Entrepreneuriat féminin : "Nous devons modifier les représentations dès le plus jeune âge"

Publié le Jeudi 16 Mai 2013
Entrepreneuriat féminin : "Nous devons modifier les représentations dès le plus jeune âge"
Entrepreneuriat féminin : "Nous devons modifier les représentations dès le plus jeune âge"
Alors que seuls 30% des entrepreneurs en France sont des femmes, Najat Vallaud-Belkacem a lancé lundi une semaine de sensibilisation des jeunes à cette question. Mais quels sont les freins qui empêchent les femmes d'entreprendre et comment les lever ? Nous avons posé la question à Claire Bernard, co-auteure, avec Caroline Le Moigne et Jean-Paul Nicolaï, d'un rapport sur l'entrepreneuriat féminin pour le Centre d'analyse stratégique.
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Terrafemina : Les motivations des hommes et des femmes à créer une entreprise sont-elle identiques ? Quelles sont-elles ?

Claire Bernard : Les motivations à la création d’entreprise diffèrent peu entre hommes et femmes selon la plupart des études. Au niveau européen, l’enquête de 2006 Factors of Business Success (Schrör, 2006) indiquait que les trois principales motivations étaient très voisines entre hommes et femmes : l’indépendance (73,6% chez les femmes, 75,7% chez les hommes), la perspective de gagner plus d’argent (respectivement 70,6% et 73,4%) et la recherche de nouvelles aventures (respectivement 67,2% et 68,0%). Le déficit constaté du côté féminin, pour chaque item, se retrouvait avec une dominante sur « éviter le chômage », « concilier vie de famille et vie professionnelle » et « âge des enfants ». Mais, au-delà de ce constat, la vraie question est surtout de se demander, étant donné leur place actuelle dans la société, si les femmes ont autant accès à l’entrepreneuriat que les hommes ?

Tf : Justement, quels sont les freins à l’entrepreneuriat féminin ?

C. B. : En France, comme dans le monde, la part des femmes prêtes à créer une entreprise est plus faible que celle des hommes. Elles sont 15% contre 20% des hommes. Et cette différence s’explique par plusieurs freins. Le premier est contextuel, les femmes sont moins diplômées dans les secteurs d’où sortent la plupart des créateurs d’entreprise (école d’ingénieurs, de commerce…) et elles ont aussi moins de capacités financières parce qu’elles sont souvent moins payées. Le deuxième est beaucoup plus subjectif. Sur la totalité des femmes qui ont l’intention de créer une entreprise, 37,9% ont peur d’échouer contre 29,9% des hommes. Elles ont aussi plus d’aversion pour le risque. Sur celles qui n’ont pas entrepris, 10% déclarent aimer prendre des risques contre 17% des hommes. Enfin, le troisième frein est celui du financement. C’est en tout cas le discours que nous avons pu entendre. Nous savons seulement qu’au moment de la création, les femmes ont autant de difficultés que les hommes à obtenir un prêt mais nous ne savons identifier, pour l’instant, ni l’avant, ni l’après sur cette question.

Tf : Comment lutter contre ces freins ? Que proposez-vous ?

C. B. : Pour le frein subjectif, nous devons avant tout modifier les représentations et amener à l’entrepreneuriat dès le plus jeune âge. Il faut que les jeunes filles intègrent la possibilité d’entreprendre dans le futur. On sait qu’aujourd’hui, elles se censurent encore dans beaucoup de matières. Pour le volet contextuel, il s’agit plutôt d’offrir l’expérience d’entreprendre, ou du moins d’être formés à certains de ces aspects (comme le business plan par exemple) ailleurs que dans les formations spécialisées. Certaines disciplines transverses pourraient tout à fait proposer ce type d’enseignement. Enfin, en ce qui concerne les questions de financement, nous souhaitons pour l’instant améliorer la mesure de ces difficultés, en obtenant par exemple, des chiffres genrés des taux de refus bancaires…

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