Pourquoi nous devrions arrêter de parler des "nausées matinales"

Publié le Mardi 07 Juillet 2020
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Pourquoi on devrait arrêter de parler de "nausées matinales"
Pourquoi on devrait arrêter de parler de "nausées matinales"
Si les femmes enceintes ont fréquemment envie de vomir le matin, le phénomène s'étale souvent tout au long de la journée. A la place de "nausées matinales", des médecins préfèrent un autre terme : NVG.
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Le terme est très populaire. Au point que l'on pense qu'il définit exactement ce qui se passe pendant la grossesse : le fait d'avoir mal au coeur, le matin uniquement. Seulement celles qui ont vécu ces neuf mois bouleversants (dans tous les sens) pourront s'accorder à dire que, souvent, les nausées n'ont rien de "matinales". Et dans certains cas, elles durent même tout au long de la journée, s'accompagnant d'un goût de fer qui rend le moindre aliment difficilement comestible, et ne parlons pas de l'eau plate.

Pour y voir plus clair, et surtout normaliser le phénomène plus large qu'un passage aux toilettes en se levant, une étude britannique menée par l'école de médecine de l'Université de Warwick s'est récemment penchée sur les fameuses "nausées matinales". Les chercheur·se·s ont interrogé 256 femmes enceintes, auxquelles ils et elles ont demandé de tenir un "journal de symptômes".

Bilan : si les vomissements ont plus de chances de se produire entre 7 heures et 13 heures, des nausées et des hauts le coeur peuvent survenir tout au long de la journée. Plus précisément : 94 % des participantes ont déclaré avoir eu des nausées ou des vomissements, tandis que 58 % ont déclaré avoir eu les deux.

"NVG" plutôt que "nausées matinales"

De quoi donner matière à sérieusement repenser l'expression "nausées matinales". Car au-delà d'être inexacte, elle peut prêter à inquiétude. Le professeur Roger Gadsby, co-auteur de l'étude, explique ainsi que "les nausées matinales sont largement utilisées par le grand public, les médias et même les professionnels de la santé, mais elles ne donnent pas une description précise".

Il prévient des dérives que cela peut causer : "Si une femme enceinte est malade l'après-midi, elle peut penser que c'est inhabituel et mal, ou si elle ne vomit pas mais a des nausées toute la journée, elle peut penser qu'elle n'est pas couverte par le terme 'nausées matinales'. Et les femmes qui présentent de graves symptômes ont le sentiment que cela banalise leur état".

A la place, l'équipe de scientifiques propose de troquer "nausées matinales" contre "NVG" pour "nausées et vomissements durant la grossesse". Et le Dr Gadsby insiste sur le fait que cette condition a parfois "un impact négatif important sur la vie des personnes qui en souffrent. Elle peut provoquer des sentiments de dépression, d'incapacité à s'occuper de la famille et de perte de temps de travail rémunéré", assure le spécialiste.

"Les NVG très sévères, appelés hyperémèse gravidique (HG), sont la cause la plus fréquente d'admission à l'hôpital au cours du premier trimestre de la grossesse". Et pour ces raisons, conclut-il, il ne faut jamais les prendre à la légère. Et les nommer correctement.