations », analyse-t-il, avant de concéder que les élections restent « un moment important car l’on somme les gens de s’intéresser à la politique ». « Les gens qui souffrent le plus des inégalités se foutent généralement de la politique et sont complètement désemparés », souligne-t-il. Quand on lui demande s’il y croit, Michaël se veut réaliste, mais aime à s’accrocher à l’espoir qu’a fait naître son candidat : « on peut gagner, nos idées sont justes, profondément humaines, le système marche sur la tête et il faut en changer », lance-t-il.

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L’enjeu des législatives

Le soir même, rendez-vous est donné dans un bar de Belleville. Une quinzaine de militants sont réunis autour de Danielle Simonnet pour une « écoute collective » de l’émission Parole directe sur TF1 à laquelle Jean-Luc Mélenchon est invité. Silence dans la salle, chacun écoute avec concentration et intérêt le leader du Front de Gauche. A la fin de l’intervention d’une dizaine de minutes, Mme Simonnet prend la parole : « une émission rapide mais condensée » commente-t-elle avant de lancer un débat qui tourne vite autour des législatives. « Il faut qu’il y ait un message fort sur cet enjeu, afin d’obtenir un groupe Front de Gauche le plus important possible à l’Assemblée nationale », avance l’élue. « Si on arrive à avoir une forte proportion au sein de l’Assemblée, là on pourrait vraiment peser sur les lois », approuve un militant.

Ne pas aller vers un militantisme professionnel

La discussion porte rapidement sur l’avenir du Front de Gauche. « Pour moi l’intérêt de cette campagne est qu’avec le Front de Gauche est né un mouvement politique et populaire nouveau, il n’est pas seulement question de soutenir un candidat et un programme », commente Raphaël, jeune militant âgé de 35 ans. Ce dernier rappelle qu’« en 1871 la Commune de Paris s’est faite aussi à partir de débats qui avaient pris naissance dans des lieux de discussion où se forge l’opinion politique populaire». « Si les élections sont un moment essentiel, les échanges d’idées qui ont lieu en dehors de la campagne sont tout aussi fondamentaux », insiste-t-il avant de soutenir : « tout comme on ne veut pas des professionnels de la politique, il ne faut pas non plus aller vers un militantisme professionnel ». Alors que tous échangent leurs idées, un petit groupe de clients et d’habitués du bar se rapprochent pour regarder le match de foot diffusé ce soir-là et qui a succédé à Jean-Luc Mélenchon à l’écran. « Et le match qui permet de virer Sarkozy, c’est intéressant ça aussi », sourit Danielle Simonnet.

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