Les Palestiniennes dénoncent le "crime d'honneur" d'une jeune femme battue par sa famille

Publié le Mardi 03 Septembre 2019
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
#WeAreIsraa : Les Palestiniennes s'insurgent contre les "crimes d'honneur"
#WeAreIsraa : Les Palestiniennes s'insurgent contre les "crimes d'honneur"
La mort d'Israa Ghrayeb, une jeune femme de 21 ans, battue par sa famille parce qu'elle avait posté une photo d'elle avec son petit ami en ligne, insuffle un vent de révolte dans les rues palestiniennes. Les femmes y dénoncent les "crimes d'honneur", autant l'acte que le terme.
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Israa Ghrayeb est morte le 22 août, à Beit Sahour, près de Bethléem, dans des conditions jugées suspectes. La jeune Palestinienne de 21 ans se trouvait à l'hôpital quand elle est soi-disant décédée d'une crise cardiaque, rapporte RFI. La raison de sa présence dans l'établissement ? Sa famille l'avait battue après avoir découvert une photo d'elle et de son petit ami en ligne, qui l'avait demandée en mariage quelques semaines plus tôt. Si l'enquête est en cours afin de déterminer les véritables causes du décès, pour les femmes qui ont défilé dans les rues de Ramallah, au sein des Territoires palestiniens occupés, ce 2 septembre, il s'agit d'un meurtre. D'un féminicide terriblement justifié par la mention de "crime d'honneur", qu'elles veulent à tout prix dénoncer.

"Israa est comme ces centaines de Palestiniennes et comme ces milliers de femmes dans le monde arabe qui ont été tuées par des membres de leur famille ou leurs compagnons en raison du soi-disant honneur familial, on en a marre !", lâche la directrice d'une ONG au journal français. Les militantes et les ami·es de la victime avancent, vidéo tournant sur les réseaux sociaux à l'appui, qu'Israa Ghrayeb aurait été à nouveau attaquée sur son lit d'hôpital par les membres masculins de sa famille.

Le Premier ministre palestinien Mohammad Chtayyeh a annoncé hier que plusieurs personnes ont été arrêtées pour être interrogées. "L'enquête se poursuit, nous attendons les résultats des tests de laboratoire", annonçait-il dans une vidéo de l'agence de presse palestinienne WAFA.

#WeAreIsraa
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Pour l'ancienne ministre Majda al-Masri, présente au rassemblement devant le siège du gouvernement palestinien à Ramallah, "tout indique que c'est un meurtre", a-t-elle expliqué à l'AFP. "Cette manifestation aujourd'hui n'est pas seulement pour que les auteurs soient poursuivis, mais aussi pour que le gouvernement assume ses responsabilités en promulguant la loi pour protéger les familles."

Une vingtaine de femmes tuées chaque année dans des conditions similaires

Dima Tadrouz, 23 ans, en appelle elle aussi aux autorités. "Il n'y a pas de loi qui protège les femmes et les adolescentes", déplore-t-elle, "Et ceux qui ont commis ce crime doivent être reconnus coupables sinon les femmes en Palestine ne seront pas en sécurité, car on ne se sent pas en sécurité quand il n'y a pas de loi qui tient les familles responsables de tels crimes."

Selon l'AFP, Majda al-Masri aurait demandé à Mahmoud Abbas, le président palestinien, à modifier le code pénal jordanien, en vigueur en Cisjordanie, qui "considère encore la défense de 'l'honneur' comme une circonstance atténuante pour un homicide", ou plus précisément : un féminicide. En 2018, 20 femmes sont mortes dans des conditions similaires, 19 autres depuis le début de l'année.