Ils ont refusé d'inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution : le revirement des députés LREM

Publié le Lundi 27 Juin 2022
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Ce samedi 25 juin, les député·es macronistes ont annoncé vouloir inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution. En 2018 pourtant, ils avaient voté contre.
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Alors que la Cour suprême des Etats-Unis vient de révoquer l'arrêt Roe v. Wade, qui garantissait le droit à l'avortement dans chaque Etat, le groupe Renaissance (ex-LREM) a annoncé une proposition de loi pour l'inscrire dans la constitution française. Une décision qui aurait pu être uniquement louable... si elle n'avait pas un goût d'opportunisme.

Comme le rappelle Bastien Lachaud, député LFI de Seine-Saint-Denis, les efforts de la gauche pour rendre le droit à l'IVG inaliénable ne datent effectivement pas d'hier. "LREM avait refusé l'inscription du droit à l'IVG dans la Constitution en 2018 lorsque La France insoumise l'avait proposé", écrit-il sur Twitter.

Lors de la précédente législature, un tel projet avait déjà été porté non pas une, mais deux fois par l'opposition. En 2018, où il a été retoqué par la majorité : "Au total, 145 députés votent contre (37 pour, 14 abstention). Parmi eux, figurent 100 élus LREM, dont Gabriel Attal (actuel ministre du Budget), Brigitte Bourguignon (ministre de la Santé) ou encore Olivia Grégoire (porte-parole du gouvernement)", note Franceinfo. Puis en 2019, où il n'a pas été inscrit à l'ordre du jour.

"Si notre travail peut servir maintenant, c'est très bien"

"Cette protection passe par un combat de tous les instants dans nos politiques publiques et dans notre législation, ainsi que par une veille attentive au respect de ces droits, et non par leur inscription dans la Constitution, qui n'est ni nécessaire ni utile", réagissait à l'époque Yaël Braun-Pivet, qui a quitté son poste de ministre des Outre-mer afin de prendre la présidente de l'Assemblée nationale. Des propos qu'appuyaient à son tour la garde des Sceaux de l'époque, Nicole Belloubet : "Nous avons un droit suffisamment garanti, reconnu par le Conseil constitutionnel comme une composante de la liberté de la femme".

Malgré les différends passés, un consensus pourrait être obtenu aujourd'hui. Ce qui ne manque pas d'amuser les député·es de gauche. Clémentine Autain parle ainsi d'"un revirement bienvenu" car "le droit à l'IVG est un droit fondamental". "Mieux vaut tard que jamais", lance un autre parlementaire LFI auprès de Franceinfo. "Mais ce qui m'embête davantage, c'est le côté récupérateur."

L'ex-député socialiste et membre de la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes Luc Carvounas ironise de son côté dans les colonnes du média : "Je vois qu'on reprend notre idée... Si les députés de la majorité le souhaitent, le texte est prêt, il est dans les cartons. Je ne veux pas rentrer dans une polémique : si notre travail peut servir maintenant, c'est très bien".

Comme un rappel indispensable que ce sujet doit absolument dépasser les rivalités politiques, le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes souligne "l'urgence", et exhorte à "inscrire le droit à l'avortement dans notre constitution française, pour le reconnaître enfin comme un droit fondamental et humain", ainsi que "dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que l'a annoncé le Président de la République le 19 janvier 2022."

Ce, "pour se prémunir de toute tentative d'entrave des droits des femmes", qui sont tragiquement réelles.