Égalité : "Lutter contre la précarité professionnelle des femmes"
Publié le 27 novembre 2012 à 11:42
Par Marion Roucheux
Promesse de campagne de François Hollande, la lutte contre les stéréotypes et les violences de genre a fait l'objet de plusieurs mesures ces derniers mois. Christophe Sirugue, vice-président de l'Assemblée nationale et rapporteur budgétaire sur la mission solidarité, dresse un premier bilan et fait part de ses attentes vis-à-vis du premier Comité interministériel aux Droits des femmes organisé depuis dix ans.
Égalité : "Lutter contre la précarité professionnelle des femmes" Égalité : "Lutter contre la précarité professionnelle des femmes"© AFP
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Terrafemina : Dans un rapport rendu public le 12 novembre dernier, vous revenez sur les avancées en matière de lutte contre les stéréotypes et les violences de genre. Quel bilan dressez-vous à mi-parcours ?

Christophe Sirugue : Il y a un vrai progrès dans l’accompagnement des femmes qui sont dans des situations de fragilité, que ce soit au travail ou dans leur vie familiale et quelles que soient les violences qui leur sont faites : c’est l’aspect positif aujourd’hui. Mais il y a également encore des points négatifs. Par exemple, la multiplication des structures et des associations qui prennent en charge ces femmes victimes et assurent leur suivi entraîne un manque de visibilité. Il y a quelques semaines, je dénonçais ainsi la multiplication des plates-formes téléphoniques d’urgence, qui peuvent créer la confusion auprès des femmes concernées, et je proposais de mener une réflexion sur la possibilité de mettre en place un numéro unique. Je ne suis pas sûr en effet que les femmes en difficultés sachent s’y retrouver parmi toutes ces structures mises en place pour les accompagner.

Tf : Une autre question que vous posez par rapport à ces plates-formes est celle de leur évaluation.

C. S. : Oui, il est difficile aujourd’hui de savoir comment mesurer l’efficacité de ces plates-formes, dont vont dépendre les subventions qu’elles recevront : faut-il les noter en fonction du nombre d’appels qu’elles reçoivent, du nombre d’appels auxquels elles répondent ou du nombre d’appels qui donnent lieu à un suivi ? Il peut y avoir des plates-formes dont l’intérêt est de recevoir un grand nombre d’appels avec peu de suivi derrière alors que d’autres au contraire ont pour mission d’assurer une prise en charge des femmes qui les contactent. Il me paraît donc utile de mettre à plat l’évaluation de ces plates-formes et que les outils d’évaluation soient les mêmes pour toutes, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Tf : Vous vous prononcez également pour un vrai partenariat avec les acteurs de terrain. Quel bilan dressez-vous aujourd’hui sur ce point ?

C. S. : Je fais le constat d’une vraie disparité territoriale : dans les grandes villes ou les zones urbaines, les structures de suivi et d’accompagnement des femmes victimes se sont multipliées. En revanche, les zones rurales sont toujours en manque de structures adéquates. On doit également se poser la question du rôle des délégués départementaux aux droits des femmes : ils sont les relais locaux auprès des préfets de tout ce qui concerne la protection et la défense des droits des femmes, et il paraît essentiel de réinitier une réflexion sur leur rôle, ce qu’a d’ailleurs demandé la présidente de la Délégation de l’Assemblée nationale aux Droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Catherine Coutelle.

Tf : Qu’attendez-vous du Comité interministériel aux Droits des femmes qui aura lieu vendredi prochain ?

C.S. : On peut espérer qu’avec le caractère interministériel du travail mené par la ministre Najat Vallaud-Belkacem, le travail de ces délégués départementaux soit revalorisé. Au-delà de cette question, le fait que ce comité interministériel soit réactivé après dix ans est une chose très positive, tout comme le fait que ce soit une vraie volonté du Premier ministre de le faire fonctionner. Il a ainsi été demandé à ce que dans chaque ministère soit nommé un référent administratif aux droits des femmes ainsi qu’un référent supplémentaire dans chaque cabinet ministériel. Cela me paraît être le gage d’une vraie volonté politique. On sent qu’il y a une réelle préoccupation d’intégrer dans les textes de loi cette problématique de genre. Et le fait que l’on ait à nouveau un ministère de plein droit réactive cette prise de conscience.

Tf : Dans votre rapport, vous affirmez que « la prise en compte systématique des questions du genre pour chaque projet de loi élaboré » est essentielle. Avez-vous des exemples de projets de loi à venir qui suivent cette ligne de conduite ?

C. S. : Je travaille sur le projet de loi du contrat de génération. Or, dès les prémices du texte, dans les objectifs qui ont été déterminés, figurait spontanément la volonté de respecter l’égalité hommes-femmes. Je ne pense pas que cela aurait été le cas il y a quelques mois, comme lorsque par exemple nous travaillions au texte des emplois d’avenir, dans lequel il a fallu ajouter au cours des discussions le volet égalité hommes-femmes.

Tf : Quelles sont les prochaines priorités du gouvernement en matière d’égalité hommes-femmes ?

C. S. : La ministre des Droits des femmes travaille actuellement à un projet de loi sur l’égalité professionnelle hommes-femmes, une mesure indispensable à mes yeux. J’ai d’ailleurs été le premier signataire d’une proposition de loi en octobre 2011 sur la précarité professionnelle des femmes : 80% des travailleurs pauvres sont en réalité des travailleuses pauvres. Face à ces chiffres, il est urgent qu’une loi se saisisse de la lutte contre la précarité professionnelle des femmes. Mme Vallaud-Belkacem nous a ainsi promis une proposition de texte en ce sens pour le premier semestre 2013.

Crédit photo : AFP

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