





Depuis le début du mois de mai, la campagne de réhabilitation publique de Nicolas Bedos occupe une grande place dans les médias. Comme nous vous le disions dans cet article, l'acteur de 46 ans fait la tournée promotionnelle de son livre, publié le 7 mai dernier, "La Soif de Honte". C'est ainsi qu'il a fait la Une du Point avant d'être invité sur le plateau de Léa Salamé, dans Quelle Epoque !. Un passage qui a beaucoup fait parler car, comme nous vous le disions dans cet article, c'est aussi là que l'humoriste Paul de Saint Sernin lui a donné une leçon sur le consentement.
Pour rappel, l'acteur a été condamné, en octobre 2024, à un an de prison dont six mois avec sursis pour avoir agressé sexuellement deux femmes. Les deux plaignantes avaient rapporté des faits d’attouchement sexuel sans consentement en soirée. Une troisième affaire de harcèlement sexuel à son encontre n’avait pas abouti, "au bénéfice du doute".
Au milieu de cette campagne qui présente Nicolas Bedos comme un repenti qui a compris ses erreurs, l'essentiel a peut-être été mis de côté, ou survolé . Que dit-il réellement dans son livre ? La chroniqueuse et humoriste Christine Berrou l'a lu et a donné son avis sur la question dans une vidéo publiée sur son compte Tiktok, le 19 mai. Son constat est sans appel : "Ce n'est pas du tout le livre de quelqu'un qui est désolé, mais celui de quelqu'un qui n'aime pas son époque et qui a des comptes à régler".
Pour illustrer son propos, Christine Berrou nous lit des passages du livre. "De la page 208 à la page 212, il humilie une femme qui a osé raconter à Médiapart une tentative de baiser non consentie, dit la chroniqueuse. Sur 4 pages, il raconte plusieurs détails de sa vie intime, y compris quand elle était mineure." Pour elle, "on est sur un bien beau règlement de compte". "J'ai bien envie de parler de revenge porn mais je ne sais pas si ça s'applique au monde de la littérature", va-t-elle même jusqu'à suggérer.
Page 100 : "dans l'écrasante majorité des cas, je ne crois pas aux fausses accusations, mais là il s'agit d'une comédienne qui accuse un réalisateur en pleine vague #MeToo, nous lit encore Christine Berrou. Selon Nicolas Bedos, cette femme "a peut-être voulu faire un exemple pour contribuer à la réforme des rapports de séduction ou peut-être qu'elle a voulu exister comme une victime, être réconfortée, plainte, saluée, portée aux nues par l'air du temps".
Page 140 : "Sa compagne le rassure en lui disant que sur les réseaux sociaux, beaucoup de femmes soulignent qu'il est bien trop séduisant pour avoir eu besoin d'agresser qui que ce soit", ajoute la chroniqueuse.
Après lecture de ces passages du livre de Nicolas Bedos, difficile en effet de croire en son mea culpa. "C'est à cause de ce genre de représailles que la libération de la parole des victimes est encore très fragile", déclare Christine Berrou dans sa vidéo. Pour elle, ces passages sont la preuve "que Nicolas Bedos ne comprend pas du tout la cause qu'il dit pourtant avoir toujours défendue". "Ce livre sert aussi à remettre en question la sincérité des femmes qui l'accusent, affirme-t-elle. (...) Sous couvert de débat, de nuance et d'humour il installe un doute qui va danse son sens. Il réduit l'acte de témoigner à une stratégie d'égo ou d'opportunisme. Il décrédibilise la parole des femmes tout en se prétendant un allié."
Si l'analyse de ce livre et de son accueil est d'autant plus importante, c'est parce que comme le souligne Christine Berrou, "des livres comme celui-ci qui visent à accélérer une réhabilitation publique par l'auto-narration au détriment de victimes moins médiatisées, il va y en avoir maintenant un sacré paquet et il serait bien que les journalistes prennent leurs responsabilités".
C'est aussi d'autant plus important dans le contexte du rapport accablant rendu par la commission d'enquête sur les violences, menée par l'Assemblée Nationale. Une enquête à laquelle Christine Berrou rappelle qu'elle a participé en qualité de témoin. Une commission qui, selon Nicolas Bedos dans son livre, "a des allures Maccarthyste". Autrement dit de chasse aux sorcières. Autrement dit, qu'il récuse. "À l'entendre, dans toute cette histoire, la victime c'est lui", conclut l'humoriste.