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"Vous avez volé mon enfance" : le discours historique de Greta Thunberg à l'ONU
Publié le 24 septembre 2019 à 13:18
Par Pauline Machado | Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
La jeune activiste suédoise de 16 ans s'est exprimée à la tribune de l'ONU lors du sommet sur le climat, ce lundi 23 septembre. Greta Thunberg a livré un discours poignant aux dirigeant·es du monde entier, les accusant de compter sur la jeune génération au lieu d'agir concrètement.
"Vous avez volé mon enfance" : le coup de gueule cinglant de Greta Thunberg à l'ONU "Vous avez volé mon enfance" : le coup de gueule cinglant de Greta Thunberg à l'ONU© Getty Images
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Le 23 septembre, des millions de personnes attendaient le sommet sur le climat de l'ONU au tournant. Plus particulièrement les jeunes générations, dont la force de la mobilisation inspire aux quatre coins du globe. A la tribune, Greta Thunberg, 16 ans, devenue la figure iconique de ce combat écologiste, s'est exprimée devant chef·fes d'Etat et dirigeant·es. Et n'a pas mâché ses mots. Celle que beaucoup applaudissent pour son engagement et l'importance de son combat - et que certain·es critiquent lâchement, moquant sa jeunesse ou pire, son autisme - a remplacé son approche usuellement purement factuelle par une colère légitime. Un coup de gueule glaçant qui a pour but de mettre enfin les gouvernements face à leurs responsabilités : celles de ne pas compter sur des enfants pour faire le boulot à leur place.

"Je ne devrais pas être là, je devrais être de retour à l'école, de l'autre côté de l'océan, et pourtant vous vous tournez tous vers nous, les jeunes, pour 'l'espoir'. Comment osez-vous ?", entame avec une expression mêlant tristesse et rage sur son visage l'adolescente qui s'est rendue à New York en bateau pour limiter son emprunte carbone. "Vous avez volé mes rêves et mon enfance avec vos paroles creuses, et encore, moi je fais partie de ceux qui ont de la chance. Les gens souffrent, les gens meurent. Des écosystèmes entiers s'effondrent, nous sommes au début d'une extinction de masse et tout ce dont vous pouvez parler, c'est de l'argent et du conte de fée d'une croissance économique éternelle. Comment osez-vous ?"

Après avoir rappelé quelques constats dramatiques - notamment qu'avec les niveaux d'émissions d'aujourd'hui, le budget de CO2 restant sera entièrement épuisé en moins de 8 ans et demi, ou encore que réduire nos émissions de moitié en 10 ans ne nous donne que 50 % de chance de rester en dessous de 1,5 degré, et le risque de déclencher des réactions en chaîne irréversibles hors du contrôle humain -, Greta Thunberg a accusé directement l'audience.

"Les jeunes commencent à comprendre votre trahison", a-t-elle asséné. "Les yeux de toutes les générations futures sont braqués sur vous. Et si vous décidez de nous laisser tomber, je vous le dis : nous ne vous pardonnerons jamais. Nous ne vous laisserons pas vous en sortir comme ça."

"Pas sûr que ce soit la voie la plus efficace"

Au terme du discours, des applaudissements qui semblent malvenus. Car Greta Thunberg n'est pas là pour livrer une performance, elle somme les puissant.es d'agir concrètement, de ranger leurs belles paroles et leurs accords bafoués, et de réaliser l'urgence de la situation. Elle a d'ailleurs décidé, aux côtés de 15 autres jeunes, de déposer une plainte inédite devant le Comité des Droits de l'Enfant de l'ONU, contre cinq pays : l'Argentine, le Brésil, la Turquie, l'Allemagne et la France. Plainte commentée ce matin mardi 24 septembre par le président Emmanuel Macron, qui s'est contenté de déclarer qu'il n'était "pas sûr que ce soit la voie la plus efficace" pour lutter contre le changement climatique, dénonçant également les "positions très radicales" de l'activiste, "de nature à antagoniser nos sociétés", au micro d'Europe 1.

Suite aux marches pour le climat des 20 et 21 septembre, le président de la République y était également allé de sa petite formule, estimant que "défiler pour dire que la planète brûle, c'est sympathique, mais ce n'est pas le problème. On devrait rentrer dans une forme d'action collective". Et conseillait aux jeunes d'aller plutôt ramasser des déchets sur les rivières et plages corses, ou de "manifester en Pologne". Il se justifiait en expliquant que le pays d'Europe de l'Est "bloquait tout" par son opposition, avec la République Tchèque et l'Estonie, à l'inscription de l'agenda de neutralité carbone parmi les engagements européens. Et ajoutait qu'il n'avait "pas le sentiment que la France bloque". Pas de sa faute, donc, mais celle des voisins, qui feraient bien pire.

De son côté, Donald Trump n'a pas pu s'empêcher de tweeter une énième phrase de mauvais goût. Le président américain n'était pas censé se présenter au sommet, mais a tout de même fait une apparition remarquée de quelques minutes. En l'apercevant, Greta Thunberg lui a d'ailleurs lancé un regard noir, mâchoire serrée. Plus tard, en sortant du discours de la militante, le chef d'Etat s'est saisi du réseau social pour y poster ces quelques mots, dégoulinants d'ironie : "Elle a l'air d'une jeune femme très heureuse qui regarde vers un avenir merveilleux et souriant. Tellement agréable à regarder !".

Si Emmanuel Macron a appelé, lors de son discours à la tribune de l'ONU, à "des actes, des actes, des actes", force est de constater que ce sommet sur le climat est mitigé, voire "décevant", comme le qualifient Les Echos. Parmi les grands pays émetteurs de gaz à effet de serre, aucun n'a pris de décisions concrètes, et certains ne se sont carrément pas exprimés - voire n'ont pas daigné mettre les pieds au rassemblement. Un bilan terrible, qui laisse un goût résolument amer.

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