Festival d'Avignon 2024: notre sélection de spectacles audacieux et engagés à voir absolument au "IN"

Le Festival d'Avignon, référence nationale de l'art vivant, propose du 3 au 21 juillet une réjouissante salve de spectacles engagés et audacieux. L'actualité se reflète sur des planches où se succèdent danses, performances et fictions. A la barre, on observe des metteuses en scène aux créations très incarnées. Mais que prioriser au sein de cette salve de propositions artistiques assaillant la ville ? Pas de soucis : suivez le guide.

Quelles sont ces "mères" qui s'érigent à travers le nom de ce spectacle musical ? Ce sont une multitude de femmes d'origines différentes, aussi bien polonaises qu'ukrainiennes, et plus encore des victimes de violences venues témoigner de leur expérience à travers la chanson. Une intention puissante et sororale que la metteuse en scène polonaise Marta Górnicka concrétise à travers le chant de vingt-et une interprètes, excusez du peu.

Dire l'intime et le politique en chansons ? L'artiste Marta Górnicka relève volontiers cet épineux défi puisqu'elle est elle-même chanteuse, diplômée du Conservatoire de musique de Varsovie. Ce chant "en temps de guerre" est polyphonique et d'autant plus nécessaire alors que chaque année nous rappelle désormais la date sidérante du 24 février 2022, premier jour de l'invasion de l'Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine.

"Mothers : A Song for Wartime" de Marta Górnicka, à la Cour d'honneur du Palais des papes. Du 09 au 11 juillet.

Pina Bausch est l'une des légendes de la danse contemporaine et il semble tout à fait limpide de lui faire honneur à Avignon, lors d'un festival mettant volontiers en valeur cette expression artistique sous toutes ses formes. Plus précisément c'est d'une pièce particulière qu'il est question sur ces planches : le "Café Müller", spectacle que chérit particulièrement Boris Charmatz, le directeur artistique du Tanztheater Wuppertal.

Tant et si bien que le directeur a imaginé une "installation chorégraphique" d'une durée de sept heures aux vingt-cinq interprètes. Tel que le suggère subtilement l'anglicisme faisant office de titre, "Forever", l'idée est de proposer en rendant hommage à la mythique danseuse et chorégraphe allemande un spectacle sans fin, qui existe avant l'arrivée du public et perdure bien après. Mieux que l'art vivant : l'art immortel ?

"Forever : Immersion dans Café Müller de Pina Bausch" de Boris Charmatz à La FabricA. Du 14 au 21 juillet 2024.

A l'heure où de plus en plus de personnalités dénoncent l'âgisme, autrement dit les discriminations anti-vieux et leur exclusion de la société (parmi elles, Antoine de Caunes, Laure Adler, Cécile de France, Zabou Breitman, Adeline Blondieau, Emmanuelle Béart) cette "vie secrète des vieux" imaginée par l'auteur Mohamed El Khatib apparaît à point nommé pour renverser la stigmatisation systémique. Le jeunisme a beau inonder publicités et fictions, Mohamed El Khatib s'exerce à assurer la représentation dans l'art des personnes âgées.

Et plus encore, l'énoncé... De leurs désirs. Un sujet quasiment tabou à laquelle cette pièce de théâtre accorde une place salvatrice. Répondant au nombre de huit, les seniors se racontent sur les planches et ce qui en émane ressemble à une histoire d'amour plurielle. Pas si désuètes, les générations d'antan.

"La vie secrète des vieux" de Mohamed El Khatib, Chartreuse de Villeneuve lez Avignon. Du 4 au 19 juillet 2024, sauf 6, 10, 14 et 18 et juillet.

Cet "océan du silence" - douces assonances - résume poétiquement l'oeuvre de l'autrice et metteuse en scène uruguayenne Tamara Cubas. Artiste engagée puisqu'elle aborde ici frontalement les trajectoires de femmes marginalisées et silenciées, à savoir, les femmes migrantes qui doivent fuir leur pays pour survivre.

Violences, traques et fugues au féminin, comme d'éternelles réitérations de la fameuse "chasse aux sorcières", synonyme de stigmatisation et de misogynie érigée en système... Une dimension politique précieuse aux yeux de l'artiste visuelle, s'emparant d'un sujet naturellement synonyme de profondes réflexions féministes. Ou quand le théâtre se fait le lieu des émancipations nécessaires.

"Sea of Silence" de Tamara Cubas au Théâtre Benoît-XII. Du 4 au 9 juillet sauf 7 juillet.