Violences contre les femmes en Afghanistan : Sima Samar veut réveiller les consciences

Publié le Jeudi 19 Juillet 2012
Violences contre les femmes en Afghanistan : Sima Samar veut réveiller les consciences
Violences contre les femmes en Afghanistan : Sima Samar veut réveiller les consciences
Jour après jour, la condition des femmes se dégrade en Afghanistan. Alors que le 9 juillet dernier, une jeune femme de 22 ans soupçonnée d’adultère était froidement exécutée en pleine rue, quatre jours plus tard, c’est une responsable régionale des droits des femmes qui était tuée dans un attentat à la voiture piégée. Sima Samar, présidente de la Commission indépendante pour les droits de l’Homme en Afghanistan, revient sur ces événements tragiques. Interview.
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Terrafemina : Vous sentez-vous en danger après l’attentat à la voiture piégée qui a coûté la vie, la semaine dernière, à Hanifa Safi, qui se battait comme vous pour faire respecter les droits des femmes afghanes ?

Sima Samar : Je n'ai pas peur car la situation a toujours été risquée. Le côté positif de ce drame, s’il y en a un, est que désormais, la population ne peut plus interpréter ces actes comme des événements isolés ou des règlements de compte personnels. Aujourd’hui, elle n’hésite pas à réclamer que justice soit faite, usant de la liberté de la presse et des institutions existantes pour obtenir gain de cause.

Tf. : Les femmes paient actuellement un lourd tribut en Afghanistan. Quelles ont été les réactions après l’exécution de Roshna Khalid Najib, cette jeune femme accusée d’adultère ?

S. S. : Malheureusement les réactions à ce meurtre n’ont pas été aussi vives qu’elles auraient dû l’être. C'est la preuve qu’il y a encore un énorme travail à faire pour changer les mentalités. Nous devons absolument réveiller les consciences pour que ces exécutions n’aient plus lieu et appeler à une même justice pour tous.

Tf. : Comment expliquez-vous l’augmentation des violences envers les femmes dans le pays ces derniers mois ?

S.S. : La violence contre les femmes reste en effet l'un des plus grands problèmes en Afghanistan. Ceci s’explique par la mentalité d’une partie de la population et l’existence d’institutions qui encouragent certains à contourner la loi pour faire plier l’Etat de droit. C’est une situation très courante quand il existe une justice parallèle dans un pays. C’est malheureusement d’autant plus le cas en Afghanistan que certains de nos alliés internationaux soutiennent cette justice informelle, dont les décisions vont pourtant toujours à l’encontre des droits des femmes.

Tf. : Pensez-vous que l’aide financière de la communauté internationale, en contrepartie d'une série de mesures favorisant l’émancipation des femmes, puisse suffire à inverser la tendance ?

S. S. : L’aide financière de la communauté internationale ne suffira pas à améliorer la situation des femmes et de la population en générale ; non seulement parce que les besoins financiers sont plus grands que l’aide proposée, mais aussi parce cette approche manque d’unité et de coordination. Pour inverser la tendance, des mesures devraient être prises et appliquées à l’ensemble du pays. Or, la majeure partie des provinces afghanes ne font l’objet d’aucun soutien.
Par ailleurs, la plupart des projets sont superficiels alors qu’il faudrait s’attacher à changer en profondeur la mentalité des femmes et de la population. C’est la base du problème.

Crédit photo : The Advocates for Human Rights

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