Célébrons le JOMO, cette joie de rater des trucs et de s'en foutre royalement

Publié le Lundi 03 Décembre 2018
Pauline Machado
Par Pauline Machado Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Le JOMO, la joie de louper des trucs.
Le JOMO, la joie de louper des trucs.
Puisque la pression sociale n'aura pas notre peau, on préfère prendre notre pied à louper les soi-disant soirées de l'année.
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Il est 17h30, un samedi. Ce soir, on est censée retrouver des potes pour boire un verre dans un quartier cool de Paris. Si l'on en croit l'excitation collective sur le groupe commun, c'est presque la soirée de l'année et en plus, "il y aura Gustave, le barman qu'on aimerait te présenter".

En vrai, Gustave s'appelle Hervé, mais il trouvait que ça collait beaucoup moins à son statut de gérant d'un ancien-PMU-devenu-bar-branché, transformé à coup de néons vintage et de planches de saucisson de canard à 1000 balles. On a tous le droit à une seconde chance dans la vie.

Du fond de notre lit (on n'en a presque pas décollé depuis 23 heures la veille, à part pour ouvrir au livreur héroïque qui a grimpé cinq étages pour nous apporter 18 california rolls), on a moyennement envie d'aller siroter des mojitos trop chers de l'autre côté de la capitale.

On a beau peser le pour et le contre pendant une bonne minute, la pression sociale ne fait clairement pas le poids face au confort de notre appart'. On est bien chez nous, sous notre plaid et éclairée à la bougie, et on s'en fout comme de notre première culotte d'y rester cloîtrer un samedi soir - ça nous donnera l'occasion de voir si Patrick Sébastien est toujours aussi gênant, tiens.

Pire, on prend même du plaisir à rater cet événement qui pourrait finalement avoir un vrai potentiel d'amusement réel comme virtuel - couverture Instagram oblige -, et à se faire désirer pendant qu'on s'empiffre de gnocchis piochés directement dans la poêle.

Ce phénomène quasi-jouissif a d'ailleurs un nom chez les anglophones : le JOMO, Joy of Missing Out, ou la joie de manquer un truc, selon PureWow. Soit l'option inverse du FOMO, Fear of Missing Out, la peur de manquer un truc, donc, qui paralyse tous les millennials angoissé·es qui se respectent.

Avoir le JOMO (attention à ne pas l'employer en verlan, votre phrase aurait un tout autre sens), c'est être parfaitement à l'aise avec l'idée de dire non à un plan cool, juste parce que notre propre présence nous suffit et qu'on sait pertinemment qu'on ne passera jamais un meilleur moment qu'en restant seule à la maison. On s'aime, que voulez-vous.

C'est aussi couper le WiFi pendant quelques temps (petite folle que nous sommes) et apprécier d'être injoignable ou de reposer son cerveau loin de l'écran greffé à notre main. S'accorder des vacances en tête à tête avec soi-même et n'en avoir absolument rien à faire de ce qui se passe dehors.

S'il s'agit d'un cheminement plutôt inné pour certain·es, ce n'est pas toujours facile pour d'autres. Les premières sessions de JOMO auront des chances d'en déstabiliser plus d'un·e, et on peut s'attendre à des comportements dits du "lion en cage", qui verront une partie d'entre nous faire les cent pas jusqu'à s'endormir éreintée sur un bout de canapé.

Mais faites-nous confiance et persévérez dans cet art : le jeu en vaut la chandelle.

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