L'Amour est-il dans le pré... ou au supermarché ?

Publié le Mardi 09 Juillet 2013
L'Amour est-il dans le pré... ou au supermarché ?
L'Amour est-il dans le pré... ou au supermarché ?
Depuis huit saisons que cartonne l’Amour est dans le pré sur nos écrans, un mystère demeure. Après les portraits, les lettres et le célèbre « spidéting’ », la scène du supermarché demeure un classique de l’émission. Pourtant, cet épisode, si drôle soit-il, ne serait-il pas emprunt d’un certain sexisme ? Analyse.
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Les courses au supermarché dans « L’Amour est dans le pré » s’avèrent être, à chaque saison, de grands moments de télévision. Alors que les malheureux agriculteurs errent avec panique dans les grands rayons de leurs hypers, antres angoissantes de la grande consommation, agrippés à leurs caddies comme des moules à leurs rochers, la ou les prétendantes s’écharpent bien souvent devant les fruits et légumes, le café ou les yaourts aux fruits.

Il est cependant très étonnant de constater que nos gros bébés, bien souvent nourris-logés-blanchis par môman en attendant la « perle rare » qui s’adonnera gratos à ces tâches domestiques en plus de donner une descendance au vieux garçon, attendent systématiquement la venue des prétendantes pour prendre leur voiture (sale) et se rendre au supermarché. Soyons sérieux, laquelle d’entre nous ne serait pas surprise, alors qu’elle est invitée à dîner chez un homme, de foncer à peine le seuil franchi fureter dans les rayons glacés des produits frais, voire des conserves, pour décider ensemble si petits-pois carottes et fruits au sirop (qu’elle préparera par ailleurs certainement) feront bon ménage ?

Certes, quelques femmes ont, depuis huit ans, été ajoutées au casting, et ne rechignent pas à suivre les consignes de la prod’, laquelle semble conseiller à ses candidats cette technique de drague bien particulière qui consiste à emmener en balade à l’Intermarché ses hôtes dès leur arrivée. Pourtant, ces saynètes, si amusantes soient-elles, mettent malheureusement en exergue les inégalités ménagères constatées par les chiffres toujours alarmants distillés chaque année par les différentes études consacrées aux répartitions des tâches domestiques selon les sexes dans les foyers français.

Alors que les hommes se consacrent plus volontiers au bricolage, au jardinage ou au soin des animaux, courses, ménage, linge et autres réjouissances sont encore et toujours dévolues au sexe dit « faible » (sauf pour Françoise, maîtresse ès massacre à la tronçonneuse), qui s’y adonne plus de 3 heures quotidiennement contre une petite heure pour son homologue masculin.

"C'est maman qui fait les courses, moi je pousse le caddie"

Pour preuve, Jean-Louis avouant tout de go : « C’est maman qui fait les courses, moi je pousse le caddie », ou Philippe, pauvre petite chose perdue dans les allées, pour une « balade au supermarché » qui permettra à Jackie de se rendre compte à quel point il est « tête en l’air » (bha oui, il faisait, de son propre aveu, « les courses pour la première fois de [sa] vie »). Chez Damien et Elodie, c’est bien simple, c’est madame qui prend possession du caddie (normal !), qu’elle remplit allègrement, sans compter (aaah, les femmes et le shopping !), allant jusqu’à y coller des moules à cakes et un four à micro-ondes, des litrons de lait stérilisé UHT (logique, pour un agriculteur) avant de se ruer vers le rayon DVD pour compléter ses emplettes. Nathalie et Sandrine, quant à elles, s’écharperont sur fond de tarte aux pommes contre crêpes, cherchant à mettre en avant leurs talents de ménagères pour mieux conquérir leur promis.

Les tâches ménagères, 3e cause de séparation des couples

L’Amour serait-il donc dans un supermarché ? Le premier rancard, en tous cas, semble devoir s’y dérouler quoi qu’il advienne. Quant au fait que, dans une émission terroir censée vanter le produit naturel autant que le bon air de la campagne, nos protagonistes fassent leurs courses à l’hyper et semblent se nourrir exclusivement de surgelés, de champignons en boîte et même de pain en papier crépon conditionné sous vide, il semble que ça ne choque personne.
Pas les prétendantes, en tous cas, qui paraissent fondre littéralement à chacune de ces romantiques sorties suivies d’un petit passage en cuisine pour préparer la popote, test ultime avant validation finale pour potentielles épousailles. Serait-ce si sot, alors qu'on constate que les tâches ménagères seraient la troisième cause de séparationdes couples ? Et s'il était réellement plus urgent de tester sa "domestico-compatibilité" que son entente sexuelle (cause de 7% des ruptures seulement) ?

Une consolation ? Selon une récente étude, plus un homme ferait les courses et le ménage, moins il aurait de relations sexuelles... Vous êtes en 2013 et vous regardez trop la télévision.